Essai : pourquoi je surkiffe la Volvo V90 T8 !

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Question auto, mes goûts perso m’orienteraient plutôt vers une Morgan Roadster Plus 8 50th, voire une Morgan Three Wheeler, à l’occasion, histoire d’aller chercher le pain. Donc le break hybride rechargeable avec en plus un quatre cylindres dedans, c’est pas trop mon truc. Mais il faut se méfier des a priori…

Quatre mètres quatre-vingt-treize centimètres de long. Deux mille quarante-deux kilos (à vide). Mille neuf cent soixante-neuf centimètre cubes (et quatre cylindres – mais deux turbos, ok). Et deux moteurs, aussi, dont un électrique.

Ah…

Il n’empêche : si je voulais gagner au Loto, je mettrais tout sauf ces numéros de la loose-automobile. Bonjour le tank.

Enfin, ça, c’est ce que je pensais. Car cette Volvo V90 T8 a été mise à rude épreuve : une semaine d’essai, du quotidien dans Paris et ses environs, et une virée en Alsace où elle a servi à la logistique d’un reportage de moto ancienne. Et pas besoin de travailler la fonctionnalité du coffre : avec 560 litres, sièges arrière en place, casques, blousons, sac photo et éclairages additionnels, tout cela tient en place.

Et c’est là que la première révélation apparaît : « c’est bon du premier coup », me balance l’artiste lors de la séance de travelling (travelling : un tiers individu conduit l’auto, le photographe est assis dans le coffre et votre serviteur est à moto, à environ 20 cm de l’auto, il ne voit rien d’autre qu’un hayon ouvert et un gros Canon qui semble cibler sa truffe. Autant dire qu’au premier coup de frein appuyé, c’est Roc Eclerc, la franchise des incinérations heureuses, qui prend le relais).

N’empêche. C’est bon du premier coup. Entendez par là que malgré les roues de 20 pouces et le bitume un rien chiffonné, le David Hamilton (!) du bicylindre 4-temps a tout mis dans la boîte en trente secondes. C’est vrai que l’artiste a un vrai talent pour les travellings et les filés, mais là, c’est la première fois que je me contente d’un seul passage. Et c’est super net. Démonstration :

Ça date de 1971. Et c’est précis, pointu, sharp (enfin, la photo, parce que la Guzzi V7 Special, entre les pneus d’époque, les freins à tambour et la boîte inversée à droite, ça demande quand même un peu de boulot).

En tous cas : merci à la suspension pneumatique qui fait de cette Volvo un véritable tapis volant, sans oublier toutefois le maintien de caisse dans les grandes courbes. Dans les virages serrés abordés le couteau entre les dents, c’est une autre histoire ; mais c’est pas une GTI non plus.

Top confort

Première révélation ? Non. En réalité, elle a déjà démontré ses qualités d’auto green, en parvenant à faire plus que le trajet entre le parc de Volvo France et mon domicile de Vincennes, puis à aller récupérer le sus-mentionné photographe, et tout cela rien que sur les batteries. Résultat ? Une grosse quarantaine de  kilomètres revendiqués, 39 réalisés ! Pas si mal, surtout si je me remémore mon dernier essai d’une auto hybride rechargeable, la Mercedes GLC 350e qui ne faisait que 14 kilomètres sur les batteries et qui servait surtout d’alibi écologique dans le grand jeu rigolo de la pêche au bonus.

Dans le monde de « l’éco-mobilité », la Volvo ne ment pas, contrairement à certaines de ses concurrentes. Elle assume globalement ce à quoi elle prétend, en plus dans un silence (normal !) mais surtout une réactivité de bon aloi. En gros, si votre bureau est à 40 km du domicile, et si vous avez à la fois la possibilité de recharger à la maison et au boulot, on n’est pas loin ici de l’auto idéale qui ne vous coûtera que le crédit pendant la semaine (et on a tendance à penser que si vous allez au bout de l’idée, vous la mettrez au nom de votre boîte pour gagner en plus sur la TVS).

