Essai Volvo V90 T6. Et si l’avenir, c’était le 4 cylindres 2 litres ?

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Statutaire, luxueuse, efficace : telle est la Volvo V90, essayée ici dans sa version essence de 320 chevaux, qui nous amène une question. Et si l’avenir, c’était le 4 cylindres 2 litres ?

Je ne sais pas vous, mais moi, le soir, j’aime bien me relaxer, après une dure journée de travail. Installé dans un fauteuil club, je kiffe mettre la sono, et avoir le sentiment d’être dans un auditorium, pour se détacher enfin des vicissitudes du quotidien.

Et là, j’y suis. Ne manquent que le cigare et le whisky tourbé-salé. Mais ces deux-là, je n’y ai pas droit. Pourtant, je suis aussi bien installé que dans un vieux Chiesterfield marqué par un siècle de patine, et là, tout près, je peux entendre les gouttes de salive glisser dans les cuivres de ce live de Femi Kuti, les deux ensembles de percussions entrent en résonance sans parasites. Et en fait, je suis dans une voiture : la Volvo V90.

J’avais eu la chance d’essayer pour le blog le SUV Volvo du renouveau, le XC90 déjà en version T6, ici, et il se trouve que j’en étais ressorti assez mitigé. Rien à dire sur les prestations, mais sur la façon de les délivrer, à près de 95 000 € le morceau, j’étais habité de quelques doutes…

Donc, là, avec ce même moteur mais dans la V90, est-ce que l’histoire allait se répéter ? Eh bien, et au risque de tuer le suspense, non !

Louis la brocante

Traditionnellement, le break Volvo, c’est l’outil des brocanteurs, des universitaires tendance baba cool (dans la Guerre des Rose, Michael Douglas roule en break Volvo avant de se faire offrir une Morgan). Bref, une auto un peu décalée destinée à des gens capables d’assumer leur différence dans un certain détachement.

Avec ses nouvelles générations d’autos, Volvo se repositionne plus directement dans le premium. L’esprit suédois est toujours là (le minimalisme dans le style, et vice-versa), mais la qualité a quand même progressé d’un bond. Gros, le bond.

Certes, le rapport à l’esthétisme est probablement subjectif… Il n’empêche : allez juste me trouver une personne qui puisse prétendre que l’engin est mal construit, mal fini, mal présenté. Avec cette V90 et comme toutes les Volvo récentes, ça laisse un peu sans voix. Épaisseur des cuirs, finition des placages d’aluminium, et sans même parler de ce qui ne constitue pas moins que la meilleure sono embarquée dans une auto, l’installation Bowers & Wilkins, ça donne envie de s’installer à bord et de tailler la route. Loin, longtemps, sereinement.

Et ce look ? J’avoue, je ne suis pas super fan de la S90, notamment à cause de sa partie arrière un peu lourdingue, au niveau de la jonction des feux et du coffre. Alors que pour moi, la V90 est magistralement réussie en étant à la fois élégante mais pas prétentieuse, statutaire mais pas agressive. Avec ses optiques finement dessinées, et le combo de mon modèle d’essai, bleu marine et cuir crème, je la trouve parfaitement réussie et surtout très homogène. Et peu importe que la Volvo V90 ne soit plus la référence absolue en termes d’espace intérieur, avec un coffre comportant de 560 à 1526 litres, quand la dernière Mercedes Classe E va jusque 1820….

Allez, en route, pour voir si cette V90 fait le boulot, notamment au niveau de l’une des premières attentes que l’on est en droit d’exprimer s’agissant d’une Volvo…

Est-elle confortable ? Non !!!!

Je sais, ce genre d’affirmation péremptoire pourrait conduire quelques ingénieurs suédois à tenter le suicide par excès d’aquavit ! Mais je prends le risque. A la question, fort légitime, de savoir si la Volvo V90 T6 est confortable, je réponds : non.

Non. C’est mieux que ça. Ce n’est pas du confort. Après quelques jours passés à son volant, ce n’est pas du confort dont on parle, mais c’est plus que du confort. Un sentiment supérieur : celui du bien-être. Oui, l’expression est forte, mais c’est vraiment cela que j’ai ressenti après plusieurs jours dans cette Volvo.

Un seul reproche, cependant : les roues de 21 pouces (chaussées en 245/35) sont une option à 2580 € qui, certes, affirment le look, mais se révèlent un rien pénalisantes en termes de confort, en étant un peu sèches sur les toutes petites irrégularités.

Mais pour le reste, et pour revenir au paragraphe ci-dessus, la démonstration est magistrale. Parfaitement installé, parfaitement isolé des vicissitudes du monde extérieur, parfaitement secondé par une boîte Geatronic à 8 rapports qui accompagne efficacement le moteur, je me laisse aller en toute quiétude, puisque dans cette version T6, le 4 cylindres 2 litres est d’abord gavé par un compresseur actif dès les bas régimes avant que le turbo ne prenne le relais.

Certes, il tire assez long : comptez 1500 tr/mn en 8ème à 90 km/h, loin, très loin de la zone rouge. Mais sa disponibilité immédiate est carrément palpable et jamais on a le sentiment de manquer de ressources ; les 400 Nm de couple maxi sont disponibles dès 2200 tr/mn, mais une proportion non négligeable arrive déjà bien avant. Cela aussi, ça participe à ce sentiment bien agréable de bien-être. Certes, la gestion de la boîte privilégie la douceur, mais rien dans cette auto ne vous incite vraiment à l’agressivité.

