Nouveau départ pour Renault qui lors du Mondial de Paris 2012 nous présente sa Clio IV, en version berline, Estate et RS et sa déclinaison électrique, Zoé, deux véhicules porteurs de la nouvelle identité créée par Laurens Van Den Acker et des nouveaux espoirs du Losange. L’occasion également pour notre équipe de rencontrer le numéro 2 du groupe, Carlos TAVARES lors d’une courte mais intense table ronde en présence de quelques autres rédacteurs du web automobile. Entre passé assumé et futur résolument ambitieux le dirigeant s’est livré au jeu des questions-réponses sans se défiler avec un discours marketing officiel mais aussi les remarques personnelles d’un authentique passionné d’automobile…
Carlos TAVARES : Non, pas vraiment. Le distingo entre 3 et 5 portes n’apparait que lorsque dans la version 5 portes vous avez une perte de compacité ou de mobilité perçue ce qui, je crois, n’est pas le cas de la Clio IV qui a un design tellement dynamique, sculptural et équilibré que cela rend finalement la visibilité, ce qu’on pourrait appeler la déformation du 5 portes par rapport au 3, invisible. Donc non, je ne crois pas que ceci soit un problème. Par ailleurs nous connaissons tous des histoires de voitures sportives de grande qualité qui étaient soit des tricorps soit des 5 portes or ici la voiture est tellement sculpturale, bien équilibrée et dynamique, pour ne pas dire sensuelle, que la question ne se pose même pas, elle est naturellement belle et naturellement sportive.
Après il y a bien entendu d’autres considérations sur « faut-il dépenser de l’argent sur une version où notre rentabilité est moins bonne ? » car quand on a une version 3 portes c’est ce qui nous tire vers le bas sur les prix d’accroche, et nous sommes très attachés à ce que la marque Renault soit revalorisée. Aujourd’hui, notamment en Europe occidentale, nous vendons nos voitures à des tarifs qui ne sont pas acceptables compte tenu de leur valeur et de leur contenu technologique, on fait trop de discount notamment par rapport à des marques comme VW par exemple. Aujourd’hui, quand vous regardez les prix de transaction corrigés des écarts d’équipement, donc comparez des voitures comparables en contenu et que vous regardez les prix payés par les clients après rabais, nous nous retrouvons 10 % moins cher que VW, je trouve ça insupportable.
Je ne dis pas qu’on peut annuler cet écart en l’espace de quelques mois voire même de quelques années mais je pense que ça ne se justifie pas en terme de contenu et de performance des véhicules. La Clio IV est un véhicule qui a des motorisations extrêmement intéressantes avec une version à 83g. de CO2, 3,2l au 100, 5 étoiles EuroNCAP, une bonne habitabilité une bonne qualité perçue, on a un design extrêmement sensuel émotionnel et attractif, il faut qu’à un moment donné on trouve la confiance, sans tomber dans l’arrogance, pour vendre nos voitures à leur juste prix. Dans un tel contexte une version 3 portes nous tire vers le bas.
B. : Pourquoi au contraire une version 3 portes en étant un produit plus radical, plus désirable ne serait pas justement un bon produit image pour attirer les clients ?
CT : Le problème c’est qu’une trois portes a un contenu technique qui est relativement proche de celui d’une 5 portes. La variation de coût n’est pas très grande. Par contre le client s’attend à ce que le prix le soit puisque ce n’est qu’une 3 portes, ce qui signifie dans son esprit moins habitable, moins pratique, etc. Cette différence trop faible au niveau du coût est handicapante pour nous. Maintenant je pense aussi que Clio IV, compte tenu du design qu’elle a se suffit à elle-même en termes de sportivité et en termes d’attractivité donc une trois portes ne se justifiait pas
B. : Vous venez d’évoquer le problème des prix de vente, d’où vient cette différence ?
CT : La question des prix est surtout le résultat d’une certaine façon d’appréhender la marque au cours des dernières décennies, ce n’est pas quelque chose de récent mais c’est aussi et surtout le résultat de la pression commerciale qui existe sur la société.
B. : Alors comment faire pour redonner au client la sensation que le prix qui lui est proposé n’est pas « trop élevé » ?
CT : Cela passe par plusieurs facteurs. Tout d’abord nous devons recommuniquer aux clients la valeur de nos produits. Pour nous qui sommes passionnés cela semble une évidence mais en fait, dans un gros paquebot comme Renault, c’est compliqué car il faut entrainer l’ensemble des acteurs de l’entreprise, de la fabrication jusqu’aux vendeurs dans les showrooms, pour que cette confiance, cette passion et cet enthousiasme puissent être communiqués et transpirer à l’extérieur de l’entreprise.
