C’est vrai, on a déjà essayé la Peugeot 508 PSE. Mais l’occasion de la reprendre en main s’est présentée ; pourquoi ne pas affiner notre jugement sur la berline sportive de la gamme ?
L’histoire qui lie Blogautomobile à la 508 PSE a beaucoup à voir avec Le Mans ; d’une part parce que ses essais officiels s’y déroulaient (Thomas y était, c’est à relire ici), d’autre part parce que c’est grâce à la dernière édition du Mans Classic que j’ai pu, à mon tour, prendre le volant de la plus sportive des Peugeot -pour rappel, j’étais invité par la marque et c’était trop bien. Au départ, il s’agissait uniquement de la prendre pour faire la navette entre Paris et le circuit mais, la voiture m’intéressant trop, j’ai négocié avec la marque pour la garder quelques jours supplémentaires.
Et me voilà donc à passer cinq jours en compagnie de cette fameuse 508 PSE. Le premier contact se fait dans les sous-sols mal éclairés des locaux Stellantis et force est de constater que la petite a de la gueule. Jantes 20″, caisse abaissée, voies élargies, chromes foncés, calandre spécifique, ça claque. Je vous laisserai juge concernant le Gris Selenium et les touches Kryptonite ; en soi, les couleurs vont bien ensemble, mais je dois vous avouer être fatigué de voir ces resucées de Gris Nardo sur la moindre nouveauté un tantinet sportive.
Je n’ai pas grand chose à dire sur l’habitacle, en revanche. Ca fait quatre ans qu’on connaît le dessin intérieur de la 508 mais il me fait toujours autant d’effet ; je trouve cette planche de bord toujours aussi élégante. La partie logicielle a logiquement un peu vieilli, avec l’écran central d’ancienne génération et les graphismes/animations des compteurs un peu moins chiadés que les derniers modèles, mais je reste toujours aussi fan de généreux placages en bois, des touches piano, de l’architecture générale. L’habitabilité reste également à la page, avec notamment un volume de coffre inchangé à 530 litres malgré l’apparition d’un moteur électrique sous le plancher. Côté sellerie, les jolis sièges s’habillent d’un mix de matières, associant cuir, tissu et alcantara (et quelques surpiqûres Kryptonite, il ne s’agirait pas d’oublier le pedigree de la bête).
Soulevons le capot et refaisons un point sur la motorisation de cette 508 PSE : les ingés de Peugeot Sport ont associé un 1.6 PureTech de 200 ch à deux moteurs électriques, un de 110 ch dans la boîte de vitesse et un second de 113 ch sur l’essieu arrière, ces deux derniers étant alimentés par une batterie de 11.6 kWh. Ca donne plein de nombres : 4 roues motrices, 360 ch & 520 Nm en cumulé, 0 à 100 km/h en 5.2 s et un 1000 m départ arrêté en 24.5 s. Pour situer, on est dans les cordes des S5 Sportback et Série 4 M440i.
Mais bon, l’heure est venue de démarrer. Premier trajet : direction Le Mans, ce qui signifie rejoindre l’A11, mettre la suspension adaptative en mode Confort et fixer le régulateur à 130 km/h. Que vaut la 508 PSE sur autoroute ? Elle se débrouille très bien, merci pour elle. Les vitres sans encadrement sont fatalement sources de bruits aéro mais bon, il suffit de mettre un peu de pression (comme aurait dit mon grand-père) pour profiter de la très bonne sono Focal de série et ainsi oublier le désagrément. Le niveau de confort général de cette 508 sur autoroute n’atteint peut-être pas celui la DS 9 mais bon, il faut dire cette dernière explose un peu tous mes repères sur ce point ; retenez simplement que la Peugeot abat les kilomètres sans fatigue. Niveau conso et avec une seule charge au départ, j’aurai consommé 6.6 l/100 km sur les 587 km du week-end.
Et en ville ? La 508 PSE promet de tirer 42 km WLTP de sa batterie ; j’en ai effectué…31 maximum, sans jamais vraiment la brusquer. Deux observations : en mode “electric” choisi par défaut à chaque démarrage, la 508 envoie sa puissance aux roues arrière, faisant de cette dernière la première Peugeot propulsion depuis un petit bout de temps (hormis la iOn mais bon, qui s’en souvient encore) (hormis moi) (je ne t’oublierai jamais petite iOn) ; la deuxième, c’est qu’on manœuvre la 508 du bout des doigts, avec une direction très légère à basse vitesse et un rayon de braquage vraiment intéressant. Pas mal pour une voiture de 360 ch.
