Lors de sa présentation en 1989, la 300 ZX de seconde génération impressionne par ses lignes plutôt futuristes, à l’intérieur comme à l’extérieur et ses performances surprenantes. Plus qu’une véritable sportive, la fairlady Z a pris en embonpoint jusqu’à afficher 1625 kg à vide avec cette nouvelle génération et est devenue au fil des années un coupé luxueux et performant. Seule la version Coupé 2+2 biturbo sera distribuée sous nos latitudes et à en croire les réactions de certains de mes amis lorsque je l’ai eue à l’essai, elle a laissé un sacré souvenir dans la tête des amateurs d’engins exotiques de l’époque. Retour 3 ans en arrière, lorsque le double turbo servait encore la performance plutôt que l’écologie et le downsizing. Retour 30 ans en arrière.
Bien dans son temps
Le début des années 90 constitue un véritable tournant dans l’industrie automobile japonaise avec l’arrivée sur le marché de voitures toutes devenues emblématiques et surtout, particulièrement innovantes pour leur époque ! On retrouve ainsi chez Honda la fameuse NSX dès 1990, première du nom, développée en collaboration avec Ayrton Senna pour aller marcher sur les plates-bandes de Ferrari, une première ! Chez Mazda, c’est la non moins étonnante RX-7 qui fait son arrivée la même année avec son fabuleux moteur rotatif et sa sonorité si particulière. Mitsubishi surprend son monde en lançant la formidable 3000 GT et ses 4 roues motrices et directrices, une petite révolution dans le monde des GT. Finalement, c’est notre 300 ZX qui fait pâle figure à côté de telles stars mais ne manque pourtant pas d’impressionner la presse de l’époque qui vante son équipement digne des plus grandes marques allemandes. Tous ces monstres sacrés ont un point en commun, leur puissance, ou du moins sur le papier. Ce fameux Gentlemen’s agreement de 1989 interdisait aux constructeurs automobiles japonais de produire une voiture dépassant les 280 ch. Pourtant, pas une des voitures que je viens de vous citer ne respectait cette règle, la course à la puissance et aux performances se faisait dans l’ombre, et cela a sans doute grandement participé à la naissance du mythe de ces autos.
La 300 ZX de deuxième génération, nom de code Z32, n’a plus grand chose en commun avec la Fairlday Z originelle qui fera d’ailleurs l’objet du prochain et dernier article de la saga Z. La Z32 reprend le profil de la 300 ZX Z31, elle même inspirée de la 280 ZX auparavant, adoucit les angles, abandonne les phares escamotables et opte pour des éléments de design particulièrement modernes tels que l’aileron intégré à la malle arrière ou encore le bandeau lumineux arrière intégrant les optiques. Les surfaces vitrées sont généreuses, surtout lorsque l’on prend en compte le T-Top, ce fameux hard-top vitré escamotable en deux parties particulièrement astucieux mais qui prend une sacrée place dans le coffre une fois démonté. Après un rapide tour du propriétaire, on peine à croire que le dessin date d’il y a maintenant plus de 30 ans. Une chose est sûre, la 300 ZX vieillit plutôt bien (son dessin tout du moins).
Côté personnalisation, on avait déjà le choix à l’époque entre pas moins de 22 teintes disponibles au catalogue entre 1990 et 1996, même si je ne suis pas sûr que chacune d’entre elles ait été proposée dans l’Hexagone. Notre exemplaire joue dans la discrétion avec son gris anthracite délicatement nommé Charcoal Pearl disponible sur les millésimes 1990 et 1991 (la notre date de 1991). Discrétion qui aura participé à ma grande surprise à passer plutôt inaperçue au milieu du trafic en région parisienne.
Classe Affaires
À l’intérieur, c’est une petite révolution. L’habitacle de la 300 ZX de 2ème génération rompt avec le dessin parfaitement rectiligne de celui de sa devancière et opte pour des longues courbes et le plus d’arrondis possibles évoquant quelque peu le bio design. Ce qui surprend, ce sont les équipements ! Fermeture centralisée, sièges et rétroviseurs extérieurs à réglages électriques, climatisation automatique (qui fonctionne !), régulateur de vitesse avec rappels des fonctionnalités au volant (qui fonctionne aussi !!), lecteur CD, lecteur cassettes, le tout dès 1989, vous imaginez ?! Le plus impressionnant reste la facilité des équipements et le vieillissement des matières. Tout fonctionne, aucun bouton cassé, aucune touche qui craque, aucune décoloration accentuée du cuir ou du velours étendu un peu partout dans l’habitacle. C’est sérieux, c’est fiable, c’est bien construit, bref, c’est japonais.
