Essai : Toyota C-HR Hybride. Réconciliation.

Je ne sais pas pour vous, mais je déteste rester sur une mauvaise expérience. Et malheureusement, mon essai du Lexus NX300h en fut une : que le style ne m’ait pas plu, cela reste entièrement subjectif et ne tient qu’à moi. Cependant, ce ne fut pas le seul grief relevé : je n’ai pas du tout, mais alors pas du tout accroché à la motorisation hybride du modèle. Le temps de latence, le manque de dynamisme, la très désagréable sensation de patinage du moteur et la pédale de frein à la consistance pour le moins désarmante m’avaient fâchés avec l’hybride sauce Toyota. Seulement voilà que débarque la Prius 4, avec un système a priori totalement revu. Ne pouvant me libérer à cette période, c’est à Gab qu’est revenu le privilège de passer quelques jours au volant de la berline hybride. Le bougre a manifestement kiffé sa race (c’est a lire ici), ce qui n’a fait qu’attiser ma curiosité. Vite, il fallait que j’essaie un modèle new gen ! Toyoda-san a manifestement entendu mon appel de détresse, puisque voici le C-HR, un SUV compact disponible avec cette nouvelle chaîne de traction. A nous deux !

Bip bip biiip ! Un cycliste s’approche un peu trop de moi. Tududu ! Je mords une ligne blanche. Ding ding ! Une zone à radar arrive. «LDA indisponible sous 50 km/h», m’affiche l’ordinateur de bord, immédiatement suivi d’un « radar anticollision actif » et d’un « n’utiliser cet équipement que sur voie rapide » une fois le régulateur adaptatif enclenché. Pip pip pip pip ! Le radar a assimilé la voiture garée en face de moi comme un obstacle et m’affiche un énorme « FREINER » sur fond rouge. Tut tut ! Je… Je ne sais pas trop ce qui se passe, ni d’où provient cette alarme. Si je devais résumer très très rapidement ces quelques jours passés au volant du C-HR, ce serait probablement ce qui en ressortirait : une succession interminable d’alarmes, de sonneries et d’alertes. Mais ce serait tout de même dommage de réduire le Toyota à ça.

Car il y a beaucoup d’autres choses à dire ! A commencer par le design extérieur. Pour le coup, l’expression « concept-car dans la rue » n’est pas trop galvaudée : rappelez-vous, au salon de Francfort 2015, du stand Toyota où trônait la maquette d’un petit SUV gris avec des lignes dans tous les sens. Eh bien les équipes du constructeur ont rajouté à cette maquette des rétros, des optiques potables, des roues un peu moins grosses et paf ! ils ont lancé la production. Du coup, le C-HR appartient clairement à cette catégorie d’autos auxquelles on ne peut tout simplement pas rester indifférent. Ne serait-ce que pour le profil, avec cette ligne de toit fuyante et une ceinture de caisse ultra haute. Mais approchez de la voiture par n’importe quel angle et s’offriront à vous une infinité de lignes, de surfaces, d’arêtes et de volumes. Partout. Qu’est-ce que j’en pense ? Disons que j’adorerais en dire du mal. Mais…j’aime bien son style ! Tout particulièrement fan du ¾ avant, trapu et musclé à souhait. Un peu plus critique vis-à-vis de l’arrière, vraiment chargé, mais je me suis décidé à bien l’aimer. Notez que, selon le niveau de finition, vous pourrez choisir un toit contrastant -mon haut de gamme chic Distinctive en étant malheureusement dépourvu.

L’intérieur joue aussi la carte de l’originalité, avec ce tableau de bord des plus épurés. J’étais plus que sceptique sur l’implantation de l’écran sur les photos, mais ça rend bien mieux en vrai, avec cet avantage d’être près des yeux et des doigts. Les commandes de ventilation ont le bon goût d’être physiques, avec des vrais boutons qui s’enfoncent. Le combiné d’instrumentation est lui des plus classiques. Les assemblages sont bons et la qualité des matériaux satisfaisante…sauf pour un. Ça fait un peu plus de quatre ans que j’écris des bêtises sur ce beau site, et je n’ai cessé de me battre contre un fini qui me révulse au plus profond de mon âme: le noir laqué. C’est moche le noir laqué. Ça prend la poussière, ça se raye et ça chope toutes les traces de doigts. Beurk. Néanmoins, les équipes Couleurs & Matières Toyota se sont surpassés et ont réussi a créer quelque chose d’encore plus dégueulasse  : introducing le noir laqué…pailleté. Qui brille au soleil. Sérieusement ?