BALEC DU RAYON DE BRAQUAGE JEAN-BAPTISTE, me répondrez-vous à la lecture de ces dernières lignes. Vous avez tout à fait raison. Filons donc prestement dans les Yvelines profondes, là où se cachent de jolies routes totalement désertes. Mais avant, une petite mise en contexte est nécessaire (oui, l’unité de temps de cet article est aux fraises) : quand j’ai récupéré la 508, nombreux furent mes confrères & amis ayant déjà piloté la bête à me prévenir que cette dernière était décevante sur le terrain dynamique (et encore, j’utilise un euphémisme). “Qu’ils sont durs”, pensai-je alors. Ils ne l’étaient pas.
Bon, OK, sanctionner l’intégralité des capacités dynamiques de la 508 PSE d’un lapidaire “décevant” est d’une malhonnêteté n’ayant pas sa place sur Blogautomobile. Disons simplement qu’on pourrait en espérer plus. S’il y a une chose impossible à remettre en cause, c’est bien la qualité du châssis : le grip est phénoménal, la direction raffermie en mode Sport est d’une précision redoutable, le comportement est d’une neutralité remarquable -sans doute bien aidé des 4 roues motrices- ; ajoutons à cela une pédale de frein au feeling très naturel et une régénération qui ajoute sa petite plus-value pour vous dire que les enchaînements de virages peuvent être avalés à des vitesses assez sidérantes. Une vraie Peugeot, quoi.
Là où je tique, c’est au niveau du couple moteur-boîte. Les PureTech 4 cylindres ne sont pas connus pour leurs caractères et les ingés Peugeot Sport n’ont pas pu faire de miracles : la montée en régime est d’une platitude confinant au relief belge, accompagnée d’un bruit moteur m’évoquant plus le meuglement bovin qu’autre chose. Et ce dernier point n’est malheureusement pas aidé par la boîte auto EAT8 qui, si elle est une merveille de douceur et de transparence en conduite “normale”, à tendance à rapidement se laisse dépasser quand le rythme s’accélère. Ses temps de réaction, notamment, sont plutôt médiocres, que ce soit lorsqu’il s’agit de rapidement tomber des rapports en accélération soudaine ou, au contraire, en passer quelques uns lorsqu’on lève le pied à haut régime (la latence engendrée est vraiment déplaisante).
Dernier point : l’épineuse question de la puissance délivrée par la Peugeot une fois la batterie vidée. Selon les communicants, aucun souci, la batterie aura toujours un fond disponible pour donner le boost nécessaire à l’obtention des performances annoncées. De mon côté, pauvre petit blogueur que je suis, je n’ai pas de moyen fiable et ferme pour chiffrer la puissance délivrée par le groupe motopropulseur ; je n’ai que des lignes droites et mon téléphone. Me servant de ce dernier comme chronomètre, j’ai bâti un protocole pseudo-scientifique : plusieurs 0 à 100 km/h séparés par des temps morts nécessaires au refroidissement de la mécanique. Les résultats ? Tous compris entre 6.12 s et 6.37 s, soit une seconde de plus qu’annoncé. Boost il y a, donc…mais pas les 360 ch.
A la réflexion cependant, je dois bien admettre que ces remarques -positives comme négatives- sur la partie dynamique sont très loin d’être une surprise pour moi : concernant le manque de caractère moteur, je vous racontais déjà mes regrets lors de la brève prise en main d’un proto de la DS 9 E-Tense 4×4 360 pareillement motorisée ; quand à l’excellence du châssis, j’écrivais en juillet 2018, à peine sorti des essais presse de la 508 “normale” :
On sent que le châssis peut supporter des motorisations bien plus caractérielles, ce qui fait qu’il est parfaitement à l’aise avec « seulement » 225 chevaux. La voiture réagit sainement en toutes circonstances, en glissant juste un peu du nez aux limites –mais il faut rouler comme un idiot pour les atteindre. Dans le reste des cas, la direction est précise, le roulis contenu et, si l’agilité générale n’est pas incroyable, la voiture enroule de bon cœur dans les virages. La mise aux points des trains roulants est juste bluffante : quelle synthèse magnifique entre tenue de route et confort !
A+B=C : aucune surprise, donc. À l’inverse de la théorie d’Aristote, la 508 PSE n’est que la somme de ses parties.
Il est temps de conclure. La 508 PSE est-elle une mauvaise voiture ? Loin de là. Vous voulez vous en acheter une ? Economisez 13 750 € et partez en 508 hybride 225 ch GT Pack ; pour le même niveau d’équipements, vous aurez une superbe voiture à l’excellent châssis, dotée d’un ensemble moteur-boîte honnête et, surtout, ne vous faisant pas espérer de quelconque prétention sportive. Après tout, Thomas l’a bien intitulé : “c’est elle qu’il vous faut“.
Crédits photos : Stagiaire de Hoonited (merci à lui !), Jean-Baptiste Passieux
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