Essai : Toyota Prius IV, la reine du quotidien

 

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Sérieusement redessinée mais toujours aussi sobre, faisant plus avec moins, la Prius, et c’est nouveau, est aussi devenue agréable à conduire : Alléluia !

J’aime la Prius. Oui, je sais, cela sonne comme une révélation un peu bizarre car cela fait un an demi que je vous parle, sur le blog, de mes passions automobiles, directement, et un peu moins directement, de mes rêves érotiques (on a les perversions qu’on peut) peuplés de Caterham, de Morgan V6, de Lamborghini Espada et de Ferrari BB512.

Avec un tel profil, déclamer son amour pour la Prius peut paraître incongru, mais si l’être humain était rationnel, les psychanalystes seraient au chômage. Car il y a les grands principes, parmi lesquels « la vie est trop courte pour rouler triste » et « les automobiles de caractère ne vous transportent pas, elles transforment chaque déplacement en du souvenir pour la vie » tiennent une bonne place. Et ça, c’est fondamental. Mais il y a aussi le principe de réalité : le quotidien, les embouteillages, les questions de budget imposent parfois des choix moins flamboyants.

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C’est pour ça que j’aime la Prius : à son lancement, c’était une auto qui s’adressait aux écolos engagés (voire enragés !) mais aussi aux gens qui, en s’affichant dans cette berline au design mièvre et aux performances modestes, revendiquaient haut et fort qu’ils n’aiment pas les automobiles pour les mêmes raisons que nous. Des gens qui, de toute évidence, n’accordaient absolument aucune importance au plaisir de conduite à l’ancienne, celui, si futile mais tellement essentiel, et qui nous met en transe. Le bruit d’une soupape de décharge, le crépitement d’un V8 au lever de pied, un petit levier de vitesse avec des débattements fermes et millimétriques, un vibreur qui vous saute au visage, une trajectoire parfaite et un retour d’information tout aussi parfait au volant. La Prius, c’est… le contraire absolu de ça. Mais je respecte les gens qui assument et j’aime la Prius.

J’en ai ensuite essayé dans des taxis qui, à condition qu’ils ne fassent pas brailler RMC, constituaient une expérience assez relaxante dans les embouteillages, puis j’en ai essayé au quotidien et pour faire du Paris, j’ai trouvé ça assez cool. Voire même très cool. Et un jour, je suis parti à Bordeaux dans une Prius+ chargée : chaque départ de péage et chaque dépassement était une souffrance pour ma sensibilité mécanique exacerbée, tellement le truc patinait sans avancer ; à te faire grincer des dents. Mais avec la Prius de 4ème génération, Toyota nous annonce suffisamment d’évolutions pour redynamiser mon intérêt…

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C’est beau, une ville, la nuit

Avant tout, avez-vous déjà suivi une Prius 4 de nuit ? Car l’expérience est troublante : avec ses feux arrière en forme de Z dont la lame inférieure redescend quasiment au niveau du bas de caisse, la Pruis New Gen dégage une allure futuriste indéniable, qui la sort du troupeau des Golf et autres C4. Car si la forme de la cellule habitable n’a pas vraiment changé (l’empattement non plus d’ailleurs, à 2,70 m), la Prius a soigné les extrémités de la carrosserie. Des optiques de phare acérées à la vitre de hayon séparée en 2 par un élément de carrosserie, la Prius s’affirme. On aime ou pas, mais il va être désormais plus difficile de lui reprocher un manque de personnalité. Pour souligner le fait qu’elle s’affirme et s’assume plus, la Prius 4 a grandi : plus large de 1,5 cm, plus basse de 2 cm (à 1,47 m de haut), mais surtout plus longue de 6 cm, à 4,54 mètres.

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Et si, en ombre chinoise, le coup de crayon global n’en est pas révolutionné, la Prius 4 n’a rien a voir avec sa devancière : le châssis est tiré de la nouvelle plateforme Toyota NGA (Toyota New Global Architecture), qui reprend la logique des MQB chez VAG et qui permet de développer un max de modèles en minimisant les coûts de développement. Ainsi, le futur petit SUV Toyota C-HR sera lui aussi conçu à partir de cette plateforme.

