Les gens délaissent les monospaces, même petits, pour les SUV. Du coup, Opel fait migrer son Meriva en Crossland X, sur une plateforme de Peugeot 2008. En réalité, ça donne quoi ?
Dans le grand débat qui oppose les modernes aux anciens, le nouveau Opel Crossland X ne sait pas vraiment trancher.
D’un côté, il y a cette inscription « Turbo D » sur la malle arrière : ça, ça fait so nineties, ça, Turbo D, genre les premières Golf TDI ! Étonnant, non ? Surtout dans le contexte dieselophobe actuel. Mais restons positifs : en voyant ce « Turbo D » à l’arrière du Crossland X, Anne H. (de Paris) pourrait avoir des palpitations qui conduisent à une crise cardiaque. Une lueur d’espoir, donc…
De l’autre, une ligne de caisse moderne, face avant assez agressive, feux à LEDs, petit jonc de chrome sur la partie arrière de la carrosserie (qui a aussi ses détracteurs), une couleur de toit contrasté (« une pure coïncidence », dit le Renault Captur !). Très tendance, ça.
Carlos a dit…
Le Crossland X n’est-il qu’un Peugeot 2008 redessiné, ou le faux-jumeau du Citroën C3 Aircross ? Il y a de cela. Et c’est voulu, puisque Carlos Tavares est, en toute bonne logique, dans une démarche de rationalisation des technologies. De fait, par ses origines sochaliennes, le Crossland X ne peut disposer des 4 roues motrices, et c’est pour cela que Opel conserve le Mokka X dans sa gamme, alors que l’on pourrait penser que ces deux-là font doublon par leur gabarit vraiment proche (4,27 m de long, 1,80 de large et 1,65 de haut pour le Mokka X versus 4,21 m x 1,76 x 1,60 pour le Crossland X).
Côté moteur, le Crossland X bénéficie de l’offre PSA. Cela commence avec l’excellentissime trois cylindres 1.2 Puretech, dispo à la fois en version atmo (81 ch) et turbo (110 ch ou 130 ch, le premier des deux étant le seul de toute l’offre que l’on peut accoupler avec une boîte automatique, une Aisin à 6 rapports), tandis que le quatre cylindres 1.6 D est disponible dans deux niveaux de puissance, 99 et 120 chevaux. C’est ce dernier que j’avais à l’essai : le petit 1560 cm3 délivre sa puissance à 3750 tr/mn et un couple, assez copieux, de 300 Nm à 1750 tr/mn. Avec un poids relativement contenu (1319 kilos à vide, soit quasiment 200 kilos de moins que l’ancienne Meriva), cela lui permet des performances assez correctes : 187 chrono en pointe, et surtout le 0 à 100 couvert en moins de 10 secondes, 9,9, exactement, et tout cela avec une consommation officielle mixte de 4 l/100.
Une vraie familiale
En tous cas, ce Crossland X a principalement été utilisé pour un week-end à quatre. Au début, petit moment d’inquiétude en faisant le lien, mentalement, entre le volume des bagages et celui de l’auto. Et finalement, ça le fait. Non pas parce que « tout rentre dans tout avec suffisamment d’élan », comme le dit le philosophe Jean-Claude Van Damme, mais parce que la banquette est coulissante sur une quinzaine de centimètres. Et du coup, le coffre du Crossland X varie de 410 à 1255 l, ce qui en fait plutôt un bon rapport entre encombrement et habitabilité, et c’est difficile de trouver mieux dans ce segment. Au cas où, on est content de savoir que, banquette rabattue, on dispose d’un espace de chargement plat de 1,48 m de long. De quoi aller chez Ikea avec gourmandise ! Sauf que moi, je déteste aller chez Ikea.
A l’intérieur, ça souffle le chaud et le froid… Mais chaud quand même. Froid : planche de bord assez classique, fonctionnelle, mais manquant éventuellement un peu de design ou de couleur, et ce d’autant qu’avec sa teinte bi-ton, le Crossland X se veut quand même un peu funky. Là, c’est propre et bien agencé, mais ça manque un poil de fantaisie. En même temps, Opel a renoncé à ses planches de bord qui avaient la varicelle tellement y’avait de boutons pour simplifier nettement l’ergonomie et c’est déjà ça.
