Après quatorze années d’existence et deux générations à succès, représentant près de 3 millions d’exemplaires produits (dont 1,7 millions pour la Xsara Picasso à elle seule), autant dire que le renouvellement du monospace compact aux chevrons n’était pas une mince affaire. Si Citroën s’est autorisé quelques folies sur la forme, avec une certaine prise de risque côté design, la marque nous assure avoir mis le paquet sur le fond et tout particulièrement sur le contenu technologique de son nouveau modèle, afin de le voir rester l’un des leaders du segment. Alors, pari tenu ? C’est sur les petites routes portugaises de la région de Lisbonne que nous avions rendez-vous pour essayer l’une des nouveautés les plus importantes de l’année 2013.
La gueule de l’emploi ?
Après un bref temps d’observation (et d’adaptation), il faut bien se rendre à l’évidence, le design du nouveau C4 Picasso est tout en paradoxes. Il tente en effet de concilier une certaine rigueur germanique (avec un arrière qui ne sera pas sans vous rappeler quelques productions du groupe VAG), avec l’excentricité d’une face avant qui semble tout droit sortie d’un cartoon, le tout saupoudré d’un certains nombres d’artifices directement empruntés à la gamme DS, symboles du chic à la française. Sur ce dernier point, on ne sera guère surpris d’apprendre que le C4 Picasso est l’œuvre de Frédéric Soubirou, qui n’est autre que le designer des DS3 et DS5, mais aussi des concept-cars Survolt et Revolte.
Basé sur la nouvelle plateforme du groupe PSA, la plateforme EMP2, le C4 Picasso II bénéficie de porte-à-faux réduits (- 70 mm à l’avant) et de voies élargies (+ 82 mm à l’avant ; + 31 mm à l’arrière), lui conférant une allure plus trapue et plus dynamique que son prédécesseur.
Dans l’ensemble, le pari esthétique semble réussi. Si les plus mauvaises langues pourront toujours voir dans la face avant le résultat de l’accouplement contre nature entre un Pontiac Aztek et un Fiat Multipla, le design de ce C4 Picasso semble plaire et recueille beaucoup de commentaires positifs. Mais, pour être tout à fait honnête, il faut avouer que ce monospace joue une grande partie son charme sur des détails tels que les feux 3D, les grosses jantes ou encore certains pièces en plastique noir laqué, autant d’éléments que l’on ne retrouve que sur les versions haut de gamme… donc les plus chères.
Loft story
Non, il n’est pas question ici de vous parler de télé-réalité ou des dernières frasques de Nabila, mais bel et bien de l’intérieur. Citroën affirme en effet avoir traité l’habitacle “dans un esprit loft”. Ne cherchez pas la mezzanine ou la plante verte, il n’y en a pas. Ce qu’il faut comprendre par là, c’est que les concepteurs ont fait leur possible pour rendre l’habitacle le plus chaleureux et relaxant possible. Cela se joue d’abord sur la luminosité, avec le désormais classique (mais toujours agréable) pare-brise panoramique, auquel pourra s’ajouter (en option) un toit, lui aussi panoramique mais malheureusement fixe. Cela se joue ensuite sur le travail des formes, des matières et des couleurs. On sent là un réel travail de création, avec un espace intérieur constitué d’un assemblage de matériaux aux teintes et aux textures variées, du plus bel effet. Le tout est solidement assemblé et dégage une belle impression de qualité. Du beau travail. Seul petit hic sur notre modèle d’essai, le plafonnier mal emboité. Pas de quoi fouetter un chat, cela dit, ce genre de petit défaut devrait être corrigé très rapidement sur les chaines d’assemblage (et puis fouetter des chats, c’est mal). Citroën met aussi en avant un nouvel accessoire, inédit à ce niveau de gamme, à savoir un siège passager massant façon “classe affaires”, intégrant une extension qui permet d’étendre les jambes. L’air de rien ça fait son petit effet (ma passagère a apprécié en tous cas) et pourrait se révéler agréable pour les longs trajets.
