Match : pourquoi l’Alpine A 110 défonce la Porsche Cayman S !

Dans le monde des voitures de sport efficaces, attachantes et polyvalentes, les Porsche sont globalement indétrônables. Sauf que l’Alpine A110 n’a peur de rien, et surtout pas de la Porsche Cayman, même en six-cylindres. Explications…


Je ne suis pas d’une nature particulièrement chauvine, mais voir le retour d’Alpine, ça fait du bien. Surtout de voir le retour d’Alpine avec l’A110, une auto bien dessinée et bien proportionnée jusque dans le degré de nostalgie qui l’habite, qui reste intègre à la philosophie initiale, qui mise tout sur les sensations de conduite. Enfin, ça, c’est la théorie, car c’est ce que je me disais avant de l’avoir conduite. Et puis, comme le blog n’a pas fonction psychanalytique, je n’insisterai pas sur la fait que dans ma petite enfance, l’auto familiale était une A110, et que je m’accrochais comme je pouvais à l’arceau, à l’arrière. Et que ma mère a commencé à râler quand ma soeur est née : deux enfants à l’arrière d’une Berlinette, comme daily driver, même dans les 70’s, ça faisait beaucoup.

Bref, l’A 110, c’est un mythe. Même si, aujourd’hui, finalement, dans cette gamme de prix, l’Alpine peut avoir de sérieuses concurrentes qui ne sont pas non plus avares en argument. D’ailleurs, avec maintenant que les Première Edition sont toutes écoulées, il nous reste une gamme composée de la Pure (à partir de 55800 €) et de cette Légende d’essai (à partir de 58500 €), dans l’attente de la S de 292 ch (à partir de 66500 €).

En face, forcément, on pense d’abord à Porsche et le Cayman si l’on veut se battre à armes égales, en termes de coupé deux places à moteur central. Ca, c’est en théorie, car en réalité, ça se gâte vraiment très vite !

Parce que si un 718 Cayman débute à 57100 € pour un modèle de 300 ch (et 69740 € pour la version de 350 ch), en regardant le stock des véhicules disponibles sur le site Porsche France, on constate surtout avec effroi que par le jeu des options, aucun Cayman 300 ch in real life n’est vraiment dispo à moins de 75000 € alors que le prix de l’Alpine, c’est du tout compris et c’est surtout tout à son honneur. En fait, le tarif de base des Porsche, c’est un peu comme celui des BMW à moto : c’est de l’attrape-gogo, pour des engins qui n’existent pas. 

Du coup, on peut modifier les paramètres de l’équation, et considérer en même temps qu’une Porsche, c’est aussi et avant tout un flat-six. Coup de bol : une Porsche Cayman S 2.7 PDK, vraiment propre, pas trop kilométrée, garantie et vendue par un pro, c’est dans les environs de 50 à 55000 €. Tout cela pour une vraie voiture de sport, avec 275 ch. 

Bingo : voilà un beau match qui s’annonce. Au passage : merci à Alpine pour le prêt, merci à mon pote Aurel’ pour la mise à dispo de son auto perso. 

Présentation

Alpine qui défie Porsche, ça, ça me plaît. Côté lignes, il faut avouer que malgré l’âge de notre Cayman (2014), il n’a pas vraiment vieilli et fait toujours tourner les têtes. L’Alpine a pour elle l’attrait de la nouveauté, avec des lignes menues et bien proportionnés, qui se suffisent à elle-même et n’ayant pas besoin d’avoir recours à des artifices pour suggérer la puissance, les performances ou la sportivité.

A l’intérieur, on pourrait penser un instant que ça se tient, notamment dans l’Alpine, grâce à la belle dalle d’info-divertissement avec toutes ses fonctions et notamment le chrono et les manos façon Gran Turismo, ainsi que grâce au tableau de bord digital. Ma version Légende affiche aussi de beaux sièges en cuir marron, avec des surpiqûres bleues, et ça a vraiment de la gueule. Hélas, on finit par tomber sur le satellite de radio « façon Renault 25 » et j’ai beau aimer les Youngtimers, ça surprend. Tout comme l’absence quasi totale d’espaces de rangements dans l’Alpine, compliquant ainsi tout long trajet, alors que la Porsche laisse de quoi brancher son smartphone et dispose de bacs de portières généreux. En fait, on a beau faire des progrès, la qualité allemande des habitacles, ce n’est pas une légende pour rien. 

Perfs 

Là, ça devient rigolo. Sur le papier, la Porsche l’emporte : 275 ch contre 252, le flat six de 2706 cm3 va exploser le 4 cylindres 1799 cm3 de la Dieppoise, qui va mourir dans d’atroces souffrances. Encore que : le flat-six balance 290 Nm à 4500 tr/mn, contre 320 Nm lissés de 2000 à 5000 tr/mn. Et ce n’est pas fini : l’Alpine, c’est la reine du régime. 1123 kilos. A côté, la Porsche, c’est une grosse dinde bien dodue pour Noël : 1435 kilos. Quand même. 

