C’est début août que la nouvelle est arrivée sur les moniteurs du monde entier, enfin ceux qui s’intéressent à l’automobile d’exception : Ferrari présentera un modèle inédit lors d’un événement dédié à Maranello. Les spéculations n’ont depuis pas cessé pour se concentrer sur une version radicale, sans toit, de la 812 Superfast dont le nom serait Monza. Presque tout bon : ce sont en effet 2 variations sur un même thème que le cheval cabré nous offre ce matin.
Si la base est bien constituée par le châssis de la 812 et son V12 de 6,5 litres, tout a été modifié, radicalisé, pour devenir 2 barquettes : Monza SP1 et Monza SP2. Le moteur ne gagne que 10 chevaux pour en offrir 810 à 8500 tr/min, sans aucun turbo, un peu vulgaire. Le poids est réduit, forcément : 1500kg. Ce n’est pas extraordinaire mais déjà un bel effort par rapport aux productions actuelles et compte tenu des renforts nécessaires pour rigidifier la structure. Tout est en carbone, de la carrosserie à ce qui tient d’habitacle.
Le modèle rend hommage à la 750 Monza, barquette de course de 1954. Equipée d’un gros 4 cylindres de 3 litres Lampredi, alternative au petit V12 Colombo, elle remporta sa première course sur l’Autodrome de Monza ce qui lui procura son nom de baptême. C’est à son volant qu’Ascari trouva la mort lors d’une séance d’essai. Elle se bâti contre les redoutables Mercedes 300 SLR (tient tient…) ce qui fut fatal à son palmarès. Mais ce que l’on retient de la 750 Monza, c’est avant tout une ligne d’une pureté absolue : rien ne vient perturber le coup de crayon entre le haut des phares et la poupe. La Monza SP1 en est une descendante directe, nous sommes loin des vagues hommages à base d’un détail de rétroviseur ou de phare avant.
Ferrari cite également la 166MM et la 860 Monza dans ses hommages, c’est moins évident mais pas moins pertinent. Les voitures sont produites par le nouveau département “Icona” qui sera chargé de produire des voitures hommages au passé comme ces 2 Barchetta. A côté de Tailor Made et de Special Project, on créé chez Ferrari !
Pureté des lignes
Avec un couvre-tonneau venant fermer l’habitacle à une place de la Monza SP1, Ferrari nous a concocté une voiture plus radicale que la Mercedes SLR Stirling Moss et son pare-brise de quelques centimètres. Nous sommes ici plutôt dans l’esprit de la récente Dallara Stradale : une voiture dédiée au simple et unique plaisir de conduire. Impensable de s’en servir pour aller faire un tour à l’épicerie fine du coin ou ramener belle-maman après le déjeuner du dimanche. Vous n’avez qu’un but : rouler par beau temps et rentrer chez vous le sourire au coin des lèvres. Difficile de reconnaître la Superfast sous cette robe. L’avant est effilé, les phares gagnent une séparation centrale à la manière de la 720S (mais sans la prise d’air qui va avec). Le profil est d’une simplicité absolue puisque nous n’avons ni toit, noir pare-brise, pas même un saute-vent. Seul l’arceau intégré vient rompre la ligne droite du nez à la poupe, comme son modèle. Les attaches des rétroviseurs sont moulées avec la carrosserie, comme pour une One-77. La livré de présentation est historique, celle de l’écurie Francorchamps, que l’on retrouvait il y a quelques années sur la Ferrari 250 GTO, objet récent de la transaction de gré à gré la plus onéreuse de l’histoire. L’arrière est dans la même veine que tout le reste : simplisme. Un simple bandeau effilé parcourant l’arrière d’une aile à l’autre pour les feux et basta. Les portes sont en élytre et de taille réduite, probablement pour laisser la place au châssis renforcé qui doit faire tout le travail en l’absence de toit et même de montants de pare-brise. On retrouve d’ailleurs à la base de ces portes une encoche, rappel trait pour trait à nouveau de la 750 Monza.
L’intérieur est dépouillé, brut de carbone. Le magnifique baquet en cuir, tanné, vieilli, est un hommage supplémentaire aux reines de la course des temps passés. Seule l’instrumentation de base semble présente. Le pilote, casqué, prendra place dans une chappelle dédié au pilotage. Un système de pare-brise virtuel a été pensé via le dessin du carénage au dessus du volant, pour rendre l’expérience acceptable aux vitesses que la voiture peut atteindre.
Quant à la Monza SP2, elle se distingue avant tout pas ses 2 places, comble du luxe à côté de sa sœur SP1, l’égoïste. Elle offre également des saute-vent que ses passagers apprécieront probablement à leur juste valeur. Ses 2 sièges baquets sont rouges dans cette livrée de présentation. Ils viennent trancher avec le noir profond de la carrosserie. Gageons que les quelques clients sauront faire part de leur meilleur goût dans les futures combinaisons. On croise les doigts…
Aucun prix n’est officialisé, de toute façon, tout est déjà vendu. Pas de chiffre de production non plus mais on parle de 100 exemplaires de chaque modèle, à confirmer ultérieurement.
Si les bruits de couloir faisaient bien état de voitures radicales, on peut être surpris par le parti pris de Ferrari d’aller jusqu’au bout de la logique. D’une certaine façon, c’est assez pertinent. Nous sommes allés très loin dans les capacités, performances et dessins de la lignée des supercars depuis leur avènement il y a une trentaine d’années. Si l’hybridation a offert de nouvelles perspectives, ce ne sont finalement que des voitures encore plus rapides qui ont été produites. Ferrari mise cette fois sur le plaisir avant tout, en dehors de toute considération pratique. Une LaFerrari est en comparaison probablement nettement plus vivable.
La 550 Barchetta avait déjà été une interprétation séduisante du concept au début des années 2000. Bien qu’elle ne bénéfice pas d’une cote aussi stratosphérique que certaines de ses ancêtres, sa popularité est évidente. Sa radicalité (avez-vous déjà vu le truc qui lui sert de capote et qui s’envole au delà de 100km/h ?) et sa ligne à se damner ne peuvent pas y être étrangères. Le pari est à nouveau lancé dans une époque ou la clientèle achète tout ce qui est cher, rare et exclusif. Ferrari n’a jamais eu de mal à écouler ses séries limitées, contrairement à Mercedes et sa SLR ou encore Bugatti avec sa Veyron. La marque profite d’un marché ultra actif pour le plus grand plaisir de ses actionnaires. Nous, passionnés, n’achèterons pas mais commenterons à foisons, feront vivre l’aura de la marque et admirerons dans un silence religieux lorsque l’on en croisera une. C’est aussi cela un business plan qui tient la route sans se fourfoyer dans la production des SUV disgracieux et lourdauds. Amen.
Crédit Photos : Ferrari, Pierre Clémence