Pour le reste, Citroën n’a pas oublié les fondamentaux. Vous retrouverez donc un véhicule spacieux avec des sièges indépendants coulissants, des tablettes type aviation pour les enfants, des bacs de rangement partout pour y perdre les clés de la maison et moult porte-gobelets. Il y a aussi un grand coffre (de 537 à 630 dm3, voire 1709 dm3 sans les sièges arrières), suffisant en tous cas pour ranger les valises ou quelques enfants supplémentaires.
Y a-t-il un pilote dans l’avion ?
La technologie embarquée est sans aucun doute l’argument central de la campagne de lancement du C4 Picasso, que Citroën nous présente comme le “Technospace”. De série ou en option, le Picasso propose effectivement pas mal de gadgets, dont certains étaient encore réservés à des modèles de très haut de gamme il n’y a pas si longtemps.
Tout d’abord, fini les boutons partout. La majorité des commandes est désormais accessible via un écran tactile 7″ qui constitue l’élément central de la planche de bord (un certain nombre de boutons semble toutefois avoir migré sur le volant, qui en est recouvert). Il faudra bien vous y faire, le tout tactile devrait être tendance de ces prochaines années (on retrouvera d’ailleurs le même écran à bord de la 308 II d’ici quelques mois). Si je suis toujours sceptique à l’idée de devoir quitter la route des yeux et de devoir naviguer dans un menu pour accéder à des commandes aussi basiques que la climatisation (pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué…), il faut reconnaitre que le système est assez bien pensé : les fonctionnalités principales sont directement accessibles via 7 boutons tactiles situés de part et d’autre de l’écran, ce qui permet de limiter les manipulations et de rester concentré. Les informations relatives à la conduite (vitesse, navigation, etc.) sont affichées sur un second écran (12″), qui vient coiffer la planche de bord. Le bel affichage 3D peut être modifié (2 variantes possibles) et vous pourrez même y insérer une photo personnelle en fond d’écran.
Le régulateur de vitesse actif (qui cale votre vitesse sur celle du véhicule qui vous précède) et le système Park Assist, déjà connus chez certains concurrents, font leur apparition. Le park assist gère à la fois les créneaux et les stationnements en bataille. Simple d’utilisation, il s’active via une touche située sur le volant. On trouve également un système de surveillance d’angle mort et tout un tas de caméras qui permettent d’offrir un système de Vision 360* à l’écran. L’écran tactile permet par ailleurs d’accéder à une un portail d’applications connectées qui pourront par exemple vous servi à trouver la station-service la plus proche, un hôtel, un restaurant, ou à consulter la météo (mais pour ça, vous avez toujours la possibilité de regarder à travers la vitre, à l’ancienne). Pour la prochaine génération, c’est promis, elle sera capable d’aller chercher les enfants à l’école toute seule.
Parmi les (désormais) classiques du genre, on retrouve le démarrage main libres et le frein de parking automatique, de même que l’allumage automatique des phares ou encore l’avertisseur de franchissement de ligne blanche (cette fois-ci, c’est votre ceinture qui vous rappellera à l’ordre par de petits à-coups, un système heureusement inactif en-dessous de 100 km/h pour éviter de vous rendre dingue sur les petites routes de campagne). En revanche, pas de lecteur CD (sauf à piocher dans la liste des options) ; c’est devenu ringard parait-il. Pour la musique, vous avez le système embarqué, auquel vous pourrez vous connecter grâce à deux ports USB. A noter également, une prise 230 V est présente dans l’habitacle (à partir de la finition BUSINESS+).
De retour sur terre
Bien sûr, tout ceci a un coût. Même si les tarifs ne marquent pas de hausse sensible par rapport à la génération précédente (et même une légère baisse sur certaines versions), le C4 Picasso reste dans la fourchette haute côté tarifs, sans pour autant être excessif… à condition de ne pas vouloir tous les joujous à la mode..
