Essai : AC MKVI GT. Allez, crache ton venin !

P1060754Il faut savoir le reconnaître la production automobile mondiale nous gratifie de beaucoup de belles choses (ainsi que de beaucoup moins belles…) cependant, à quelques rares exceptions, cette production se compose de véhicules qui malgré toutes leurs qualités sont de plus en plus lisses dans leur comportement et de plus en plus faciles à conduire même dans leurs déclinaisons dites sportives. Mais justement il y a des exceptions et c’est à la découverte de l’une d’entre elles que je vous convie ici…

La marque britannique AC existe depuis le début du XXe siècle mais a surtout connu ses lettres de noblesses aux Etats-Unis sous l’impulsion de Carrol Shelby dans les années 1960 créateur de la mythique AC Cobra qui fut déclinée dans de nombreuses configurations toutes plus extrêmes les unes que les autres. Ce mythe on le retrouve depuis un peu partout dans le monde via des petits constructeurs qui proposent des répliques de la Cobra originale ou des voitures en kit à monter soit même, mais, sans vouloir aucunement dévaloriser ce travail de passionnés, force est de constater que le résultat n’est pas toujours à la hauteur des espérances et si l’on retrouve bien les formes et l’aspect général de la voiture on n’y retrouve pas nécessairement l’essence…

Depuis 2001 AC est revenu sur le vieux continent chercher des partenaires pour poursuivre son histoire et c’est AC Automotive, un petit artisan automobile dont l’usine est basée à Heyda, un microscopique village de Saxe dans l’Est de l’Allemagne qui fut choisi pour relancer la marque. Ainsi est née la nouvelle AC MKVI GT qui n’est donc pas une réplique mais bien un modèle entièrement nouveau développé à partir d’une feuille blanche, l’objectif étant de (re)créer un engin cohérent, efficace, abouti et fidèle à l’esprit initial, le tout avec un minimum de compromis, la notion de radicalité ayant sans aucun douté été l’une des lignes directrices des ingénieurs de la voiture.

Sensualité !

C’est un mot qui vient facilement à l’esprit lors de la première rencontre avec la belle car ce qu’on remarque en premier de ce roadster c’est son esthétique aguicheuse au look délicieusement rétro et intemporel à la fois. La peinture noire mate de notre voiture d’essai m’a semblée encore accentuer cette sensualité et l’un des premiers réflexes quand on l’approche est de la toucher, voire de la caresser ! Bien que ses proportions soient contenues (4,02 m. en longueur et 1,83 m. en largeur) la voiture en impose par son style résolument démonstratif. Ce sont principalement des courbes qui façonnent le véhicule et lui confèrent cette personnalité unique: de petites optiques rondes et malicieuses à l’avant, une bouche béante qui s’ouvre directement sur le radiateur, un capot plongeant vers l’asphalte qui se prolonge tout en ondulation et presque sans fin vers le petit pare-brise et ses trois essuie-glaces, les passages de roue arrière particulièrement marqués qui donnent une assise remarquable à l’ensemble et cette poupe qui se termine comme une vague, tout concourt à rendre la MKVI dynamique même à l’arrêt. Ces formes sont de plus magnifiquement sublimées par les nombreux détails de style, le plus souvent chromés, qui soulignent le caractère à la fois rétro et sportif de la voiture : les pare-chocs avant et arrière à l’ancienne, la prise d’air sur le capot pour faire inspirer le bloc moteur, les ouïes latérales pour lui permettre de souffler, le cerclage du pare-brise, les minuscules rétroviseurs ronds, l’imposant arceau de sécurité côté conducteur, la trappe à essence qui ne cherche surtout pas à se fondre dans la masse et bien sur les extraordinaires pots d’échappement latéraux dont les quatre tubes de chaque côté annoncent subtilement les caractéristiques techniques du monstre qui se cache dans les entrailles de la belle.

La sensualité on la retrouve aussi en s’installant à bord de cette AC. Le constructeur a souhaité donner à son bébé un caractère exclusif et luxueux et c’est incontestablement réussi. Cet intérieur est ainsi presque intégralement tapissé d’un cuir de belle qualité, très agréable au touché et dont vous pouvez choisir la couleur dans une large palette. Dans la configuration présentée ici, c’est en toute logique qu’un rouge profond, couleur de la sensualité s’il en est, est venu s’associer magnifiquement au noir mat de la carrosserie. L’instrumentation, en position centrale avec des manomètres cerclés de chrome du plus bel effet, est parfaitement lisible et ultra-complète : température d’huile, pression d’huile, voltage, température d’eau, niveau d’essence et il est même possible de rajouter d’autres indicateurs en option comme la température d’huile de la boite de vitesse. Le tachymetre se retrouve à droite tandis qu’à gauche, sous vos yeux, trône un compte tour gradué jusqu’à 8000 tours, dépourvu de zone rouge et à l’aiguille inversée façon Aston Martin… ou Peugeot 308…