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Côté mécanique, on pourrait être déçu : car la Prius 4 ne développe plus 136 ch comme la 3, mais 122. Déjà que ça n’avait rien d’un dragster avant, ça risque de se traîner encore plus… L’écolo est décidément un être contemplatif.

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Le moteur essence est identique : c’est toujours un 4 cylindres 1.8 à cycle Atkinson et au rendement modeste (98 ch et 142 Nm de couple à 3600 tr/mn), par contre il a optimisé ses frictions internes avec une chaîne de distribution à basse friction et des nouveaux coussinets de bielle recouverts de résine. De son côté, le moteur électrique ne développe plus 92 ch mais 72 : résultat, 122 ch en puissance cumulée. Ah…

Si elle est moins puissante, vous devez alors vous dire que la Prius est moins lourde qu’auparavant : que nenni, elle est même plus lourde (oh, de seulement 5 kilos), à 1375 kilos. Ce que Toyota a gagné sur le poids des batteries (toujours de technologie Ni-Mh, qui utilisent 10 % de volume en moins qu’auparavant et qui sont désormais placées sous la banquette arrière et non plus dans le coffre, ce qui permet à celui-ci de gagner en contenance et d’afficher 507 litres, une valeur carrément respectable, d’autant que son seuil de chargement a baisé de 11 cm), il le perd en équipement et insonorisation. La capacité des batteries, elle ne change pas : 1,31 kWh, mais leur vitesse de recharge a augmenté de 28 %.

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Autre nouveauté, qui peut avoir de l’intérêt pour certains : la Prius est désormais attelable, à une remorque de 725 kilos.

Toujours la reine de la ville

(enfin, tant qu’il ne faut pas se garer)

Bon, tout ça c’est de la théorie, mais qu’est-ce que cela donne, en pratique ? S’installer à bord est toujours aussi facile, avec des portes qui s’ouvrent généreusement. Tout comme les feux arrières, le tableau de bord fait très moderne, avec les trois écrans digitaux en haut, le nouvel infotainment et son écran tactile de 7 pouces au centre, tandis que le petit levier de vitesse est bien pratique à actionner pour les manœuvres (et pour le reste, on ne s’en occupe pas vraiment). Ah, autre nouveauté : un petit écran pour l’affichage tête haute en couleur, ainsi qu’une recharge pour smartphone à induction, de même que des touches fonctionnelles et ergonomiques sur le volant.

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Il faut d’ailleurs un peu de temps pour se familiariser avec tout : non pas que l’ergonomie soit compliquée (elle est au contraire simplissime, sauf pour les boutons de sièges chauffants bien planqués sous la console qui abrite le sélecteur de vitesse), mais c’est que la Prius est désormais très moderne.

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(vraiment bien cachées, les commandes de sièges chauffants !)

L’infotainment peut faire appel à votre smartphone pour que celui-si serve de modem et, à côté du GPS, par exemple, vous pouvez afficher des apps telles que Coyote. Même en Prius, c’est toujours utile. Souvenez-vous :

Prius horrible boss

(La scène avec la Prius dans Horrible Bosses (Comment tuer son boss))

Sinon, l’intérieur est à la fois épuré et en même temps richement doté. Je n’ai pas d’avis sur le plastique blanc de la console centrale et de la base du volant. Disons que ça met une touche de couleur et de clarté, même si ça fait un peu plastique…

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Contact. La Prius 4 prend vie sans un bruit. Molette sur Drive, elle avance en silence. En usage normal, dans la vraie vie du trafic parisien congestionné, on ne rappellera jamais assez combien cette sérénité est appréciable. D’autant que quand le moteur thermique prend le relais, c’est à la fois en douceur et toujours en silence, de manière à peine perceptible.

La Prius peut être forcée à rouler en mode « EV » et vous garantira de 2 à 5 kilomètres en tout électrique. Trois modes de conduite sont également disponibles : Eco, Normal et Power. Pour faire connaissance, je reste donc un peu en « Eco » et là, les bonnes surprises arrivent par paquet : le silence est vraiment impressionnant, et lors des petites accélérations pour suivre le trafic, la sensation de patinage a quasiment disparu, on a le sentiment que le groupe motopropulseur est désormais nettement mieux connecté à la transmission et l’expérience de conduite est infiniment plus agréable que par le passé.

