L’encyclopédie (peu) raisonnée des Supercars, partie I

Ferrari Enzo
Supercars, Hypercars, Megacars, Ultracars… la manière de nommer l’élite de l’automobile sportive s’est quelque peu diversifiée ces dernières années. J’ai eu envie d’en faire un catalogue, un inventaire subjectif.

Je ne suis pas le premier à me pencher sur la question : voir ici l’article de mon camarade, l’excellent Alexsmolik, qui fait part de sa sensibilité à ce type très particulier d’automobile. La supercar fascine, intéresse, ne laisse pas indifférent mais il convient d’abord de la définir ce qui n’est pas si simple.

Qu’est ce donc une supercar?

Oui, je me limiterai à ce terme-ci parce que, soyons honnêtes, les autres sont principalement des inventions de constructeurs pour faire mousser leur clientèle dans un univers concurrentiel devenu féroce. En préparant cet article, ce qui m’a frappé d’emblée, c’est la multiplication ces dix dernières années des voitures que je qualifie de supercars. De quelques modèles dans les années 80, on est passé à une gamme complète dans les années 2010.

Tout d’abord, une supercar doit être une voiture à tendance sportive : exit les Rolls-Royce, Maybach et autres Bentley.

La sublime Bentley Brooklands n’est pas une supercar… on l’adore pour d’autres raisons!

C’est luxueux et parfois très exclusif mais ce sont avant tout des voitures à chauffeur. Elle doit également représenter une forme d’aboutissement de l’art automobile de son époque, un fleuron technique ou une avancée majeure. Comme pour toute industrie technologique, l’automobile introduit la plupart de ses ruptures novatrices par le haut (moteur central, coque carbone, roue directrices, moteur porteur, aérodynamique active, etc.). Le design ne peut être qu’exclusif et affirmé. On aime ou on déteste mais on ne doit pas pouvoir rester indifférent.

 La production doit être rare ou carrément limitée : c’est ce qui me fait exclure de la catégorie la gamme supérieure de Lamborghini, Aventador ou Murcielago, qui dépasse allègrement les 2000 exemplaires sans restriction autre que celle de la demande.
De même, la déclinaison limitée de ces voitures n’entre à mon sens pas dans cette catégorie : pas de 599 GTO ou de F12 TdF qui sont des évolutions de fin de carrière à tendance radicale. Il en sera de même pour les SV de Lamborghini ou les RS de Porsche. C’est ici, je le sais, que je vais perdre quelques amateurs qui crieront au scandale mais j’assume en précisant que j’adore la Murcielago SV mais que c’est définitivement non (j’ai bien dit “subjectif” un peu plus haut).
Exclusion enfin des artisans plus ou moins sérieux qui se lancent régulièrement dans des annonces spectaculaires (450 km/h, 5000 ch, 4 moteurs ou que sais-je encore) pour récolter quelques chèques de réservations qui pourraient permettre de tenter d’essayer de développer la promesse de papier. La maquette ou le premier prototype feront notre bonheur dans 35 ou 40 ans sur les pelouses des concours mais on ne peut décemment pas parler de production automobile sérieuse. Quand on sait le temps qu’a mis un groupe aussi puissant que Volkswagen pour mettre au point la promesse des 1001 ch de la Veyron, on se dit que les rares signataires de ces acomptes sont souvent bien naïfs. C’est ce qui explique l’absence de Hennessy et de sa Venom GT, de SSC et de son Aero ou encore de Mosler et de sa MT900 : ces voitures roulent mais est-ce vraiment de la production? Quelques uns ont toutefois réussi avec brio et figurent dans cet inventaire : il faut saluer alors la clairvoyance de leurs bienfaiteurs, notamment ceux de Pagani.