Il y a quelques jours l’un de mes collaborateurs me faisait une remarque sur Clio IV en me disant « vous ne pensez pas que les gens vont dire qu’elle est trop chère ? ». Je lui ai tenu le même propos : nous avons une voiture qui est extrêmement séduisante, des moteurs et des transmissions qui sont à la pointe de la technologie de l’industrie automobile, quand vous regardez le 3 cylindres turbo essence et ce que nous faisons avec les diesels à 83g. de CO2, nous sommes tout à fait à la pointe et nous n’avons pas honte de le dire. Nos moteurs sont meilleurs que ceux de nos concurrents et en particulier meilleurs que ceux de VW. Nous avons un niveau de sécurité de 5 étoiles euro NCAP, le niveau maximal, une qualité perçue qui s’est considérablement améliorée, comme on peut le constater notamment à l’intérieur et nous proposons en plus un système R-Link qui va faire beaucoup d’envieux. Donc, quand on accumule une liste aussi impressionnante de caractéristiques qui valorisent un tel produit il faut être capable aussi d’expliquer au client que ça c’est la valeur du produit…
Evidemment il y a des voitures moins chères. Si vous voulez acheter une Sandero à 8000 € vous pouvez, si vous voulez acheter une Logan à 7700 €, vous pouvez, il n’y a pas de problème. Mais là, vous achetez une Clio IV qui est une voiture moderne, dynamique, trendy avec tous les équipements nécessaires, donc il y a forcément une valeur qui est associée à cela.
Maintenant c’est un sujet très difficile parce qu’il faut irriguer toute l’entreprise il faut donner de la confiance sans tomber dans l’arrogance et il faut ensuite être capable de communiquer au client cette force du produit. Ca ne se fera qu’étape par étape et grâce au renouvellement de la gamme. Clio IV et Zoé marquent un jalon très important dans l’histoire de l’entreprise, c’est un jalon où l’on recentre l’entreprise sur le produit. Nous avons eu quelques égarements ces dernières années, là, on va se recentrer sur la force du produit et créer de la cohérence de marque à l’intérieur de la gamme.
Vous savez que jusqu’à présent nous avions des voitures qui partaient un peu dans tous les sens au niveau design. Alors certes, elles avaient toutes un logo mais le problème était que vous étiez capable d’identifier les voitures par le nom du modèle avant d’en identifier la marque. Ce que nous souhaitons c’est exactement l’inverse. Nous voulons par une signature stylistique cohérente donner de la force à la marque ce qui permettra d’identifier immédiatement une Renault et ensuite seulement d’identifier le modèle. Cela veut dire par exemple qu’au niveau des faces avant vous aller plus rapidement reconnaître une Renault qu’avant. Cette direction va être renforcée et nous espérons ainsi contribuer à la valorisation de la marque pour que les gens soient fiers de dire qu’ils ont acheté une Renault avant de nous dire qu’ils ont acheté une Mégane, une Clio ou une Laguna.
C’est un travail de fond, qui prendra de nombreuses années. On y va étape par étape. On a fait une première étape, on a dépassé Citroën sur le plan des prix-transactions, on est en train de rattraper Peugeot, on va dépasser Peugeot et ensuite on s’attaquera à VW mais, bien entendu, ce n’est pas un sujet qui va se traiter en deux ans.
B. : Mais pourquoi appliquer cette recette si tardivement alors qu’elle existe chez d’autres depuis déjà plus de dix ans ? D’autant qu’il y a eu des erreurs assez grossières, comment par exemple expliquer la perturbation visuelle de la marque liée à l’insertion maladroite de Latitude dans la gamme, était-ce une nécessité financière absolue ?
CT : Non, je ne crois pas que c’était un choix financier… Vous savez dans toute activité industrielle et commerciale, il est toujours facile, surtout pour quelqu’un qui débarque, de regarder le passé et de dire qu’on a commis des erreurs. Donc oui, il y a eu des choses qui n’ont pas parfaitement fonctionné. On peut dire par exemple que la Vel Satis était une voiture exceptionnelle avec une excellente habitabilité et un châssis remarquable, mais elle avait un design baroque… On pourrait aussi parler de Latitude et de ce qu’on aurait pu faire pour l’améliorer, ça peut être un sujet en soi.