Les jolis interrupteurs chromés côtoient de petits témoins lumineux, de petites molettes rondes gèrent le système d’aération/chauffage, les commodos, très fins, sont entièrement en métal, c’est très artisanal dans le sens le plus noble du terme et c’est un vrai plaisir ! Un petit regret néanmoins quant à l’intégration du système d’infotainment tactile GPS/Audio, non pas sur sa présence, il est vrai un peu décalée par rapport au reste du véhicule, mais simplement parce que c’est le seul élément qui ne soit pas rond, ni d’ailleurs cerclé de chrome. Tout cela tombe en tout cas parfaitement sous la main et la finition de l’ensemble est tout à fait remarquable. Mieux, la voiture n’oublie même pas les aspects pratiques, alors certes ce n’est pas un monospace mais on trouve de belles aumônières sur les contre portes, de plus petites au niveau des pieds et une boite à gants (pour disons deux paires…) qui ferme à clé et dans laquelle se trouve un allume cigare. Le coffre quant à lui accueillera sans difficulté deux valises de taille moyenne pour un petit week-end ou les vitres latérales, pour les longs trajets, et la capote pour les printemps pourris…

L’accès à bord nécessite un brin de souplesse car la voiture est extrêmement basse et il faut passer par-dessus les énormes pots d’échappement (potentiellement brulants si vous venez de rouler… gare à la conduite en short ou en jupe) mais une fois ces (toutes) petites difficultés surmontées vous voila installé dans les superbes petits sièges baquets. On est presque assis sur l’asphalte, on aperçoit à peine le bout du capot, les rétroviseurs sont minuscules, le tunnel central est imposant et le pédalier (réglable électriquement) situé tout à gauche n’est pas exactement dans l’axe du magnifique petit volant que vous agrippez instantanément de manière quasi-jubilatoire, tous les repères automobiles que vous possédez sont chamboulés…

Bestialité !

Il faisait chaud sur l’Alsace au moment de cet essai, très chaud même, entre 35 et 37 °, et l’on pourrait crânement se dire que c’est la raison pour laquelle vous transpirez au moment de prendre le volant mais je crois sincèrement que l’AC possède une fonction « augmentation de la température ambiante et du rythme cardiaque » de série qui se déclenche automatiquement à son approche… Au moment de mettre le contact en appuyant sur le petit bouton chromé du haut de la planche de bord je viens déjà de faire quelques kilomètres en tant que passager et je suis déjà convaincu s’il en était besoin du caractère sportif de la voiture, mais maintenant que je suis derrière le volant de cette AC c’est autre chose.

Contact donc ! Sous le capot le V8 6,2 l atmosphérique s’ébroue, d’origine Chevrolet, on le retrouve notamment sur la Corvette C7 mais naturellement il a été retravaillé par les ingénieurs d’AC Automotive. C’est sourd, rauque, profond, ça vibre, ça file des frissons (à 37° !!!). Les échappements qui sont situés à quelques centimètres de vous renforcent l’ambiance démoniaque, ça fait du bruit et ça ne passe pas inaperçu, d’ailleurs les passants ne passent plus ils vous regardent passer… Tentons d’enclencher la première, on enfonce la pédale d’embrayage et on serre le pommeau du levier de vitesse qui tombe directement sous votre main. Un centimètre de débattement tout au plus, oui oui la première est enclenchée dans un petit “clac” qui vous fait bien sentir les pignons de la boite, allez c’est parti !

C’est immédiatement brutal, le moteur crache ses 437 ch. et son énorme couple de 535 Nm et vous propulse en avant, d’autant qu’il n’est pas facile dans un premier temps de maitriser la course de la pédale d’embrayage, mais ça vient vite… Je passe la seconde, le débattement du levier est ultra court et j’appuis sur l’accélérateur, ça hurle, ça crie sa joie, c’est immédiatement une montée d’adrénaline incroyable. Arrive le premier virage, on lève le pied, les échappements pétaradent avec le retour des gaz, et on cherche à freiner. Ah ben non ça freine pas !!! Il faut appuyer comme une brute sur la pédale extrêmement dure et pratiquement sans aucun débattement, mais alors du coup ça freine ! J’ai ralenti, super, je suis sauvé, il ne reste plus qu’à tourner le volant pour prendre le virage, j’ai dit « tourner le volant pour prendre le virage », mais il faudrait encore que je puisse ! La direction sans assistance est en effet particulièrement lourde et le moindre rond point nécessite de faire sérieusement travailler vos petits biscotos, et avec les deux mains de préférence, c’est même l’une des principales critiques que l’on peut faire à l’auto car cette direction si elle s’avère très précise et très directe, parfaite à vitesse élevée, est vraiment difficile à manier à vitesse réduite (oubliez si possible les créneaux), AC Automotive en a d’ailleurs conscience et une direction assistée est à l’étude.

