Essai Volkswagen Golf 8 R : au sommet de son art

10 de plus. La Golf R dépasse pour la première fois de sa jeune histoire la puissance de sa cousine Audi S3, de tout juste 10 petits chevaux. Quelle leçon en tirer ? Pas grand chose à vrai dire, sinon que le groupe Volkswagen semble désormais abandonner la course à la puissance pour se concentrer sur des changements mécaniques beaucoup plus subtils mais aussi pour garder un gap conséquent entre la S3 et la RS3 ainsi qu’entre la Golf GTI Clubsport développant désormais 300 ch et sa grande soeur R. Bel exercice de gymnastique pour les chefs de gamme oeuvrant pour une cohérence de gamme, jusque là plus ou moins préservée. Preuve en est également le titre de mon essai de l’Audi S3 facelift en 2017 “Pour 10 chevaux de plus“, qu’elle a d’ailleurs re-perdus dès 2019 avec l’arrivée des FAP sur les moteurs essence. Bref, le casse-tête ne date pas d’hier. Ce qu’on peut d’ores et déjà affirmer, c’est que les changements apportés à cette Golf 8 R vont bien au delà d’une légère optimisation du 2.0 L TSI maison. Explications.

Vitrine sportive

A l’heure où Volkswagen entame un virage à 90 degrés vers le full électrique, la gamme sportive thermique n’a pourtant jamais été aussi large qu’en 2021. 3 voitures sous la griffe GTI (Polo, Golf, Golf Clubsport) et pas moins de 7 véhicules arborant le nouveau logo R : Golf, Golf Break, T-Roc, Arteon, Arteon Shooting Brake, Tiguan et Touareg.

La Golf 8 est la troisième génération du modèle le plus diffusé de la marque à travers le monde à porter le R associé dans l’esprit de chacun à la désormais caractéristique teinte Bleu Lapiz, qui sera d’ailleurs le seul grain de folie possible au configurateur en France sur la compacte, les deux autres choix possibles se limitant au blanc ou au noir. Entre une personnalité conservée et des innovations poussées, Volkswagen opte pour la neutralité en rendant une copie presque parfaite à tous les égards, jonglant subtilement avec une motorisation éprouvée au possible et les nouveautés technologiques de la Golf 8. On retrouve ainsi sous le capot un 4 cylindres en ligne 2.0 L TSI culminant à 320 ch de 5500 à 6500 trs/min et 420 Nm entre 2100 et 5350 trs/min. En une génération, la Golf R uniquement disponible en DSG7 prend au passage 46 kg sur la balance, en partie expliqué par les presque 3 cm de plus en longueur et les nombreux équipements additionnels de série parmi lesquels on peut citer la tranmission 4Motion associée à une répartition de couple vectorielle permettant d’envoyer 100% de la puissance transmises aux roues arrières (50% au maximum) sur une seule roue, autorisant ainsi de belles dérives du popotin pour qui saura déconnecter la totalité des gardes-fous électroniques (ce n’est pas une mince affaire). L’accès à cette nouveauté est facilité par l’apparition d’un mode “Drift” inédit sur lequel nous reviendrons plus tard.

Style : on fait dans le traditionnel

Une fois n’est pas coutume, Volkswagen reste mesuré parmi les changements extérieurs apportés à cette mouture sportive de la Golf. On retrouve ainsi de série l’excellente technologie IQ Light associée à une signature lumineuse caractérisée par un trait lumineux entre les deux optiques avant, de quoi faire son petit effet notamment la nuit en ville. Le bouclier avant s’élargit et la délimitation inférieure du pare-choc est entrecoupée de deux arrètes obliques remontant droit vers le logo, une touche stylistique qui me fait immédiatement penser à la face avant de la Lamborghini Huracan Performante. Sur le profil, quasiment aucun changement à part les rajouts en plastiques au niveau des jupes latérales, les étiers de freins bleus ainsi que les jantes spécifiques (ici optionnelles, modèle Estoril 19 pouces en alliage léger, comprises dans le pack R-Performance). On remarque également le becquet arrière en deux parties, le rajout en plastique noir faisant également partie du pack R-Performance. A l’arrière, on retrouvera sans surprise les 4 sorties d’échappement caractéristiques, ici d’ailleurs issues du système d’échappement Akrapovic, facturé 4060 € en option.