Mais que ces mesquineries comptables ne vous privent pas de réellement utiliser cette V90 T8. D’abord parce que la consommation reste assez contenue en toutes circonstances. Même si les batteries sont supposément à plat, il reste toujours un peu d’énergie résiduelle dans l’auto pour vous balancer un bon coup de boost le cas échéant, tandis que la fonction roue libre optimise les faux plats. L’un dans l’autre, la consommation moyenne après un (très) long parcours autoroutier ressort à 8,7 l/100, ce qui est vraiment raisonnable pour un engin de ce poids, de ce gabarit et de cette cylindrée.

Et ce d’autant que les (centaines de) kilomètres défilent dans la plus grande décontraction : on l’a dit, le confort de suspensions est juste remarquable et je dois, à mon grand regret, ouvrir la valise des superlatifs, pour vous parler de celui des sièges, qui est tout simplement exceptionnel. Et ce n’est pas tout : le cuir épais, le petit drapeau suédois sur la bordure, le levier de sélection de vitesse en pur cristal, la sono incroyable où l’on entend Merry Clayton s’époumoner pour donner aux Stones toute l’épaisseur (voire : toute la substance) de Gimme Shelter (et, en toute franchise, cette qualité de son vaut vraiment les 3400 € du pack premium Bowers & Wilkins demandés ! – pour l’anecdote, c’est la seule sono dans une auto avec laquelle j’ai réussi à impressionner mes potes qui sont, dans la vraie vie, ingénieurs du son, spécialistes de concerts au Stade de France et de grandes radios nationales…). Bref, vous avez 3400 balles à craquer : n’hésitez plus !

Safety first

Chez Volvo, la sécurité, c’est important : on sait que la marque sino-suédoise ne tolérera plus une seule fatalité au sein de ses véhicules à l’horizon et si l’intention est louable, l’enfer est cependant pavé aussi de ces bonnes intentions. De fait, la Volvo va peut être un peu loin, en étant capable de vous planter un coup de frein dans un pif-paf abordé avec un peu d’enthousiasme, quand elle considère que la voiture que l’on va croiser est en fait sur votre voie, mais non. Alors, certes, c’est facile à dire planqué derrière son clavier, mais il faut imaginer la puissance des algorithmes qui doivent faire la part des choses et que c’est tout sauf simple. Néanmoins, Volvo fait du zèle. Exemple : quelques manœuvres sur un parking, toujours pour des séances de photos de moto, avec le conducteur pas attaché (bouh, c’est mal !). Eh bien au bout d’un moment, la Volvo refuse de continuer, se lance dans une surenchère de bips et d’alertes, et reste sur place. Elle veut votre bien, cette voiture. Tout comme au retour, sous un orage absolument dantesque où, tout en louant la tenue de route impeccable et l’excellent grip des roues de 20 pouces sous la pluie, j’ai eu l’impression que la voiture « sentait » les éléments et refusait de délivrer toute sa puissance. Étonnant.

Ce qui ne retire rien à la forme d’aboutissement que constitue cette auto, et qui fait que je la kiffe vraiment. Par la qualité de finition, des matériaux, le confort des sièges, l’absolu de la sono, elle mérite sans aucun doute sa place dans l’univers des marques et de la triplette allemande qui se veut plus « premium ». En même temps, son design est, je trouve, une alliance vraiment réussie de classicisme et d’élégance, avec une touche de sportivité. Oui, je sais, je viens d’ouvrir à nouveau la boîte des superlatifs, mais faut reconnaître que la Morgan Three Wheeler, 24 h sur 24, c’est un peu rude. Du coup, entre deux moments d’adrénaline pure, je me ferais bien choyer par cette V90 T8, son silence la semaine et son cocon protecteur le week-end. Certes, il faudra aussi, tout comme pour les Morgan, y mettre le prix : les V90 commencent à 45350 €, la T8 à 71 150 € et mon modèle d’essai, une Inscription Luxe, comportait quelques options : le blanc cristal métallisé à 1500 €, la sono premium à 3400 €, la fameuse suspension pneumatique qui plait tant au photographe, ainsi qu’au reste de l’équipage, à 1980 €, sans oublier les jantes de 20 pouces à 2250 €. Résultat : 94 940 €. Cela reste moitié moins cher que mon garage idéal composé des deux Morgan avec quelques options…

Crédit photos : Gabriel Lecouvreur

 

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