Mais ce que je préfère avec l’équipe c’est d’abord que l’on se recentre sur le produit, que l’on se dise que Renault est de retour au travers d’un design plus sensuel, plus sculptural et plus émotionnel, et Clio IV en est une très belle illustration. Il faut faire en sorte qu’au travers d’une cohérence renforcée du traitement du design de la gamme, la valeur de la marque ressorte également renforcée. Nous avons forcément fait dans le passé des choses qui étaient moins bien, mais nous avons également fait des choses très bien. Il faut apprendre de nos erreurs et être capable à chaque fois d’avoir un effet cliquet qui permet à l’entreprise de s’améliorer step by step.
C’est un gros bateau, il y a 126 000 personnes dans l’entreprise, donc les choses ne se décrètent pas dans mon bureau, elles se managent au quotidien dans les réunions produits, les réunions designs, les réunions avec les financiers, et il faut toujours ouvrir les portes qui permettent à ceci de se réaliser.
En reprenant l’exemple intéressant de Latitude, on aurait pu faire avec elle sans doute un travail plus cohérent d’alignement sur le design de la marque. Maintenant il reste aussi que sur ce point des voitures haut de gamme nous nous heurtons à un élément délicat : il faut apprendre, ou plutôt réapprendre à notre réseau à vendre des voitures à des prix élevés et ce n’est pas le moindre des challenges…
B. : Vous parliez d’arrogance chez les autres constructeurs, ne serait-ce pas justement ce qui leur a permis de vendre aussi cher leurs produits ?
CT : Arrogance je ne sais pas, mais sans doute confiance, même si la limite entre les deux est souvent assez ténue. Mais vous savez, ce qui me frappe, en particulier moi qui suit rentré de ces années d’expatriation au Japon et aux Etats-Unis, c’est que quand je reviens chez Renault 7 ans après je vois bien là où on a fait des progrès absolument remarquables. Je les vois car je connais le point de référence qui était en 2004 quand je suis parti. Je vois par exemple un progrès spectaculaire en qualité, ce qui est confirmé par les consommateurs allemands au travers des enquêtes ADAC qui disent que nos voitures sont plus fiables que les voitures allemandes et il y a de nombreux segments où c’est le cas. Je vois les résultats que nous obtenons en F1 avec des performances exceptionnelles. Je vois que nous avons un programme des réductions des émissions de CO2 qui utilise bon nombre des innovations que nous avons sur les moteurs de F1.
Mais quand je suis arrivé on avait à peine l’intention d’en parler. Je pense que nous avions une sorte de censure à l’intérieur de l’entreprise où, finalement, les gens ne se sentaient pas capables ou fiers de parler de leurs réalisations et de leurs succès et il ne me parait pas pertinent de se censurer sur ce qui est bien.
Donc il faut continuer à donner confiance, il faut continuer à communiquer sur ce que nous faisons de bien sans tomber dans l’arrogance car toutes les grandes entreprises, et la notre ne fait pas exception, peuvent commettre des erreurs.
B. : Alors justement, parlons des choses bien à venir. Où en est le projet Alpine ?
CT : Je crois que depuis septembre 2011 j’ai dit déjà en tant que passionné d’automobile et de sport automobile qu’Alpine c’est un joyau du groupe automobile Renault et qu’on ne pouvait pas passer à côté de l’utilisation de ce joyau dont l’héritage et l’histoire sont exceptionnels. D’ailleurs, je remercie un de mes amis qui a eu l’intelligence de m’offrir quelques bouquins sur l’histoire d’Alpine qui m’ont beaucoup inspiré.
Donc c’est clair que le groupe automobile Renault a besoin d’une marque de sport pour la juxtaposer aux autres marques de l’entreprise, et si il doit y avoir une marque de sport au sein du groupe, ce ne peut être qu’Alpine parce qu’on va pouvoir s’appuyer sur cet historique, sur cet héritage qui donne beaucoup de valeur à la marque.
On a donc commencé à travailler à partir de là en se disant également qu’il fallait bien comprendre pourquoi les tentatives précédentes de renaissance de la marque avaient toutes échoué. Nous avons étudié ces cas et la conclusion qui est ressortie c’est, qu’à chaque fois, le business plan ne fonctionnait pas. Pourquoi ? Parce que si vous voulez faire une nouvelle Alpine, une Berlinette du XXIème siècle, il faut laisser le talent des ingénieurs et des concepteurs s’exprimer. Il va de soi que l’on met une certaine pression pour que les tickets d’entrée soient contenus, pour que les coûts soient performants mais il y a une limite au delà de laquelle vous ne pouvez pas aller parce que si vous allez trop loin dans la réduction du ticket d’entrée de la voiture vous empêchez le talent de l’entreprise de faire une super bagnole. Et si vous les empêchez de le faire parce que vous ne leur donnez pas les moyens économiques, ça ne sert à rien de relancer la marque avec une bagnole qui va être à moitié attractive, ce serait du gâchis.