Position de conduite : bonne, facile à régler. Je me suis tout de suite senti à l’aise. L’instrumentation est bien lisible avec l’affichage tête haute du même tenant. Une bizarrerie : l’accoudoir central qui recouvre le frein à main, lequel doit se doter d’un bouton façon excroissance pour pouvoir être actionné… L’équipage a apprécié le système OnStar et la borne Wifi.
Ce que je ne sais pas encore, c’est que les sièges AGR (la certification ergonomique allemande) sont excellents, et se révèlent vraiment confortables sur long parcours. L’option (500 €) vaut le coup si vous faites autre chose que du commuting.
Démarrage : le 1.6 D est quand même assez sonore à froid, puis ça s’arrange un peu une fois l’huile en température. Première source d’étonnement : un levier de vitesse aux débattements super long, presque comme dans un 4×4 à l’ancienne. On s’y fait, car le guidage reste quand même assez précis. Le couple maxi est délivré à 1750 tr/mn et en bon petit Diesel moderne, faut pas lui demander grand chose sous 1500. Tout cela demande donc un peu de boulot en ville, pas question d’imaginer ressortir énergiquement d’un rond-point à 3 km/h si on est en seconde. Mais dans la bonne plage de régime, tout va bien, et le moteur se révèle tout de même assez élastique, acceptant d’allonger la foulée jusqu’à plus de 4000 tr/mn, à l’inverse d’un Mazda CX-3 1.5D qui n’a plus rien à dire au dessus de 3000 tr/mn. Du coup, même à quatre dedans, je n’ai pas vraiment eu le sentiment que ce Crossland X était sous-motorisé… Même si, sur un itinéraire un peu compliqué, il faut quand même jouer un peu de la boîte. Car pour avoir de bons éco-scores (gage d’une belle vie dans les flottes et autres éco-systèmes « vertueux », oui, avec des guillemets), le Crossland X tire assez long. Comptez à peine plus de 1400 tr/mn en 6ème à 90 km/h, ce qui est un poil juste pour de belles reprises.
De fait, il peut frimer avec une conso officielle mixte de 4,0 l/100 km. Cela dit, dans la vraie vie, ce n’est pas la catastrophe non plus. A quatre dedans et avec des bagages, j’ai enregistré du 5,5 l/100 sur départementale et du 5,6 l/100 sur de la grande nationale et 4 voies roulantes, à chaque fois en prenant une petite marge…
Le haut du panier
En même temps, les sensations de conduite sont très neutres. « Attention, c’est très très tiède », peut-on entendre dans Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre. Ben là, y’a un peu de ça. Ce n’est pas une critique, car vu la cible visée, Opel a conçu une auto qui se fait bien oublier. Tout est très neutre, inodore, indolore, aseptisé. La direction, le châssis, les suspensions, le feeling des freins, tout est absolument normal. Rarement je n’ai eu aussi peu à dire et à écrire sur une auto. Je suis déprimé.
Allez, ressaisissons-nous en précisant que quelques bruits aéro font leur apparition à « haute » vitesse (disons plus de 140 km/h – sur circuit, comme le veut la mention légale). La tenue de route est saine, sans être particulièrement engageante au volant, les suspensions restent un peu fermes sur les petites irrégularités mais le confort n’est jamais cassant, bref, c’est très tiède. Et c’est ce que veut la clientèle de ce genre d’auto, donc c’est parfait.
Côté tarifs : ça commence à 16 350 € en version de base (finition Edition avec le 1.2 Puretech atmo de 81 ch). Concernant mon modèle d’essai, le 1.6 D de 120 chevaux commence à 23 950 € en finition Innovation. Doté de quelques options, mon auto d’essai était à plus de 28 000 €, ce qui commence à faire pour un SUV compact : il y avait en effet l’IntelliLink à 500 €, le Park Advanced City 180° à 250 € (mais bien utile, car il y a l’aide au stationnement et la caméra de recul avec vision panoramique à 180°), le Pack Easy (keyless, recharge de smartphone par induction) à 350 €, les sièges AGR à 500 € (à recommander, là aussi, car leur confort et leur maintien est au-dessus de toute critique), le toit vitré panoramique à 700 €, le Pack Vision (feux full LEDs) à 700 €, l’affichage tête haute couleur (pas mal à ce niveau de gamme !) à 350 € et la peinture premium à 720 €. Rajoutez les tapis de sol à 70 € et ça nous fait une auto à 28 090 €, ce qui est tout de même dans la fourchette haute du segment pour ce SUV compact, certes confortable et bien équipé…
Crédit photos : Gabriel Lecouvreur