Les Etats-Unis sont une formidable nation. De la conquête spatiale à Elvis Presley, en passant par les Oreo et les Double Whopper, ce pays illumine notre quotidien et rayonne de toute sa puissance. Les américains ont en outre l’immense honneur d’avoir vu naître Michael Jackson et de pouvoir acheter une Ford Fiesta Powershift avec un toit ouvrant (auxquels les européens ne peuvent toujours pas prétendre). Pourtant, quelque chose s’est brisé dès le milieu des années 70 au sein de cette brillante contrée : Citroën a délaissé ce gigantesque marché, laissant des dizaines de milliers de clients orphelins. Le Watergate ? De la roupie de sansonnet à côté de ce drame. Pris d’un élan d’humanisme, un néerlandais décida de ne pas abandonner les américains à leur triste sort et importa des Citroën au nez et à la barbe des Chevrons. Je vous invite à découvrir CX Automotive.
L’argent fait-il le bonheur ? Assurément, répondrai-je aux mal-pensants prétendant niaisement que l’amour ou la reconnaissance des siens prévaudraient. Mais que vaut l’argent s’il ne permet pas de s’offrir une routière à suspension hydraulique ? Peu de choses, convenons-en. Dès lors, un binôme américano-néerlandais s’est mis en tête de prendre la suite d’Automobiles Citroën sur le sol Nord-américain en commercialisant la CX. Pour ce faire, il leur a « suffi » de faire homologuer la voiture pour le Nouveau Monde i.e. faire plein de modifications pour compenser une législation française un brin faiblarde sur bien des aspects en comparaison. L’autre obstacle fut la maison Citroën en personne qui fit tout pour mettre des bâtons dans les roues de cette entreprise. A commencer par refuser que la voiture soit vendue sous le nom de Citroën et en n’assurant aucun support sur les véhicules commercialisés (remarquez, le SAV des marques françaises à l’époque étant ce qu’il était, ça ne devait pas changer grand-chose).
Fondée au début de la décennie 80 par André Pol et Malcolm Langman, CX Automobiles Europe BV devient CX Automotive dans la seconde moitié des années 80.Les véhicules étaient renommés CXA CX (notez la folle originalité du nom de la marque), devant s’affranchir de tout badge Citroën. La gamme se composait de diverses versions telles les CX 25, GTI, GTI Turbo, Prestige et Wagon. Sur la base de véhicules aux spécifications belges ou néerlandaises, les CXA se voyaient modifiées de fond en comble à Oisterwijk, aux Pays-Bas tandis que le siège de CXA était situé dans l’évocatrice bourgade de Middlesex, New Jersey. Les voitures se voyaient dotées de plusieurs renforts de structure afin de satisfaire aux exigences de la NHTSA, l’éclairage était également modifié (side markers et sealed beams) afin d’être homologué. Dans le même ordre d’idées, la dépollution du véhicule était retravaillée. Afin de bien marquer le positionnement haut de gamme du produit, les CX sauce gouda-barbecue se voyaient dotées d’aménagements intérieur luxueux (cuir, bois, TOE, installation audio plus soignée). L’atelier en profitait pour tenter d’améliorer la finition passablement dilettante de la voiture de base, il est bon de rappeler que Citroën aura attendu la Xantia de 1993 pour progresser en qualité et fiabilité.
Commercialisées à des tarifs prohibitifs du fait, notamment, des volumes et du mode de reconstruction de la voiture, CXA a prouvé que tout argenté qu’il soit, un citroëniste sait se montrer aussi déraisonnable que le produit acquis se révèle excentrique. La tarification allait de 30 000 à 45 000 $ de l’époque, un montant somme toute fort élevé. C’est la somme requise pour que nos amis américains puissent s’affranchir de ces voitures atteintes d’une normalité péremptoire en se portant acquéreurs d’une CX. Le bonheur hydraulique a un prix. Et certains ont même été prêts à le payer… Peut-on être citroëniste et sain d’esprit ? La question devrait plutôt être : peut-on être sain d’esprit en cautionnant un véhicule dépourvu de suspension hydraulique ? Vous en conviendrez naturellement. Rouler en CXA est finalement une démarche ô combien raisonnable de ce point de vue.
Le plus étonnant n’est pas que CXA ait jugé opportun de commercialiser une voiture que son constructeur ne souhaitait ni vendre ni soutenir sur un marché, c’est que l’entreprise américaine n’ait pas été un cas isolé : Yareb Hydraulics et CINA avaient également importé leur lot de CX dans les années 80. L’histoire de CXA ne s’arrête d’ailleurs pas là (mais pas loin, il faut bien l’avouer). Après avoir étudié la possibilité d’y commercialiser la BX GTI dont le moteur était déjà compatible avec les normes américaines du fait de la 405 MI16 fédéralisée, CXA se lance dans l’homologation de la XM, désormais transformée aux USA. Une poignée d’exemplaires (je ne saurais dire combien) lourdement modifiés trouvera preneur avant l’arrêt des hostilités en 1997, faisant de la XM le dernier haut de gamme français à avoir posé ses roues sur le sol américain.
Vous trouverez ci-dessous un essai de la CXA XM, sur ce lien un scan d’article à propos de CXA, quant à moi, je vous laisse avec ce curieux road trip de Car&Driver : « retour à l’envoyeur » ou comment essayer de ramener une CX en France… Par la route.
Via Car&Driver, Forum-Auto, Citroën-ca.com