Quoique : y’a bien un mode sport, là, dans le Drive Mode ? Oui. La boîte est plus réactive et la direction plus consistante. D’ailleurs, c’est dans ce mode là qu’elle me paraît le mieux calibrée. Du coup, le 4 cylindres va naturellement aller chercher plus de tours / minute. Mais malgré tout, je ne suis pas resté très longtemps sur ce mode, car il ne me paraissait moins naturel, finalement. Et ce, pour trois raisons : malgré les grosses roues et la direction plus ferme, il reste un peu de roulis et de mouvement de caisse, et la grosse Volvo prend un peu de gîte en entrée de virage dynamique, puisque l’air de rien, le moteur dépote, qu’on arrive vite et que le freinage est à la fois mordant et puissant. Ensuite, si le moteur marche fort (n’oublions pas qu’il est donné pour un 0 à 100 couvert en 6,1 secondes et 250 km/h en vitesse de pointe), il y a un paramètre qui n’a pas changé par rapport à mon essai du XC90 : il a l’art, mais pas la manière et sa sonorité n’a aucun charme passé les 4000 tr/mn. On peut passer outre en montant un peu le volume de l’excellentissime sono, mais bon. Car la puissance continue d’arriver de 5 à 6000 tr/mn et la Volvo allonge la foulée de manière très convaincante, mais malgré ses roues de 21 et sa puissance, on constate vite qu’elle n’a rien d’une sportive.

Du coup, tout incite naturellement à une conduite plus apaisée.

Il n’empêche que le sentiment de légère déception qui m’habitait à l’issue de l’essai du XC90 T6, je ne l’ai pas rencontré au volant de ce V90 T6. La raison est assez simple, finalement : si les dimensions sont comparables en longueur (4,93 m de long pour le break, 4,95 m pour le SUV), ensuite, ça change : 30 centimètres de plus en hauteur pour le SUV (1,77 m contre 1,47) et surtout 200 kilos d’écart (1826 contre 2024). De fait, avec un centre de gravité nettement plus bas, une position de conduite du même tenant et de la masse en moins à emmener, je me suis senti plus connecté à l’auto, plus serein à son volant, grâce à son package plus homogène. Et puis il y a un autre aspect des choses : en finition haut de gamme, mon XC90 T6 d’essai frôlait les 95 000 €, ce que je trouvais élevé pour un 4 cylindres 2.0. Le V90, bien qu’en finition haute Inscription et en version 4WD, est plus raisonnable : le modèle commence à 45 000 €, mais dans cette configuration, on était à 77 000 €, ce qui fait un écart substantiel.

La force tranquille

Et c’est ce mélange de connexion à l’auto ainsi que ce bon niveau de performances délivrées dans la douceur que se révèle cette V90 T6. Ce qui nous amène à la question de départ : est-ce que l’avenir, downsizing oblige, réside dans le 4 cylindres 2.0 ? Évidemment, on peut aussi jeter son dévolu sur le Diesel et mon petit doigt me dit que l’on va vous reparler bientôt, sur le blog, de la V90 en version D5, qui n’a rien de déshonorant en termes de performances (avec le 0 à 100 en 7,2 secondes et 240 km/h en pointe). Mais en termes d’agrément et de silence, ça ne vaudra jamais l’essence.

Du coup, maintenant que dans le monde premium, les séries 3.0 chez BMW et 300 chez Mercedes font aussi appel à un 4 cylindres 2.0, maintenant que les autos performantes (voir les essais des Mercedes CLA 45 AMG ici et, là, de la Volvo V60 Polestar par l’excellentissime Régis), on se dit que la tendance est là, et qu’on ne reviendra pas (hélas) en arrière.

Du coup, cette V90 a le talent de vous placer dans un univers propre et à son volant, je ne me suis pas vraiment dit que j’aurais eu fortement envie d’une autre motorisation. Mais cependant, il y a un gros bémol. Elle est donnée en conso officielle mixte pour 7,4 l/100 (et donc 169 grammes de C02 et 4460 € de malus) et franchement, je ne sais pas comment ils font. Car en roulant cool sur départementale, j’ai fait du 10 l/100, du 11 sur autoroute et du 14 au quotidien dans Paris. Certes, cela reste moins que ce que j’avais constaté au volant de la XC90 T6, merci au poids et à l’aéro, mais cela pose les limites du downsizing. Il y a un road trip en V90 D5 dans les cartons, sur le blog. Il sera intéressant de voir combien mes collègues ont consommé avec le Diesel…

Malgré tout, il y a un signe qui ne trompe pas : même si l’on pourrait nous accuser de non-objectivité (mon photographe, l’excellent Benoît M. et moi-même faisons partie, à titre privé, du club très fermé des propriétaires de Volvo noires à intérieur en cuir noir), la Volvo V90 T6 a fait partie des autos que l’on a rendu avec un petit pincement au cœur. Et ne croyez pas que cela arrive si souvent que cela…

Crédit Photos : Benoît Meulin (www.bluedoorprod.fr)

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