Habitacle : on innove, mais pas qu’en bien

C’est souvent là que le bas blesse chez Volkswagen, une finition et une ergonomie irrépochables mais un gros manque de fun dans le choix des couleurs et matériaux sous couvert de satisfaire une clientèle conservatrice. La Golf 8 prend pourtant le parti de choix ergonomiques tranchant radicalement avec sa devancière.

En résumé, oui pour le changement, mais pas en sacrifiant l’érgonomie, les deux gros points noirs étant pour moi vous l’aurez compris la commande de climatisation et celle des modes de conduite. Autre remarque, l’ensemble des boutons physiques y compris sur le volant ont été remplacés par des commandes tactiles au retour haptique singeant la sensation de pression sur un bouton. Je vais faire mon vieux grincheux (et je n’ai pourtant que 25 ans) mais la sensation est totalement différente, et ne me convient guère. Du reste l’intérieur est plutôt réussi. Les sièges semi-baquets d’une seule pièce confèrent un maintien satisfaisant au niveau des cuisses et des épaules et plutôt bon au niveau des lombaires. Le dessin du volant est moderne et sportif de même que le reste de la planche de bord. Du côté du tableau de bord, on retrouve une version mise à jour du Digital Cockpit avec 6 modes d’affichages différents et dont les informations latérales sont configurables à l’envie. Il peut être secondé par l’afficahge tête haute, toujours un must-have à mon sens surtout en conduite dynamique. On aperçoit sur la photo ci-dessous l’affichage par défaut du mode R avec la possibilité de gérer des fonctionnalités de chronométrage au centre. Je lui préfère personnellement l’affichage précédent avec un compte tours à aiguilles (numérique évidemment) permettant une lecture plus aisée du régime moteur. Les réglages peuvent être sauvergardés mais je n’ai pas pris le temps de m’y intéresser.

A la conduite : Dieu multiface

À la manière de la divinité des sans-visages de Games Of Thrones, la Golf 8 R change de visage comme on change de chemise via une configuration à l’envie des modes de conduite. On retrouve ainsi respectivement Confort, Sport, Race & Individual. Le mode Race propose quant à lui deux sous-menus, le fameux Drift mentionné plus haut et un mystérieux mode Special. Sous cette dénomination quelque peu pompeuse se cache en vérité un mode optimisé pour la conduite sur la fameuse Boucle Nord du Nürburgring. On note par exemple une direction plus légère qu’en mode Race et une indication du passage de rapports optimal via une zone identifiée en vert sur le compte-tours. Le logo avec le tracé du circuit allemand apparait d’ailleurs en bas à gauche sur l’écran du Digital Cockpit. Le bon vieux 2.0 L TSI optimisé s’avère totalement étouffé en mode “Confort” et demande une sévère pression sur la pédale de droite, quasiment au plancher, si vous souhaitez effectuer un dépassement un peu plus dynamique que les précédents. Dommage qu’il ‘y ait pas de juste milieu entre Confort et Sport, il faudra obligatoirement passer par la case Individual si vous souhaitez un peu de répondant sans pour autant durcir l’ensemble des autres commandes. Une fois le moteur réveillé, les départs arrêtés ou les accélérations brutales à faible allure sont absolument dantesques mais on retrouve vite un caractère très linéaire dans le comportement du 2.0 L une fois les 2 premiers rapports passés qui gomme un peu les sensations à rythme soutenu, notamment en raison d’une plage de disponibilité du couple maximal très large (plus de 3000 tr/min !). Toutefois, pas d’essoufflement particulier à noter au delà de 5500 trs/min et jusqu’à la zone rouge, un bon point. Le 0 à 100 km/h est abattu en 4,7 secondes, soit un dixième de plus que la Golf 7 R DSG7. La vitesse de pointe est 250 km/h (270 avec le pack R Performance).`