C’est reparti, troisième, quatrième, cinquième, sixième, tout est dur, toutes les commandes sont d’une fermeté absolue (en reprenant mon véhicule personnel après l’essai j’avais l’impression de conduire dans du chamallow) et la belle s’est transformée en bête rugissante et bondissante. Le bruit du moteur est enivrant, on joue avec aussi bien en montant dans les tours qu’en rétrogradant, il respire intensément et délivre sa puissance en permanence et vous, vous souriez !

Plaisir absolu !

La MKVI GT procure un plaisir de conduite qu’il est bien difficile de comparer avec d’autres véhicules. C’est un plaisir très éprouvant car la voiture est vraiment épuisante à piloter. Il est toutefois parfaitement possible de la conduire paisiblement, cependant même dans ces conditions vous ne ressortirez pas frais et dispos d’un passage à bord, mais si on joue un peu avec elle en cherchant ses limites (n’étant pas pilote je ne les ai même pas ne serait-ce qu’approchées) alors on peut le dire on s’approche d’un exercice physique au sens sportif du terme.

Au ras du sol et les cheveux au vent les sensations procurées sont fabuleuses car on finit par « dompter » au moins partiellement le véhicule et on enchaine les accélérations et décélérations, les successions de virages serrés ou les grandes courbes et les lignes droites à des vitesses parfois répréhensibles mais, finalement pas si souvent que cela. L’AC procure en effet à son conducteur des sensations étonnantes même à une vitesse raisonnable et il n’est nul besoin d’atteindre les 278 km/h (vitesse maxi de la MKVI) pour profiter de l’engin. Les reprises sont phénoménales avec une sensation de poussée terrible à chaque accélération (0 à 100 annoncé pour 3,7 secondes, rapport poids puissance de premier plan puisque la machine ne pèse que 1050 kg). La tenue de route est rigoureuse grâce à une répartition des masses quasi idéale (49-51) et à un centre de gravité très bas. La motricité de très bon niveau et bien aidée par les énormes pneus arrières (ici des Michelin Pilot Supersport 295/35 ZR 19) n’est pas prise à défaut alors qu’il n’y a pas d’antipatinage en série et aucune aide à la conduite moderne. Ce constat ne vaut cependant que sur sol sec et il y a fort à parier que sur une route un peu plus humide la maîtrise du train arrière, qui s’est montré quasi-imperturbable lors de l’essai, puisse sans doute s’avérer plus délicate. L’amortissement, hyper efficace (amortisseurs course réglables KW), élimine radicalement tout mouvement de caisse et se permet même le luxe de ne pas transformer la voiture en planche à pain. Tous ces éléments combinés à la philosophie et à l’esprit AC font que ce véhicule attire irrésistiblement la sympathie, l’attachement immédiat et l’enthousiasme le plus grand, on ne quitte son baquet qu’à regret, épuisé mais à regret quand même…

L’AC MKVI GT est donc une voiture aux antipodes de la production automobile actuelle, pratiquement impossible à utiliser au quotidien, politiquement incorrecte par sa puissance et sa consommation, terriblement physique dans sa conduite, et naturellement très chère (plus de 135 000 € en prix de base). Autant de raisons toutes plus irrationnelles les unes que les autres pour faire d’elle un authentique objet de désir et de passion automobile. AC Automotive ne compte d’ailleurs pas s’arrêter en si bon chemin, les objectifs de production sont pour le moment modestes (une dizaine de véhicules cette année et un doublement prévu de la production chaque année par la suite, il faudra donc également savoir se montrer patient avant d’avoir son jouet) mais la gamme est en plein développement et la MKVI va être déclinée dans des versions encore plus extrêmes : MKVI GTS de 647 ch et MKVI GTS Big Block (V8 7,2 l…) de 640 ch et surtout MKVI GTS R de 780 ch !!! Ils sont fous non ? Oui, mais alors vive la folie !!!

En France et au Benelux la gamme AC est distribuée par Formula Automobile (http://www.formula-automobiles.com/). Actuellement basé en Alsace à Weyersheim à une vingtaine de kilomètres de Strasbourg mais qui va prochainement ouvrir son nouveau show room à Mommenheim, toujours à proximité de Strasbourg. C’est chez eux que j’ai eu le plaisir de me rendre pour réaliser cet essai exceptionnel aussi toute l’équipe du BlogAutomobile (et moi en tout premier lieu) tient à les remercier très sincèrement pour leur excellent accueil et leur disponibilité.

Le site d’AC-Automotive : http://www.ac-automotive.com/index.php

Crédit photo Eddy P.

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