Dites donc, vous avez de la chance, on vous fait une faveur ! Vous êtes le dernier à l’essayer, profitez en bien. C’est par ces mots que j’ai été accueilli en allant récupérer ma monture du jour. Eh oui, la Golf R SW a déjà été essayée un peu partout, et j’ai l’honneur de finir le bal avant la grande révision de la belle.
Ah elle est belle ma Golf ! Une belle livrée bleu Lapiz, exclusive au modèle R. C’est voyant, mais c’est beau. Pas trop fatiguée par les 12 000 km des essais précédents, elle présente encore bien. Un conseil : évitez les lavages au rouleau, ça se voit vraiment beaucoup sur cette peinture.
Je suis donc le dernier à la conduire avant son départ en atelier. C’est que les voitures de parc presse ont une vie trépidante, surtout les modèles sportifs. Que voulez-vous, les essayeurs sont des grands enfants (ou des gros bourrins, si si). Il faudra donc lui remplacer les pneus, les jantes, les plaquettes et faire une petite révision. Rien de bien grave, et rien de gênant pour mon essai (les plaquettes, vraiment ??). Mais mon problème est plus sérieux. Cette voiture précise est passée entre les mains de beaucoup d’essayeurs de France. Certains sont même allés jusqu’à Monaco à leur volant (coucou Jean-Baptiste !). De quoi vais je donc pouvoir vous parler ? Hé bien je vais faire ce que les autres n’ont pas fait !
Un pique nique
Hé oui, parce que dans Golf R SW, il y a aussi SW pour Station Wagon, ce qui la distingue donc de la version berline, et lui permet d’être une offre quasi unique sur le marché. Certes, elle a de la concurrence interne avec la Leon ST Cupra, basée sur la même plate-forme que la Golf. Mais cette dernière a un petit plus que n’a pas l’ibère : une transmission intégrale 4Motion. Pour le reste, la concurrence est plutôt sommaire. Chez les françaises, une 308 GT ou Mégane du même nom lui rendent 100 ch, une paille, et sans transmission intégrale. Outre-Rhin, on sait faire des breaks-qui-vont-vite, mais faute de Focus RS SW, la ST est un peu à la traîne. Quant aux premiums, une Mercedes CLA A45 est bien plus puissante et plus chère, et on oublie carrément les Audi A4 S ou RS, le budget va exploser. Le moteur sous le capot est le 2.0 TFSI de 300 ch présent aussi chez la cousine Audi S3, accouplé exclusivement à une boîte DSG 6 rapports (quand la berline propose l’alternative avec la boîte manuelle).
La SW est donc un break, mais sait rester compacte. Une longueur totale de 4,60 m, soit une augmentation de 30 cm par rapport à la berline, tout au bénef du coffre qui atteint la valeur record pour le segment de 610 litres. De quoi largement engouffrer une glacière, un plaid, des blousons, des paquets de chips et plein d’autres choses. J’aurais bien essayé le barbecue, mais finalement non. Le coffre est bien carré, pratique, avec plein de petits crochets de maintien et un prise 12V. Le double fond abrite, ô surprise, une roue de secours. Et aussi le caisson de basse du système Dynaudio. Le système du cache bagage est le meilleur que j’ai pu voir jusqu’à présent. Vous savez, ce machin qui part toujours en vrille et qui s’entortille ? Hé bien là, ça marche ! L’ambiance à bord n’est pas aussi sportive que ce à quoi je m’attendais. C’est sobre, tout de noir et bleu (on est chez VW quand même), mais pas forcément extrême non plus.
Les sièges sport en tissu et Alcantara sont fermes et confortables, comme j’aime, mais n’ont pas le look badass des baquets carbone de la GTI Clubsport. On est plutôt dans le chic bourgeois, sport et discret. Un survet Lacoste quoi. Mesquinerie : pas de réglages électriques. Vous allez me dire que c’est pour gagner du poids ? non, sérieusement ? Des touches de bleu partout, un joli pédalier alu et quelques logos R, voilà pour les éléments de sport. La finition… Sans vouloir faire dans le cliché, c’est une Golf. Plastiques moussés partout, ajustements au millimètre, pas grand chose à en dire. Mais comme chez les concurrents, la partie basse du tableau de bord reste toujours en retrait sur le choix des matériaux, pas de miracle.