Petit aparté concernant le multimédia, avec notamment ce graaaand écran central, baptisé Toyota Touch&Go 2. Je n’aurai malheureusement pas beaucoup de points positifs à relever : les graphismes sont vieillots, l’ergonomie est moyenne, la réactivité est assez mauvaise et le calcul du GPS un peu largué par rapport à la concurrence. Sans compter que les raccourcis sont tactiles mais dépourvus de retour haptique (comprendre « sans vibration quand on presse l’icône »). Conclusion, on ne sait jamais vraiment si on a bien appuyé sur la bonne touche, d’autant plus que la lenteur du système laisse planer le doute quelques instants. Et dommage aussi qu’il n’y ait pas de molette de volume : si vous voulez baisser rapidement le volume sonore, il vous faudra appuyer façon Parkinson sur le bouton adéquat. Tiens, puisqu’on parle de l’audio, évoquons la sono JBL qui équipait mon exemplaire d’essai et qui fait partie du Pack Premium à 3 000 €, englobant sellerie cuir, projecteurs à LED et clignotants à défilement. Bon, j’ai entendu mieux. Le rendu n’est pas mauvais, mais le syndrome boom boom est bien là, avec des basses beaucoup trop présentes et qui ont tendance à saturer assez rapidement. Enfin, comme bonne Toyota qui se respecte, le C-HR est doté d’une sublime horloge analogique qui sent bon les années 80.

C’est au chapitre habitabilité que le C-HR paye un peu son style. Ce qu’il faut savoir, c’est que l’auto cache remarquablement bien ses dimensions : avouez que, instinctivement, vous voudriez comparer le Toy’ à des SUV urbains genre Audi Q2 ou Nissan Juke ? Raté ! Avec 4,36m de long, Le C-HR tape plus dans l’Audi Q3, le Nissan Qashqai ou même le nouveau Mini Countryman (bientôt à l’essai).Et ces voitures commencent quand même à avoir un certain pedigree familial, avec un coffre aux alentours des 450 litres. Le Toyota ? 377, avec en prime un seuil de chargement assez élevé. Aie. Les places arrière sont elles spacieuses, permettant d’accueillir deux adultes sans souci, mais deux détails me gênent : la poignée extérieure a été cachée pour faire staïle, et se retrouve perchée bien haut pour un jeune enfant. Le deuxième problème est aussi dû au style, puisque les vitres arrière sont -de loin- les plus petites qui m’aient été donné de voir. Ajoutez à cela des fenêtres avant déjà pas bien grandes, une atmosphère très sombre, un toit désespérément non vitré et vous obtiendrez la formule magique pour rendre n’importe quel môme salement claustro. Dommage.

Allez, en route ! Et c’est vraiment là où les choses deviennent intéressantes, puisque je compte sur ce C-HR hybride pour me réconcilier avec le système HSD. Qu’est-ce qui a changé par rapport au NX300h (et au RAV4 essayé par Régis) ? Tout, ou presque : une nouvelle plateforme TNGA, plus légère et plus rigide ; un 1.8 essence de 98 ch/142 Nm à haut rendement ; un moteur électrique nouvelle génération de 72 ch, donnant 122 ch en cumulé ; des nouvelles batteries Ni-Mh de 1,31 kWh, plus compactes et plus rapides à la recharge ; et enfin une supervision électronique totalement revue. De quoi me mettre en confiance pour le petit trajet qui me mènera jusqu’à Bruxelles.

On commence en ville, et, comme d’hab, le système hybride y fait des merveilles. Si je devais résumer la conduite du C-HR dans cet environnement, j’utiliserais l’adjectif « doux » (Qui n’est ni brusque ni saccadé, qui se passe sans heurts, sans à-coups d’après le vénérable Larousse). Le groupe motopropulseur est un bonheur, avec une prédominance étonnante du mode électrique et des transitions plus que jamais transparentes. Les suspensions sont prévenantes, la direction est légère juste ce qu’il faut et, ô joie, la pédale de frein réagit normalement lorsqu’on la presse. Sur le Lexus, on sentait des différences très importantes de consistances, qui rendaient la conduite hachée et qui m’a même causé quelques frayeurs. Rien de tout cela dans le Toy’, et on freine comme on freinerait dans n’importe quelle auto, rendant l’expérience globale encore plus reposante. Et la conso suit, puisqu’il est très facile d’accrocher les 4 l/100 km -et même bien moins en conditions favorables. Le seul souci se passe au moment de se garer : la vision ¾ arrière est apocalyptique et la ceinture de caisse très haute pourra faire disparaître quelques éléments du mobilier urbain. Faites donc attention à cette carrosserie, si spectaculaire mais si saillante et si exposée…