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Ajoutez à cela un confort de suspensions tout à fait honnête, une sono JBL assez correcte (même si les basses arrivent trop rapidement à saturation) et la Prius est très convaincante. Sans oublier la cerise sur le gâteau : une conso qui reste inférieure à 4 l/100 sur l’ordinateur de bord, à 3,8 ou 3,9 l/100. Celui-ci permet d’ailleurs de suivre son efficience écologique avec moult pages et graphiques, il est même possible d’entrer le prix de l’essence à chaque fois que vous faites le plein, et la Prius vous calcule en temps réel le coût (faible !) d’utilisation !

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Des bémols, peut-être ? En ville, la visibilité arrière est juste calamiteuse avec ce coffre en pointe et le double vitrage dans le rétroviseur. Heureusement, il y a a caméra de recul, mais les « bips » répétitifs lorsque la marche arrière est enclenchée sont un peu horripilants. Tant qu’on est dans les griefs, le feeling de la direction est assez quelconque en ville, le hayon du coffre monte très haut (gaffe dans les parkings souterrains voire, aussi, si vous êtes un conducteur de petite taille car il n’est pas simple de le refermer), et le feeling des freins à basse vitesse est perfectible, puisque l’effort à la pédale et le niveau d’assistance varie en temps réel selon la façon dont les accumulateurs se rechargent.

Et désormais dix fois plus sympa à la campagne !

Mon planning de la semaine me fait aller une nouvelle fois à Château-Thierry (ville qui, comme vous le savez, comporte plus de Thierry que de châteaux, mais qui est aussi la terre natale de Jean de la Fontaine), pour aller voir des copains qui tournent à moto sur le circuit des Ecuyers. Dommage, pas question cependant de la mettre à l’épreuve (on se souvient que l’équipe de TopGear UK avait démontré qu’à fond sur circuit, une Prius consommait plus qu’une BMW M3 V8 menée au même rythme), mais d’y aller tranquille par l’autoroute.

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Avant, quand on roulait en Prius, il fallait prendre son temps et mettre des boules Quiès pour oublier les lamentations du moteur. Par rapport à la génération précédente, le gain en insonorisation est juste impressionnant : le Cx est excellent à 0,24 (un point de mieux qu’avant) et les Prius qui sont, comme la mienne, montées en 17 pouces utilisent des écopes plastiques (disponibles en plusieurs coloris, noir, bronze, bleu…) entre les bâtons des jantes pour fluidifier l’écoulement de l’air.

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Le silence est impressionnant, mais pas autant que le gain en agrément : bien entendu, si vous roulez constamment à base d’accélérations et de relances pied au plancher (mais dans ce cas, pouvons-nous nous permettre de considérer un choix plus sportif qu’une Prius ?), la transmission à train épicycloïdal qui agit comme une CVT va provoquer un décalage entre le régime du moteur et l’avancée réelle de l’auto. Idem lors des grosses pentes d’autoroute.

Mais si vous roulez avec un peu d’intelligence et dans le flux du trafic, terminé l’effet mobylette ! Dans l’absolu, le rapport poids/puissance ayant baissé, la Prius 4 délivre des performances inférieures à la 3 (le 0 à 100 est revendiqué en 11,7 au lieu de 10,8, et le 1000 DA en 33,2 au lieu de 32), mais au volant, c’est le sentiment inverse qui prédomine, car la connexion entre le conducteur et la voiture est nettement plus directe, avec une puissance désormais plus disponible et surtout plus constante dans l’effort.

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Bref, que ce soit en cruising ou lors de relances de 80 à 110, ou de 110 à 130 km/h, la Prius 4 fait le job et ne donne plus l’impression de devoir être cantonnée à un environnement urbain, de préférence embouteillé. Là, le régulateur de vitesse adaptatif, le détecteur d’angles morts et l’alerte de maintien de ligne font leur boulot. Sur l’autoroute, l’ordinateur de bord m’annonce une conso moyenne de 5,1 l/100.