Evidemment, depuis la nuit des temps (ou du moins, celle des années 70), le match « turbo vs atmo » existe. Et on ne va pas le refaire. D’autant plus, qu’en réalité, y’a pas photo. Dans la vraie vie, l’Alpine dépote nettement plus que la Porsche. En reprises, sur route ou sur autoroute, quand le conducteur de la Cayman S met le pied au plancher, celui de l’Alpine lui renifle en permanence le pare-choc. Le souffle du turbo de la française, nettement sensible au-dessus de 2500 tr/mn (mais l’étagement bien pensé de la boîte 7 fait qu’on n’a pas beaucoup de turbo-lag) fait que l’Alpine trace en permanence. On change de volant, on monte dans la Porsche. C’est sympa, c’est valorisant, c’est entêtant (encore plus avec l’échappement Sport dont dispose ce modèle). Mais ça n’avance pas. Vraiment pas. Bon, on se reprend, ce n’est pas non plus un lémurien sous Tranxen, mais disons que la plage d’utilisation, c’est 4500 / 7000 tr/mn, quand celle de l’Alpine, c’est 2500 / 6000. Evidemment, les mélomanes préféreront l’Allemande. Mais faut être en mode attaque absolue pour parvenir à suivre une Alpine menée façon enroulage rapide, ce qui n’est pas la même chose. 

Accélérations, reprises, l’Allemande souffre. Elle se rattrape en vitesse maxi : mais avant d’aborder ce sujet, la législation m’oblige à préciser que ces tests ont été réalisés par des professionnels sur une voie privée et qu’aucune personne censée n’aurait envie de les reproduire. Cela tombe bien, j’ai regoudronné la voie d’accès à mon parking. Bien lancé, l’Allemande s’émancipe : sur le même distance que l’Alpine, elle prend 269 km/h compteur quand la française, au même moment et au même endroit, affiche 249. On attend les photos officielles pour vous préciser les vitesses réelles. 

Sensations

Là aussi, on se trouve dans deux univers différents. La Porsche est plus organique, tout y est plus viril, plus direct, de la direction à la suspension en passant par l’attaque du freinage. On vit la Porsche, on savoure l’Alpine, c’est différent. Ce qui est différent, aussi, c’est qu’il faut vraiment bosser dur au volant du Cayman pour aller vite, alors qu’en toute décontraction, on se retrouve à ne pas amuser le terrain au volant de l’Alpine, sans pour autant devoir cravacher la mécanique et se mettre en apné entre deux changements de rapports. 

En plus, la Porsche est vraiment collée par terre. Peu de roulis, précision chirurgicale de la direction, arrière pas mobile. Un rail. L’A 110, elle, a plus de mouvements de suspension, elle vit plus. Dans le sens positif des choses. Entrée en virage, freinage dégressif, on met de l’angle au volant en relâchant les freins, et l’arrière pivote un peu pour aider l’auto à entrer au point de corde. Je ne sais pas comment ils ont fait ça, mais c’est magique, cette dérive de moins de 10° qui vous donne l’impression que vous êtes soudainement devenu un as du contre-braquage, sans jamais vivre la goutte de sueur qui tape le nombril car vous savez que l’arrière va finir par passer devant. Le Cayman est soudé à la route, l’Alpine est moins rigoureuse, mais en fait elle est joueuse mais pas piégeuse. Un régal. 

Par ailleurs, une égalité s’impose côté boîte de vitesse : ça monte vite les rapports, mais ça reprend la main quand on voudrait parfois la garder. Pas mal, mais pas parfait… 

Et sinon, au quotidien ? 

Broap. L’Alpine est nettement plus démonstrative qu’une Megane RS, même Trophy, au démarrage. Avec l’échappement Sport, le Cayman, c’est Pavarotti sous acide. Sympa. Mais un peu gavant lors des longs trajets. C’est là où l’Alpine se transforme : la Berlinette est devenue très fréquentable, silencieuse, confortable, habitable, sobre (6,9 l/100 sur autoroute, 1 l de moins que la Porsche dans les mêmes conditions), si l’on oublie le manque d’espaces de rangements, elle fait nettement mieux le job. Encore plus au quotidien, avec le couple quasiment instantané de son moteur et la douceur de sa boîte. 

Verdict 

Moins rapide, certes, mais plus performante dans l’absolu, plus confortable, plus silencieuse, plus joueuse, plus sobre, moins chère : joli carton de la part de l’Alpine. Si vous avez un peu moins de 60 000 € et que vous cherchez un coupé deux places sportif, eh bien… ne cherchez plus !

Photos : Emerick Houplain

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