Nous sommes donc arrivés à la conclusion que pour que ça puisse se produire il fallait qu’on ait un partenaire avec qui on pouvait partager le ticket d’entrée, et ainsi faire en sorte que le business plan soit facilité Vous n’avez plus que la moitié de l’argent à mettre sur la table, et vous pouvez alors donner aux ingénieurs la possibilité de faire une sacré voiture…
B. : Mais pour l’instant vous n’avez rien dit sur ce partenaire…
CT : Non, pour la simple raison que quand je donnerai le nom de ce partenaire il sera assis à côté de moi et ce serait inconvenant d’en parler sans qu’il soit dans la salle.
Nous avons donc commencé à travailler là-dessus fin 2011, début 2012. Je suis allé à la rencontre de ce partenaire potentiel qui s’est montré immédiatement intéressé par le projet, nous avons travaillé avec lui, nous avons évidemment fait des modifications pour que l’intérêt de chacun soit pris en compte et nous avons bien avancé. Nous sommes maintenant dans un timing qui correspond à ce que j’avais affirmé, c’est-à-dire que nous prendrions une décision en 2012. Et ce que je peux dire de nouveau aujourd’hui c’est que je me considère en avance par rapport à mon timing. Donc les choses avancent bien mais à partir de là je ne peux pas vous en dire plus si ce n’est que je n’ai pas trouvé jusque ici d’obstacles insurmontables. Les recherches auprès des fournisseurs n’ont par contre pas encore été lancées car il faut tout d’abord qu’on annonce officiellement la renaissance de la marque.
B. : En même temps certains n’hésitent pas à penser que le concept A110-50 n’est pas présent au salon pour ne pas faire d’ombre à la Clio et pourtant la rivale la plus dangereuse se trouve sur le stand d’à côté chez Dacia.
CT : Ce sont deux sujets très différents. Je ne crois pas qu’on puisse critiquer Renault pour sa timidité. Quand j’ai pris le risque d’aller rouler quelques tours sur le circuit de Monaco avec le concept car alors que rien n’avait été décidé c’était un risque considérable, on aurait pu se planter, les choses auraient pu partir de travers.
Je ne crois pas qu’on puisse dire que Renault n’a pas fait preuve d’audace et d’anticipation sur la visibilité parce qu’on a déjà montré la voiture à de nombreuses reprises et qu’on a décidé qu’ici on mettait l’accent sur la Clio IV qui est un enjeu industriel pour l’entreprise. Cela n’empêche personne de se rendre sur Internet pour consulter toutes les vidéos faites sur le concept car, et franchement, pour nous, c’est toujours une belle opportunité de le montrer. On l’a montré à Monaco, à Goodwood, on en est très fier mais je crois aussi qu’il ne faut pas tout diluer, il y a des évènements pour tout. Aujourd’hui on est réuni pour marquer le retour de Renault sur le produit, le recentrage de l’entreprise sur l’attractivité du produit et les jalons qui marquent ce recentrage s’appellent Clio IV et Zoé donc on est centré la dessus. En même temps on renouvelle le cœur de la famille Logan qui a fait le succès de la marque Dacia avec trois produits à un prix qui laisse nos compétiteurs blêmes puisque quand ils voient la Logan tricorps à 7700 € ils se retrouvent dans un état de stress important, et c’est normal.
On a donc deux évènements absolument majeurs, le jour où on va se réunir pour parler d’Alpine, on ne présentera que Alpine. Je crois qu’il faut simplement gérer notre communication avec un bon centrage et une bonne concentration sur un nombre limité de sujets sinon tout se dilue.
[NDLR : A noter que le concept A110-50 est bien présent au Mondial, il se trouve Hall 8 dans l’exposition consacrée à la publicité automobile, la précision ayant été faite par un collaborateur de Carlos TAVARES à l’issu de cette réponse]B. : Vous présentez à Paris Clio IV et sa version RS, par ailleurs vous avez depuis quelques années utilisé le nom de Gordini et créé une gamme qui est certes bien sympathique au niveau des couleurs et du décor mais qui a laissé les puristes assez largement aigris. Alors y aura-t-il une Clio IV RS Gordini et si oui sera-t-elle traitée de la même manière qu’actuellement ?
CT : Oui et non. Oui à la première question et non à la deuxième.