Allez hop, fini de rigoler, direction le plat pays par l’autoroute. Je vais tout de suite mettre les choses au clair : vous disposez d’un SUV de 122 ch qui doit tracter 1 460 kg à vide et ça, ça veut dire « pas de folies ». Du coup, on met le régulateur et on se laisse porter par le trafic. Que vaut le C-HR dans cet élément ? Il se débrouille bien. Oui, les relances sont timides, oui, les sorties de péages et les voies d’insertions sont théâtres de meuglements pas des plus swaggés, mais je note un vrai progrès, notamment en termes de réactivité et de « connexion » entre le conducteur et le moteur : l’interminable latence du Lexus a disparu et le bruit du moteur est un peu plus raccord avec la pression sur l’accélérateur. Allez, un petit effort concernant l’isolation acoustique et on sera au top, bercés dans les fauteuils remarquablement confortables. Seul le régulateur adaptatif n’est pas des plus à l’aise dans la traditionnelle épreuve du slalom inter-camions sur l’A1, avec cette agaçante manie de continuer à freiner quand on entame le dépassement : on peut se retrouver sur la voie de droite avec 20 ou 30 km/h de moins que les voitures qui arrivent derrière, et c’est moyen. En tout cas, la consommation m’a bluffé, avec un chouille au-dessus des 5 l/100 km à l’aller comme au retour : de quoi assurer 800 km avec un seul plein.

Et les départementales, dans tout ça ? Eh bien ici aussi, le C-HR hybride reste digne. Comme dit plus haut, la meilleure réactivité du moteur permet *un peu* de dynamisme, et le petit est presque amusant dans les virages : on profite ici d’un volant agréable à prendre en main, d’une position de conduite assez basse (pour un SUV, s’entend) et d’un châssis qui ne se laisse pas déborder. Ça prend un peu de roulis mais l’expérience reste plutôt agréable, avec une direction saine et des pneus qui accrochent. Dis Toyota, tu nous fais un C-HR GRMN ?

Alors vous allez me dire : combien elle coûte, cette merveille ? La version 100% essence, qui est en train d’être maltraitée par les mains expertes de Gab, commence à 23 000 €. La version hybride débute elle à 28 600 €, et mon modèle haut de gamme avec options culminait à 35 350 €, soit des tarifs à peu près calqués sur ceux de son grand rival, le Kia Niro (essayé ici). Le coréen a pour lui l’avantage de sa boîte à double embrayage, plus douce et réactive, mais semble plus glouton avec 6,5 l/100 km relevés par l’ami Gab, contre 5,1 avec mon petit jap’ -englobant du périurbain yvelinois, de l’autoroute et du Bruxelles intramuros. Sans compter le style qui part dans les deux extrêmes : discrétion un peu chiante pour le Niro, exubérance un rien too much pour le C-HR. Faites vos jeux, rien ne va plus.

Mais au final, qu’est-ce que j’en pense ? Eh bien figurez-vous que je me suis surpris à l’aimer, ce C-HR hybride. Je ne m’y attendais pas, pour être tout à fait honnête avec vous. J’étais pas sûr d’accrocher à son style, et je ne n’espérais pas autant de d’améliorations technologiques par rapport à la génération précédente. Alors, certes, il n’est pas exempt de défauts et il sacrifie quand même plusieurs aspects pratiques sur l’autel du design, mais c’est à vous de voir en fonction de vos priorités. Me voilà réconcilié avec l’hybride Toyota, dites donc. Il est pas beau, le progrès ?

Crédits photos : Jalil Chaouite, Jean-Baptiste Passieux

Un grand merci à Toyota France pour l’aimable prêt et à Jalil pour ses jolies photos ! Vous pouvez retrouver son Instagram en cliquant ici.

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