En entrée de gamme, la finition ATTRACTION (qui, comme son nom l’indique, sert à attirer le client en concession, pour ensuite lui vendre quelque chose de plus cher) démarre à 23.050 € avec le VTI 120 ou 24.250 avec le HDi 90. A ce prix, vous aurez droit à une radio, au frein de parking automatique, au régulateur/limiteur de vitesse, à l’ESP et à quelques “luxes” aujourd’hui élémentaires comme les vitres électriques, la climatisation ou l’ABS. En revanche, il faudra vous passer d’à peu près tous les gadgets sympa dont je parlais plus haut, ainsi que des sièges coulissants, des tablettes type aviation ou encore des jantes et de tous les bouts de chrome par-ci par-là qui rendent la voiture un minimum présentable. Bref, pas le désert total, mais presque. Il faut attendre la finition INTENSIVE (plus de 28.000 €) pour avoir droit au démarrage mains libres, au bel écran d’affichage panoramique 12″ et à la caméra de recul. Et si vous voulez les feux 3D, le Park Assist, le système de surveillance d’angle mort, le régulateur de vitesse actif et tout ce qui va avec, il faudra alors débourser plus de 30.000 € pour une EXCLUSIVE ou passer par la case des options. Le toit vitré panoramique est quant à lui optionnel quel que soit le niveau de finition (600 €). Au final, on se rend vite compte à l’étude de la grille tarifaire que la plupart des gadgets qui nous ont ébloui lors de cet essai ne feront pas partie du voyage pour la plupart des clients.
Sur la route
Contact, mise en route, c’est parti. Au démarrage, la ceinture active vous plaque contre le siège et vous laisse la sensation étrange que l’auto vous prend dans ses bras pour le voyage. Sur tous types de parcours, le Picasso se montre confortable, grâce notamment à une insonorisation efficace et un confort de suspension qui sait ménager vos vertèbres. Ce confort de suspension ne se fait heureusement pas au détriment de l’agilité. Bonne surprise en effet, sur les petites routes étroites du Portugal, le Picasso montre qu’il sait faire preuve de dynamisme et enchainer les virages serrés avec précision et une prise de roulis très modérée. Pour un peu, on en oublierait presque qu’on est au volant d’un monospace, ça fait plaisir. Sous le capot, le e-HDi 115 se montre plaisant et suffisamment énergique pour une voiture à vocation familiale. Mais l’étagement de boite, privilégiant des rapports longs, vous obligera parfois à jouer un peu trop du levier dans les côtes pour avoir la pêche nécessaire. Le THP 155, pour sa part, se montre certes souple à l’usage mais m’a un peu déçu question performances. On se demande bien où est passée toute cette puissance. Pour faire court, disons que l’on a plus l’impression d’avoir 155 gentils poneys sous le capot que 155 étalons sauvages. Pas de quoi vous scotcher au siège en tous cas.
Le C4 Picasso a pourtant subi une cure d’amaigrissement avant l’été et perd pas moins de 140 kg avec cette nouvelle génération. Cette baisse sensible de poids, associée à une aérodynamique très travaillée, aura au moins profité à la consommation, avec des chiffres très raisonnables. Citroën annonce aux alentours de 4 l / 100 km pour les diesels (90 et 115 ch) mais, comme on ne vit tout de même pas au pays des Bisounours, 6 l / 100 km semble un chiffre plus réaliste dans le monde réel, ce qui est déjà très bien. Comme d’habitude, l’essence se montrera plus glouton, avec une consommation réelle se situant dans la tranche des 8 l / 100 km.
A noter, le 2 l e-HDi 150 fera son apparition à la fin de l’année. Conforme à la future norme Euro VI, il sera accouplé à la BVM6 et devrait satisfaire ceux qui souhaitent plus de puissance. Le HDi 115 devrait toutefois représenter le gros ds ventes sur ce modèle.
Alors, on signe ?
Citroën nourrit de grandes ambitions pour son nouveau monospace compact et nous promet des prestations de premier ordre pour la catégorie. Après deux jours passés à son volant, force est de constater que ce nouveau C4 Picasso tient ses promesses. On pourra certes, comme toujours, trouver quelques points de détail ça et là à critiquer mais, dans l’ensemble, le nouveau monospace aux chevrons est une vraie réussite. Spacieux, confortable, bien fini, agréable à conduire, doté d’un contenu technologique au top (à condition d’y mettre le prix) et d’un design audacieux, le nouveau C4 Picasso ne devrait avoir aucun mal à trouver sa place sur le marché. On n’en attendait pas moins de la part de Citroën.
Un grand merci à toute l’équipe Citroën pour leur accueil chaleureux lors de ces essais.