J’ai eu pour ma part le débat en interne à l’entreprise et il faut reconnaitre que les gens commençaient à se prendre les pieds dans le tapis entre le RS, l’Alpine, le Gordini etc. Donc j’ai essayé d’apporter ma vision des choses. Vous trouverez dans l’entreprise des gens qui ne sont pas encore alignés sur cette vision puisque c’est un sujet que nous n’avons pas encore suffisamment débattu. Ma vision est la suivante : il ne faut pas confondre griffe et marque.
La vision du portefeuille des marques de Renault c’est que nous devons en avoir 4 :
– Il y a la marque d’achat malin qui est Dacia. C’est la marque post consumériste c’est-à-dire que ce sont des gens qui ont vu toute la débauche technologique de l’industrie automobile, ils ont vu les modes d’emploi épais comme ça et ils ont constaté que, ayant une voiture avec plein de plumes ils n’en utilisaient finalement que le tiers. Ils se sont donc dit finalement pourquoi est-ce que je paierais pour les deux autres tiers des plumes alors que je ne les utilise pas. Le post consumérisme c’est une tendance d’un certain type de clientèle qui se dit finalement, moi, j’ai besoin d’une auto qui soit économe, qui soit sûre, qui soit habitable et que je puisse utiliser tous les jours en toute quiétude parce qu’elle est fiable. Je ne sais pas si c’est une tendance lourde mais elle est réelle. On a d’ailleurs été très surpris par les acheteurs de Dacia car on s’attendait à ce qu’ils soient des gens avec de faibles revenus et ce n’est pas du tout vrai. Il y a beaucoup d’acheteurs de Dacia qui ont des revenus tout à fait conséquents mais qui achètent Dacia parce qu’ils se disent pourquoi payer plus pour des fonctionnalités ou des innovations technologiques que finalement je ne valorise pas.
– Nous avons ensuite Renault, qui est la marque dont la mission est, modèle par modèle de faire hésiter un client de VW. Un client de VW qui se dit je vais acheter une Polo il faut absolument qu’il se dise « tiens il faut quand même que j’aille jeter un coup d’œil à Clio IV avant de confirmer mon choix de Polo », idem pour le client Golf avec Mégane, etc. Et là il ne s’agit pas d’un combat d’ego entre patrons d’entreprise automobile, je ne cherche pas à être aussi gros que VW, je m’en fous, mais je veux que le client qui a acheté une VW hésite entre cette VW et la voiture équivalente de chez Renault simplement parce que cette dernière lui a tapé dans l’œil et présente une attractivité. Donc c’est un combat sur l’attractivité du produit et c’est le rôle de Renault que de livrer ce combat. Nous avons par ailleurs une griffe sportive de la marque Renault qui s’appelle RS et je vous dirai ensuite ou je mets Gordini dans tout ça.
– Nous avons la marque de voiture de sport. Une marque à part entière, ce n’est pas une griffe c’est une marque, elle s’appelle Alpine et ce sont des voitures de sport au même titre que Bugatti n’est pas VW.
– Enfin vous aurez un jour, peut-être dans 20 ou 25 ans (c’est l’ordre de grandeur, il a fallu 30 ans à Audi), une marque premium qui probablement s’appellera Initiale.
Ces quatre marques c’est donc la vision que nous avons. Après, à l’intérieur de ceci je reprends le sujet Renault.
Nous avons les dérivés sportifs de Renault avec RS, nous avons la crédibilité, on a la F1, on a le sport, et de la même façon qu’à un moment donné Mercedes a fait du AMG et bien nous on fait du RS et je vais positionner Gordini comme étant la déclinaison piste des véhicules RS. Autrement dit, si vous voulez une Clio RS Cup, la Clio RS Cup s’appellera Clio RS Gordini. Maintenant vous allez me prendre à contrepied sur ce point parce qu’il y a des gens dans l’entreprise qui ne vont pas être d’accord, d’autres qui ne vont peut-être pas être alignés et je vais devoir dépenser une certaine énergie pour convaincre tout le monde. Mais je pense que la façon la plus simple et la plus crédible, compte tenu de l’histoire de Gordini, c’est de considérer que Gordini est une déclinaison piste des véhicules RS que les clients utiliseront dans le cadre des journées passions sur les circuits…
Entretien réalisé le 28/09/2012 par Eddy P. en collaboration avec le garage des blogs, autofans.be et Yahoo auto.
Un grand merci à Renault pour leur accueil chaleureux et à Carlos Tavarès pour sa disponibilité, son enthousiasme et son franc parler.
Crédit photos : Eddy P.