Côté boîte, le passage des rapports en mode manuel de la DSG7 s’effectue exclusivement via les palettes, le “levier” de vitesses ayant disparu. On retrouve des palettes un peu plus grandes que sur la Golf 7, bienvenues et plutôt agréables à manier d’autant qu’elles tournent avec le volant. Le kick-down se fait longuement attendre en mode Confort mais une fois le mode Sport ou Race sélectionné, c’est une toute autre histoire. La boîte robotisée à double embrayage démontre toute l’étendue de son savoir-faire via des passages de rapports aussi canons que discrets en remontées de sensations. Les vitesses atteintes dépassent rapidement l’entendement si l’on se laisse aller à égrainer les rapports un à un. En rétrogradant, de belles déflagrations se laissent entendre, généralement entre 3000 et 3500 trs/min, allant ainsi du petit “pop” à un “BANG” monumental (vous en aurez pour votre argent en cochant la bonne case parmi les options). L’effet semble plus naturel que les crépitements tous plus identiques les uns que les autres à répétition d’une Mégane RS ou d’une Alpine A110 par exemple. Le châssis démontre sur le réseau secondaire la parfaite polyvalence de la Golf 8 R. Malgré un affermissement des amortisseurs et ressorts aux 4 coins par rapport à la génération précédente et des jantes de 19 pouces, la Golf se montre parfaitement vivable même après plusieurs heures de roulage. Les remontées des aspérités de la route dans le volant sont totalement inexistantes et à peine perceptibles dans le bas du dos, magistral. La maitrise du roulis semble largement suffisante pour aborder une journée de track-days sans avoir le mal de mer. Une critique toutefois sur l’intervention de l’électronique même en mode Race. Le contrôle de traction et l’anti-patinage bloquent totalement vos ardeurs en sortie de virage serré. La faute en partie à des pneumatiques de série au profil résolument routier (Bridgestone Potenza S005) qui peinent à monter en température sur route. Résultat : l’électronique prend le relais. Le freinage enfin ne souffre d’aucune critique après deux jours d’essais intensifs. Freinages appuyés et à répétition, pas le moindre fading, une attaque de pédale qui mériterait d’être un peu plus consistante mais une longévité plus qu’honorable. Les plaquettes de série, elles aussi conçues pour un usage routier se désagrègent en revanche un peu vite laissant une surface non régulière et produisant quelques bruits parasites après une bonne session de conduite dynamique. Nous ne testerons pas le mode Drift, n’ayant pas eu l’occasion d’essayer en toute sécurité la bête sur circuit.

Produit à maturité

Pour la troisième mouture de sa Golf R tout court (je ne compte pas les Golf 4 & 5 R32), Volkswagen enfonce le clou et propose une copie presque sans faille, parfaitement à l’image de ce qu’on attend d’elle. Toujours plus efficace, toujours plus performante, seules les sensations ne semblent pas progresser mais c’est un mal pour un bien. Lors d’un week-end où j’ai pu jongler avec deux concurrentes plus ou moins proches, retrouver l’habitable de la Golf 8 R s’est avéré à chaque fois un véritable plaisir. Plaisir de retrouver ses repères pour qui aime les produits du groupe, plaisir d’une quiétude permanente au volant, plaisir d’un caractère bien à elle. Les quelques évolutions ergonomiques dans l’habitacle entachent un peu le tableau à mon goût, mais ce serait vraiment pour chipoter après avoir déboursé plus de 60 000 € options comprises et hors malus pour cette Golf 8 R.

Quelques chiffres

Dimensions : 4290x1789x1458
Poids à vide : 1476 kg
Volume coffre :  352 L
Volume réservoir : 40 L 
Consommation mixte annoncée (WLTP) :   7.8  L/100 kms (7.4 L constatée en usage routier, 14.0 L en usage sportif)
Rejet CO2 moyen annoncé (WLTP) : 177 gCO2/km
Cylindrée : 1984 cc
Puissance max : 320 ch de 5500 à 6500 trs/min
Couple max : 420 Nm de 2100 à 5350 trs/min
Vitesse max : 250 km/h (270 km/h avec le pack R Performance)
0 à 100 km/h : 4,7 secondes

Crédits Photos : Maurice Cernay

Quitter la version mobile