La position de conduite est très bonne, facile à trouver. Seul l’accoudoir central est un peu mal fichu : trop bas, il n’avance pas assez non plus et au final il ne sert pas à grand chose. Avec une petite famille à bord, l’espace est confortable. Madame trouve à peu près ses marques, et la marmaille derrière se sent à l’aise et apprécie le toit vitré (option à 1345 €) et l’accoudoir central équipé de porte gobelet. Par contre, erreur dramatique !!! Comment oser produire en 2016 une voiture à vocation familiale sans prises USB ou 12V à l’arrière pour alimenter en énergie les iBidules, Kindle et autres machins ?? A réparer très vite sur la version facelift. Il y a heureusement une prise USB au bas de la console centrale pour mon téléphone, avec un compartiment refermable juste à côté. Très pratique pour oublier son portable dans la voiture. Le système multimédia à écran tactile Discover Pro est très bon. Rapide, réactif, il est de plus compatible Apple CarPlay et Android Auto. Seule la carte de navigation du GPS m’a déçu : c’est monochrome, chargé, compliqué. Très difficile d’avoir une vue claire et simple de la direction à prendre. Je préfère largement l’interface Playskool de Plans ou Waze (toujours pas compatible CarPlay soit dit en passant). L’audio Dynaudio est de très bonne qualité. Pas du Bowers & Wilkins de chez Volvo V90, mais largement supérieur à du Bose de chez Renault Mégane.
Le confort de roulage… J’avoue, j’ai eu peur au vu de la tendance hyper sportive de la voiture. Mais joie et bonheur, mon exemplaire dispose de l’option amortissement piloté DCC (1 075 €). D’une pression sur le bouton idoine, de nombreux paramètres se modifient : temps de réponse de la pédale d’accélérateur, régime de passage de la boîte DSG, niveau sonore du vroooouuuup et réglage de suspension. Celle-ci est graduée de Tape-Cul (mode Race) à Chamallow (mode Confort). Un peu sec quand même le Chamallow, mais la différence est flagrante sur mauvais revêtement. La Golf R étant une 4 roues motrices (système 4 Motion avec différentiel Haldex), pas de soucis pour rejoindre le joli-coin-là-bas-au-bord-de-l’étang-mais-si-chéri-là-bas pour étaler le plaid à carreau. Ne pas se tromper : le 4Motion n’est pas là pour le franchissement, mais pour optimiser la tenue de route en cas de mauvaise adhérence. Toute confusion avec un SUV pourrait avoir de graves conséquences !
Gendarmerie Nationale, documents du véhicule s’il vous plaît
C’est rutilant, ça fait vroup, c’est bleu, rien de tel pour attirer la maréchaussée ? Et oui, banco ! Interception par les gendarmes au volant de la Golf R SW ! Les papiers ? Dans le coffre. Je peux sortir ? L’occasion de vérifier pourquoi j’ai été arrêté. La couleur bleue, j’en ai déjà parlé. Ça claque et c’est exclusif à la R. Ça rappelle un peu le Bleu Iron de chez Renault, mais encore plus flashy. Ensuite, bien qu’étant indéniablement une Golf, donc plutôt une voiture banale, celle ci a un certain nombre de particularités. Abaissée de 20 mm, bouclier avant et phares LED spécifiques, grosses et superbes jantes alliage 19″ Pretoria, coques de rétro et barres de toit argentées comme la cousine S3.
Un petit R chromé discret sur la calandre vient annoncer la couleur. Mais le plus beau est à l’arrière : un gros diffuseur et quatre sorties de pot chromées. Oui, une par cylindre. Kéké, tape à l’oeil, tuning ? Oui, quand même. Mais ça a une de ces gueules comme ça ! C’est quand même regrettable que seules les deux sorties extérieures soient fonctionnelles, les autres étant là juste pour la frime.
Le bruit de l’échappement est réglable. Il s’échelonne de Vrouaaap (Race) à Vroooooo (Confort). Jouissif en Race à chaque accélération et décélération ! Mais vite lassant en Confort en roulage pépère sur autoroute et je cherche désespérément le 7ème rapport de la DSG pour abaisser le volume sonore. D’autant plus dommage que ce son dans l’habitacle est en grande partie artificiel ! A voir l’air un peu ébahi de mon jeune gendarme (façon de parler), j’imagine qu’il n’a pas dû en croiser beaucoup des Golf R et qu’il se retient pour ne pas la confisquer. Heureusement pour moi tous les papiers sont en règle, moi aussi et l’alcootest est négatif (si si !! 0 g !) et je peux repartir le sourire aux lèvres sans verser mon obole à l’Etat français ou faire gracieusement don de quelques points de permis. Je me retiens pour ne pas repartir en mode Race en faisant crisser les pneus dans un grand Vrouaaaap rageur… Restons calme, restons calme…
R pour Roule vite
Normalement arrivé ici vous vous dites : “il est gentil lui, il prend une Golf R pour faire un pique nique et faire le kéké devant les gendarmes”. Donc, action. Mode Race : on. Ceinture : bouclée. Ray-Bans : sur le nez. Démarrage à toute blinde depuis la barrière du péage. Ça pousse hyper fort dans un bruit apocalyptique. Tant pis pour ma playlist ! Le moteur monte jusqu’à la limite de zone rouge, là haut vers 6500 tours. La DSG claque les rapports à toute vitesse et sans à coups. L’échappement laisse échapper un râle de satisfaction à chaque passage et ça continue à pousser. 1ère Vrooooaaaa 2ème Vroooooaaa 3ème Vrooooaaaa 4ème…. L’aiguille bleue du tachymètre monte, monte. Tu la vois la limite à 320 km/h ?? On va y arriver. Ahaha ! les 300 chevaux et les 380 Nm de couple sont là, linéaires, faciles à maîtriser. Le couple max est dispo dès 1800 tours jusqu’à la zone rouge. Le coup de poing à l’estomac du départ semble pouvoir durer des heures tant la puissance disponible répond présente. La motricité ? Impériale grâce au 4Motion et à l’ESP très présent. La Golf semble indécollable.