La 300 ZX est une véritable GT, en témoignent ces superbes sièges enveloppant dans lesquels on s’enfonce délicatement en s’installant à bord. Tout ça fleure bon les 90’s. La position de conduite serait idéale si je n’étais pas aussi grand. Assis très bas, le haut du volant malheureusement fixe me cache pourtant une partie des compteurs. Sans compter le facteur lisibilité, le relever aurait vraiment participé à parfaire l’ensemble, d’autant que le levier de vitesses d’avère lui parfaitement situé, juste assez haut pour une prise en main parfaite.
Sur long parcours avec le toit en place, c’est un véritable régal. La sonorité du moteur est discrète et la direction assistée d’une douceur incroyable donne l’impression en ville de conduire une citadine. On est très loin du comportement lourd et de cette impression d’encombrement à laquelle on pouvait s’attendre en prenant place à bord de ce coupé vieux de 30 ans ! Une cassette des Innocents en chantonnant “L’Autre Finistère” (le genre de son qui vous reste en tête pour la journée), une route dégagée en ce mois d’août et j’ai tout d’un coup envie de garder cette 300 ZX bien plus que Nissan ne me l’accorderait pour rouler vers une destination lointaine et remonter le temps. Il faut dire qu’en ces temps castrateurs de libertés, un rien vous donne envie de tout envoyer balader.
Twin Turbo !!
L’Europe n’aura eu le droit qu’à une seule déclinaison de la 300 ZX, en configuration 2+2 mais dotée du moteur le plus puissant. En lisant la fiche technique, je m’attendais à quelque chose de particulièrement violent à la conduite. Il faut dire qu’un V6 3.0 L greffé de deux Turbos qui développe pas moins de 280 ch et 373 Nm, ça a déjà de quoi décoiffer pour l’époque. Un 0 à 100 km/h en 6 secondes, c’est quelques dixièmes de mieux qu’une Corvette C4, et à peine une demi-seconde moins bien qu’une Ferrari 348 TB ou qu’une Porsche 992 Carrera. Sacrées références non ? Surtout lorsque l’on connait le poids à vide de l’engin, 1625 kg, rien que ça… Évidemment, la puissance est transmise par les roues arrières. Un peu moins de 30 ans et 69 000 kms après, qu’est ce que ça donne niveau comportement ? Eh bien c’est pas si mal que ça, je me suis même surpris à m’éclater plus que je n’aurais pensé au volant de cet ovni.
La poussée du V6 est franche mais pas brutale, plutôt continue au contraire, les deux Turbos font bien leur boulot pour pousser les rapports jusqu’à 7000 trs/min. L’étagement de la boîte 5 vitesses se révèle assez long, vous prenez sans soucis 110 km/h en deuxième. Le maniement du levier est très agréable, le verrouillage n’a rien perdu de sa superbe et le débattement reste plus mesuré que sa taille ne le laisserait penser. La sonorité quelconque ne participe pas vraiment au plaisir de conduite mais une fois le T-Top tombé et les vitres baissées, c’est un véritable sentiment de liberté qui vous envahit avec bien plus de turbulences que dans un cabriolet standard. Qu’importe, avec plus de 35 degrés affiché au thermomètre au moment où j’essaye de cette 300 ZX, tout rafraichissement est le bienvenu. La direction très (trop ?) assistée empêche de ressentir clairement ce qu’il se passe au niveau du train avant, les pneus dont je tairai l’âge également. Le freinage est un peu à la peine pour freiner presque 1.7 T avec moi au volant et le roulis pourrait en effrayer plus d’un qui souhaiterait bousculer ce vénérable coupé japonais. Pourtant et à ma grande surprise, la 300 ZX se révèle très joueuse et plutôt équilibrée lorsque l’on en vient à titiller le train arrière qui enroule généreusement au freinage et surtout, ne demande qu’à se décaler en sortie de virage. L’exercice parait assez naturel et je prends un malin plaisir à chercher les retranchements de cette 300 ZX. Il en ressort que la moindre dérive demande de la place et un peu de doigté, la démultiplication importante de la direction demandant tout de suite beaucoup d’angle de volant pour remettre notre japonaise dans le droit chemin.
Biturbo collector
Si la 300 ZX n’était et n’est toujours pas une voiture sensationnelle à conduire, elle n’en demeure pas moins une admirable GT au look et à la provenance exotiques, un véritable morceau d’histoire en plein milieu de la période la plus emblématique de l’industrie automobile japonaise. Disposant de tout le confort moderne dont on peut rêver navigation mise à part, ses performances dignes à l’époque des sportives les plus prestigieuses la relèguent aujourd’hui parmi le flot des compactes sportives dont les conducteurs pourraient toutefois s’avérer surpris de voir une telle “vieillerie” leur tenir tête. Un beau youngtimer à conserver pieusement mais à faire rouler, les voyages au long-court en plein été ne lui font pas peur ! La consommation elle aura en revanche de quoi vous effrayer, 18 L de moyenne sur cet essai. Le prix d’un saut dans le passé dont je me souviendrai longtemps.
Crédits Photos : Maurice Cernay