Une fois nos amis encouragés à mettre un peu plus d’angle aux guidons de leurs BMW S 1000 R et Triumph 675 Daytona R, retour à Paris par les routes de campagne, plongé dans la verdure baignée par une douce lumière de soir d’été. La Prius confirme les bonnes intentions dévoilées précédemment et en rajoute une autre : alors que le feeling de la direction ne m’avait laissé aucune bonne impression jusqu’ici, elle se révèle en fait agile et assez vive à entrer en courbe, en prenant peu de roulis. Oh, bien sûr, pas question de sortir la grosse attaque et au bout de quatre freinages appuyés, le système commence à sentir le chaud, mais la Prius réagit bien aux injonctions du volant et continue de distiller une petite dose de plaisir car, une fois de plus, dans la vraie vie, les performances sont désormais suffisantes. Oui, je viens bien d’écrire Prius + plaisir (et sans « urbain » !) dans la même phrase, et c’est étonnant !

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Assis 6 cm plus bas que dans le millésime précédent, je profite d’un nouvel équilibre de châssis dont le centre de gravité a été baissé de 2,5 cm. Elles viennent assurément de là, ces nouvelles sensations ! À moins que ce ne soit aussi lié à la carrosserie faisant appel à un nouveau type d’acier et plus rigide de 60 %, ou encore au nouveau train arrière guidé par une double triangulation et non plus par un essieu de torsion. Toujours est-il que la Prius ne dédaigne pas les virages et que cette phrase à elle seule constitue une forme de révolution !

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Ce qui ne change pas, c’est la sobriété réelle de cette auto, qui constitue à elle seule une motivation d’achat : mon véhicule d’essai affichait une conso moyenne globale de 4,7 l/100 à l’issue de plus de 4800 kilomètres d’essais presse (donc pas forcément aussi délicats que dans la vraie vie) ; pour ma part, je m’en sors à 4,2 l/100 après plus de 500 kilomètres, dont 100 d’autoroute, 100 de départementales et le reste à vivre ma life dans Paris et aux alentours : soit le résultat d’un tout petit Diesel avec un agrément incomparablement supérieur !

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Certes, la Prius 4 n’est toujours pas donnée (même si les coûts d’utilisation et la fiabilité doivent entrer dans le calcul global) : ses tarifs ont augmenté de 1600 € par rapport à la Prius 3, mais au vu des nouvelles prestations et des équipements, on ne peut pas appeler ça du vol. Ainsi, la Prius Dynamic est à 30 400 € (voire 29 900 € avec l’option « négative » des roues de 15 pouces qui lui donnent un look de teckel mais qui font descendre encore la conso à 3 l/100 et 70 g de CO2 au lieu de 3,3 et 77 g avec les 17 pouces). Ensuite, vous pouvez ajouter, comme sur mon modèle d’essai, le pack à 1000 € (audio JBL, capteurs de pluie, GPS). La version Lounge (33 700 €) offre en plus le cuir, le stationnement semi-automatique et le freinage d’urgence en ville. Dans tous les cas, il y a un bonus de 750 € à la clé.

Ce tarif ne constitue toutefois pas un frein à sa carrière mondiale, puisque la Prius reste la plus vendue des autos hybrides au monde (3,6 millions sur les 8 millions de la gamme Toyota / Lexus) et que depuis 17 ans, la plupart de ses clients en sont extrêmement satisfaits. La concurrence suit à marche forcée mais force est de reconnaître l’avance de Toyota en la matière.

Pour cette Prius 4, Toyota vise 150 000 ventes cette année aux USA, encore 150 000 au Japon et seulement 15 000 en Europe.

Quant à moi, je la verrais bien dans mon garage pour assurer les tâches quotidiennes (sagement garée à côté de la Caterham, de la Morgan V6 et de la Lamborghini Espada). Car la Prius est une vraie voiture. La preuve, je me suis fait flasher au radar avec. Mais c’était certainement « pour ma sécurité ».

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Photos : Gabriel Lecouvreur & SJ

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