L’élite de l’automobile

Ces grands principes posés, j’ai commencé à répertorier ce que nos constructeurs favoris avaient produit comme supercars. Je me suis finalement arrêté assez vite à 39. Oui, juste 39. Certains diront qu’il en manque (c’est possible voire probable), d’autres qu’il y en a déjà trop (je n’y crois guère mais il fallait équilibrer la phrase). Seront également absentes les Supercars annoncées au moment de la rédaction de cet article : Koenigsegg Regera, Aston Martin AM RB 001, Mercedes-AMG Project One, Ford GT 2016, McLaren B23, etc.
Il a fallu ensuite décider comment vous les présenter : ordre de préférence? chronologie? regroupements judicieux? J’ai finalement tenté l’impossible : un classement inversé totalement subjectif de mes préférences. Sont hors concours les autos que je n’ai jamais pu croiser au jour de la rédaction de ce post : l’intégration dans un environnement normal, le son, les proportions ne peuvent se juger qu’in vivo. Ce classement est donc un savant mélange de goût stylistique, de place dans l’histoire automobile, de synthèse des écrits des cocus chanceux qui ont pu les conduire et nous faire part de leur ressenti et last but not least de pur parti pris.
Lamborghini Centenario
La Lamborghini Centenario a été présentée récemment  lors du salon de Genève 2016. Elle vient prolonger un jeune tradition de mini-séries de taureaux particulièrement énervés en rendant hommage à Ferrucio Lamborghini qui aurait eu 100 ans cette année. Plus puissante, bénéficiant de roues arrières directrices, elle se veut une super Aventador. Son style est presque sage comparé à ses grandes soeurs. Quelques appendices revêtus de jaune lui offrent tout de même un côté bad girl qui plaît tant aux clients de la marque. Les premiers exemplaires (il y en aura 40) arrivent sous peu dans nos rues (enfin celles de Londres).
Saleen S7
J’ai un peu hésité avant d’ajouter la Saleen S7 à cette encyclopédie : marginale et américaine, sa production est vraiment limitée, œuvre d’un artisan un peu trop loin des critères que je m’étais fixés. Saleen est avant tout un préparateur, de Mustang notamment. Un engagement régulier en compétition dans les années 2000 (dont le Mans) lui a fait gagner sa place ici. Côté style, il n’y a pas d’hésitation, on est dans le sport, le viril, la supercar. Côté motorisation, c’est la même chose : née avec 550 malheureux chevaux, elle termina sa carrière avec presque le double (qui a dit “copieur de Bugatti” ?). La production tournerait à quelques dizaines d’exemplaires qu’il n’est pas trop hasardeux de situer aux USA et dans les Emirats habituels. Ceci dit, il y en a une en France. En province en plus…
Jaguar XJR15
Les sessions monotypes ne datent pas de la Ferrari FXX. Dans les années 80, Jaguar, en pleine volonté de masquer l’image vieillissante de ses voitures de production, lance plusieurs programmes. Le plus évident est celui qui conduisit au succès au Mans en 1988. La Jaguar XJR15 s’adresse aux happy few qui souhaitent en découdre en ouverture de Grands Prix F1 en 1991. Conçue par TWR, issue de la XJR9 du Mans, la voiture est aujourd’hui un peu oubliée et quasiment invisible malgré 53 exemplaires construits. Elle ne manque pas d’intérêts : il s’agit de la première voiture routière en carbone. Elle échappe pourtant à la folie ambiante du marché : fin 2014, un exemplaire a trouvé preneur lors d’une enchère RM à Londres pour 218.000 £ seulement alors qu’elle avait à peine plus de 2000 km au compteur. A vous de décider si c’est un placement prometteur ou le signe d’un désamour tenace.
Cizeta-Moroder V16T
Il n’y a que 19 Cizeta-Moroder V16T et elles ressemblent (très) furieusement à la Lamborghini Diablo. La marque a disparu avec elle, après un échec commercial comme on en croise beaucoup dans le petite monde des artisans automobiles sous fond de bataille entre les protagonistes.
Son architecture est foncièrement originale : deux 8 à plats accolés pour former un V16 positionné transversalement ! Je vous laisse imaginer la largeur de l’arrière… Le dessin est celui qui a été proposé en premier pour la future Diablo, servant de base pour ce qui sera la vraie remplaçante de la vieillissante Countach. Comme souvent, la voiture à ses fervents admirateurs, souvent adolescents ou jeunes adultes dans les années 90, contemporains de la bête…
Vector W8

Comme la Cizeta, la W8 fait l’objet d’un culte parmi un petit groupe de fanatiques. La Vector W8 va me permettre de présenter rapidement ce qui provoque bien souvent la chute des constructeurs naissants : une gestion de l’intendance à tendance amateur… 22 exemplaires seulement, une conception toute américaine et un design contestable initié presque 20 ans avant la commercialisation n’ont pas empêché un groupe indonésien de racheter la compagnie sans l’accord de la société elle-même (OPA hostile). Tout ceci pour proposer une version M12 sur base de Diablo (Megatech possédait la marque italienne à cette époque avant qu’Audi ne la sauve). Déchirements, choix techniques contestables, capitaux dispersés : les ingrédients sont là. Si on ajoute le fait que le fondateur Jerry Wiegert avait récupéré la plupart des droits de la marque assez rapidement, on se trouve dans un casse-tête évident. Absolument invisible en Europe, si vous en croisez une, faites vous une grille de Loto.

Lamborghini Veneno
Je termine la série des hors concours par la Lamborghini Veneno, ici en version roadster. En règle générale, j’aime bien les Lamborghini : c’est sportif, agressif, tranchant. La Veneno est l’exemple parfait que le trop est l’ennemi du bien. On frôle l’overdose d’appendices, angles, ailerons en tout genre et je n’ai pas encore parlé de la queue de requin copiée sur les LMP1, très utile pour parader entre Genève et Monaco à la vitesse moyenne de 32 km/h.
En terme de style, elle est donc absolument affreuse mais elle a le mérite d’avoir une personnalité affirmée… En revanche, il s’agit ni plus ni moins que d’une Aventador recarrossée avec un moteur proche (identique ?) à celui de la version SV. Le prix officiel n’a pas été publié mais on parle de ci de là de 3,3 millions d’euros HT. Ca fait très très cher l’anti œuvre d’art mais l’exclusivité est désormais à ce prix. 12 exemplaires seulement, c’est de l’ultra exclusivité.
On fait une première pause ici… la suite très bientôt avec la première partie de mon classement.
Crédit photos : Pierre CLEMENCE, Lamborghini, Craig Howell, RM Auctions, L’automobile sportive
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