Les 320 km/h ? Jamais atteints… C’est limité à 250 (mais il paraît que débridée elle atteint les 270…). Et pourtant, ça paraît limite trop facile, trop lisse, trop “pousse bouton”. Manque de caractère et de petit côté vicieux ? On change de terrain. C’est bien les drag race et grand prix des feux rouges, mais quand ça tourne on fait quoi ? La Golf semble indécollable aussi dans les virolos. Neutre, impossible à faire bouger. Sur circuit, je dis pas. En attaquant à fond et en déconnectant tout il doit être possible de la prendre en défaut. Mais je suis dans la vraie vie, sur route ouverte, donc je joue pas au con, parce que le tracteur Fendt qui arrive là bas au bout de la ligne droite il est plus lourd que moi. Toujours dopée par le gros couple du 2 litres TFSI, la Golf saute de virage en virage avec un réel plaisir, vissée au sol dans un un bruit rageur. Mais il y a quand même deux ou trois trucs qui clochent. La boîte pour commencer. Six rapports seulement, c’est un peu juste pour une conduite coulée sur autoroute. Mais en conduite sportive, si le mode Race lui permet de monter haut avant de changer de rapport, le passage au rapport inférieur en cas de décélération est bien plus lent à se faire. Donc action sur la palette pour reprendre le contrôle (ou passage en mode manuel total en poussant le levier de boîte vers la droite). Plus gênant pour les pilotes du dimanche : même si on peut aller super vite, c’est trop facile. Dérive du train arrière, contre-braquage, sous-virage, drift ? Oubliez tout ça. Ici ça passe tout seul, dans un grand vrouaaaaap efficace avec une grande réserve de puissance sous le pied droit. Sous l’autre pied droit, 4 grands disques ventilés pour ralentir les 1500 kilos du break. Elle freine fort, à plat, sans vriller et avec endurance. C’est une voiture qui donne plaisir à passer vite, pas forcément à être pilotée.
Est-ce pour autant une mauvaise voiture ? Oh non !!! Il ne faut pas se tromper de cible. Si vous aimez taquiner du talon-pointe, allez voir ailleurs (la Golf GTI ClubSport essayée par Aymeric ici semble très bien pour ça). Mais si vous cherchez une familiale performante, qui a une gueule folle et qui sait surtout être hyper polyvalente, c’est sans conteste la voiture qu’il vous faut. A quoi bon avoir un monospace familial et une sportive quand vous pouvez avoir la synthèse des deux pour tous les jours ? En conduite sereine, c’est toujours rassurant d’avoir de quoi doubler vite fait bien fait, avec la tranquillité des 4 roues motrices pour aller au ski une fois par an. Le look tuning et le vrooap de l’échappement sauront satisfaire le Vin Diesel qui sommeille en vous (si si, je le vois). Et si vous voulez vraiment un break joueur, la Seat Leon plus légère et un peu plus affûtée devrait convenir, au détriment d’une petite perte de polyvalence, mais en moins cher. Si la consommation est plutôt une bonne surprise (un bon 9,5 l / 100 km sur mon essai de 500 km), le prix va faire un peu mal. 46 000 € en prix de base, et 53 000 € pour le modèle essayé. Madame tousse un peu et même si la Golf R SW a autant de coffre devant que derrière, ça va être dur de négocier pour en faire mon daily et la voiture des départs en vacances. Dommage…
Merci à Volkswagen pour le prêt in extremis et au peloton de Gendarmerie de Cosne Cours sur Loire pour leur aimable coopération
Crédits photos : Régis Krol