Dernier article (jusqu’au prochain !) de la série consacrée au backdating, restomod et autres bizarreries avec cette fois la Speedback GT de David Brown Automotive.
David Brown. Si vous aimez l’automobile, anglaise et de bon goût en particulier (l’inverse est tout à fait possible), ce nom ne vous est pas inconnu car il fut celui du propriétaire d’Aston Martin de 1947 à 1972. Sous sa direction sont nées les intemporelles DB 2/4, DB4, DB5, etc… D’où les initiales DB reprises pour ces modèles. L’Automobile (avec un grand A) lui doit beaucoup, et James Bond aussi, mais ceci est une autre histoire. Car le David Brown dont nous allons parler n’est pas le même que le sauveur d’Aston, et n’a aucun rapport familial. Celui-ci est un homme d’affaire britannique dont les activités vont de la fabrication d’engins de chantier jusqu’à l’immobilier (sans oublier une brasserie dont les breuvages portent le nom de Comfortably Numb ou Love Over Gold, les mélomanes sauront apprécier…). David Brown est également amateur d’automobiles et a couru en rallye Groupe N sur Subaru et effectué le rallye Pékin-Paris en Rolls Royce des années 20. Et c’est là que nous retrouvons notre homme car il s’est entiché de l’idée de créer une voiture de sport 100% britannique, dans la plus pure tradition du glorieux passé de ce beau pays où les gens conduisent du mauvais côté de la route. Son idée maître : une allure classique habillant une technologie moderne, le tout réalisé avec le plus grand soin par des artisans spécialisés.
Et voilà donc David Brown qui crée en 2013 la structure juridique appelée David Brown Automotive (tant qu’à avoir un homonyme célèbre, autant en profiter) et qui rassemble quelques ingénieurs et designers pour faire aboutir son rêve. Les travaux avancent bien car un premier teasing est orchestré en février 2014. Quelques images habilement retaillées montrent une forte inspiration d’Aston Martin de la grande époque, mais pas beaucoup plus. Mais on apprend surtout ce qui se cache dessous : un V8 compressé. Damn ! Mais où David Brown est-il allé chercher ce V8 ? Tout simplement chez Jaguar dont une XKR va servir de voiture donneuse. Et elle va beaucoup donner, la petite XKR, car la “Project Judi” comme est alors appelée, n’est rien moins qu’un coupé Jaguar recarrossé de bout en bout. Encore un peu de patience, et des rendus 3D sont révélés en mars, avec le nom du modèle qui sera Speedback GT. En avril 2014 le modèle définitif en chair et en os est dévoilé au salon Top Marques Monaco.
D’un point de vue purement esthétique… Mmmmh… Vous voyez une Aston DB5 ou DB6 ? Hé bien imaginez pareil. En un peu plus moderne. Oh, à peine. Pas beaucoup, juste un peu, pour habiller le châssis de Jaguar. Et en moins joli. Il faut quand même avouer que le designer Alan Mobberley (un ancien de chez Land Rover qui a signé notamment le Discovery) ne s’est pas trop embêté à faire un design innovant et jamais vu avant. D’ailleurs il ne s’en cache pas et concède avoir pris son inspiration chez Aston Martin (beaucoup de DB5, un peu de DB7), Jaguar, Maserati et Ferrari (là, je cherche encore) en prenant “ce qu’il y a de mieux chez chacun”. Je vous laisse pleinement juges du résultat mais d’un point de vue tout personnel je suis passé de la phase “ouaaah, c’est beau ça” à la phase “mouais bof, une vraie Aston c’est plus équilibré”. Et il est vrai que la calandre n’est pas des plus esthétiques, que le becquet sur le couvercle de hayon est assez disgracieux et que les feux arrières 3 ampoules LED c’est quand même un peu too much. Je ne parle même pas de l’équilibre général et du grand porte à faux arrière.
Pour ce qui est de l’habillage intérieur, il n’a en apparence seulement plus grand chose à voir avec celui de la voiture donneuse. Les éléments communs évidents sont l’écran multimedia et quelques beaucoup d’interrupteurs. On retrouve ainsi les platines de sièges électriques, les commodos, le volant, etc… En fait un conducteur de XKR ne sera absolument pas dépaysé, toute la disposition étant identique. Après tout, ce sont les limites du rhabillage de châssis existants. Touring Superleggera n’agit pas différemment pour ses Disco Volante sur base d’Alfa Romeo 8C. Les sièges baquets sont quant à eux totalement déplacés à mon sens dans cet environnement voulu plus cosy que sportif !
La qualité de finition est donnée pour “exceptionnelle” par David Brown qui insiste sur la fabrication entièrement à la main de son modèle et revendique par exemple 120 heures de travail pour la carrosserie à elle seule. Il va sans dire que toutes les demandes des clients sont réalisables, notamment cette charmante petite banquette 2 places logée dans le double fond du coffre. Parfait pour les pique-niques au Country Club ou lors d’un Concours d’Elegance (Chantilly, Pebble Beach, Villa d’Este, à vous de choisir).
Les performances sont estimées meilleures que celles d’une XKR : 0 à 100 km/h en 4,6 secondes (contre 5 secondes), Vmax limitée à 250 km/h (314 non limités). Le V8 développe toujours ses 510 ch à 6000 trs/min, et le couple est de 625 Nm dès 2500 trs/min. La boîte automatique 6 rapports est également reprise de la XKR (pas de ZF 8 rapports, dommage). Détail amusant : ce gros coupé 2+2 de 4,80 m de long atteint le poids quasi éléphantesque de 2,2 tonnes soit 350 kg de plus que la Jaguar. Oui, c’est énorme…. Le poids du luxe et de l’exclusivité, que voulez-vous ! Mais du coup les performances estimées meilleures que celles d’une XKR relèvent plutôt de la science fiction.
A propos d’exclusivité, le prix de base de la Speedback GT est de 495 000 £… hors taxes. Soit environ 750 000 € TTC. Hum hum… luxe et exclusivité… C’est aussi le prix d’une belle Aston DB4 de collection, ou de quelques Jaguar XKR… Oubliez les DB5, elles frôlent le million d’Euros maintenant. Et sinon, ça se vend ? Eh bien on dirait que oui. David Brown Automotive a annoncé la livraison de son premier exemplaire de série au client final le 18 février 2016… à Paris ! Ce premier exemplaire de série en conduite à gauche a subi plus de 200 modifications par rapport à la version initiale. Peint dans un coloris Guns and Roses (décidément !), vous avez une toute petite chance de le voir dans la capitale (merci à Nino pour les photos). D’autres exemplaires usines sont vus régulièrement à Londres (un grand merci encore à Antoine) ou dans divers salons dédiés au luxe (Dubai, Monaco, Paris ou Londres). La production sera limitée en tout état de cause à 100 exemplaires.
Crédits photos : David Brown Automotive, Antoine Beck, Nino Hamet