Si vous souhaitez lire ici l’essai d’une énième nouvelle béhème, changez de page ! En automobile la mode est aux nouveaux labels et à la diversification de gamme. BMW inaugure une nouvelle marque en présentant l’i3, premier rejeton de la division BMWi qui fait tout pour se distinguer de la célèbre firme à l’hélice bleue. Un essai pour tenter de comprendre ce qu’est l’ i3 : une sportive ? Une citadine ? Les deux ?
Vous pensiez sans doute avoir déjà tout lu au sujet de l’i3. Véritable buzz dans notre rédaction et dans vos commentaires depuis quelques semaines, la puce de BM a déjà eu les égards de plusieurs de nos rédacteurs, mais c’était sans compter le fait que je me mette dans le sillon de plusieurs médias Life Style sur les routes des Pays Bas pour vous présenter, à mon tour, un essai de la béhème électrique. Vous n’y échapperez donc pas: après Eric, François, Eddy ou France, l‘i3 est à nouveau à l’honneur au Blogautomobile.
Le concept.
BMW n’est ni le 1er ni le dernier à se pencher sur les problématiques actuelles et futures de mobilité, qu’elle soit urbaine, ou extra urbaine.
Depuis 6 ans nous sommes plus nombreux à vivre en ville qu’en milieu rural. Mais en 2050 il y aurait plus de gens à vivre en ville que d’individus à vivre sur Terre aujourd’hui ! BMW ne veut pas rater le coche de la révolution automobile qui s’imposera dans les décennies à venir. Pour ce faire, le groupe munichois revendique déjà 40 ans de recherche au service de sa “révolution électromobile”. Après plusieurs concepts étrennés sur des bases de série 3 depuis 1972, de série 1 en 2010 et même de Mini en 2008, BMW commercialise aujourd’hui un modèle 100% électrique, inédit et présentant des caractéristiques propres au nouveau label i. Les mots clé de cette division qui se veut aussi propre que la cousine Motosport est sportive et radicale sont pour certains nouveaux dans le langage BMW: Aluminium, habitacle épuré, fibre de carbone, efficience, développement durable, matériaux recyclés. D’autres sont des leitmotiv bien connus du constructeur : luxe, premium, propulsion, dynamisme, agilité …
La gamme s’articule autour de deux finitions ( i3 et i3 Urban Life) déclinées en quatre ambiances ( Atelier, Loft, Lodge et Suite) . Parmi les équipements de série dès la finition de “base”, la climatisation manuelle, les feux arrière à LED, l’interface Bluetooth et port audio USB, les jantes en alliage léger 19″, la navigation multimédia et le radar de stationnement arrière. La finition Urban Life y ajoute la climatisation automatique, le détecteur de pluie et l’allumage automatique des projecteurs, le régulateur de vitesse, le volant multifonctions … Évidemment la liste des options est fidèle à la politique maison, elle est longue, très longue, et se monnaye cher. Si les ambiances sombres accusent une qualité perçue plutôt moyenne en regard des tarifs en vigueur, les ambiances claires assurent une ambiance chic et zen très agréable. Mention très bien aux inserts décoratifs en bois d’eucalyptus à pores ouverts.
Le style fait débat. Et pour cause. Il est volontairement décalé, presque subversif pour permettre au client technophile et “écolo-sensible” de se démarquer. A nouvelle marque, nouveau design! Si le double haricot orne la calandre (fermée) , le fameux pli Hofmeister Kink est absent. Impossible de mettre tout le monde d’accord, du moins pour l’enveloppe extérieure. Chacun sera juge selon ses propres gouts, référents ou affinités. Sa gueule de bouledogue des beaux quartiers, son profil tourmenté et son postérieur coupé net m’ont plutôt séduit. Il faut dire qu’en design automobile je cultive involontairement une singularité pas toujours bien admise. Si je vous dis que je suis fan du Fiat Multipla de 1998, vous comprendrez aisément que le conventionnel m’ennuie vite. L’intérieur, très moderne et raffiné, est moins atypique même si son dessin est innovant. Point noir, le push STOP/START positionné sur le gros satellite de commande du sélecteur de la boite auto est difficilement accessible. Faut-il l’atteindre à travers la jante du volant ou à l’arrière de celle-ci ? Je cherche encore le moyen le plus ergonomique de démarrer l‘i3. L’habitacle se distingue surtout par le mélange surprenant de ses matériaux : laine naturelle, cuir tanné à l’extrait de feuilles d’olivier, et bois côtoient des plastiques recyclés et surtout le fameux kenaf ( fibre végétale issue de l’hibiscus) des contre-portes et de la planche de bord. L’ensemble surprend mais rassure par un recours important à un ensemble de commandes directement issues de la banque d’organes de la gamme traditionnelle BMW. Voilà de quoi rassurer les clients fidèles qui sauront comprendre le parti pris éco-responsable de la marque. Rajoutons que dans le cas d’une voiture électrique, la chasse au poids est un leitmotiv capable de d’accoucher d’un tel méli-mélo de matériaux.
La conduite.
Après de nombreuses prises en main dans quelques grandes villes de France ( Paris, Lyon, Marseille, Strasbourg …) où public et blogueurs ont pu se faire un avis après quelques courts tours de roue, j’ai pu tester l’ intrigante i3 sur un parcours à peine plus long, sur des routes plates, et dans des conditions météorologiques malheureusement exécrables. Alors, tout le monde se pose la même question :”Que vaut l‘i3?” et “qu’est-elle vraiment “? Une petite sportive ou une citadine écolo ? BMW lui-même hésite et s’embrouille un peu dans son argumentaire du véhicule, tantôt une bombinette, tantôt la solution de mobilité urbaine idéale. Voilà un sacré numéro d’équilibriste que de vouloir présenter un mix sérieux de deux positionnements produits diamétralement opposés. Et si l‘i3 était réellement la synthèse réussie de deux besoins automobiles inconciliables ? Certes l’i3 présente une puissance alléchante qui fait honneur à son label. Certes son gabarit haut et compact, ses 4 places et son espace à bord spacieux lui assurent une mobilité aisée en ville, mais je crains qu’il faille cocher une seule case, la case “citadine” pour pouvoir poser un jugement sérieux sur le produit. Le côté sportif est pour moi du pur marketing, de la comm’ pour flatter celui qui parafe un bon de commande siglé BMWi. La voiture accélère fort, elle vous colle au siège tant l’accélération au démarrage est puissante, mais cela fonctionne seulement quand vous êtes en tête au passage du feu vert. Le reste du temps, vous évoluerez en toute quiétude dans le trafic, bien éloigné de considérations sportives hors sujet sur un véhicule citadin, et c’est là que l’i3 excelle vraiment. Le silence de fonctionnement, l’absence totale de vibrations, la souplesse, le bon confort général malgré quelques raideurs de suspension et l’excellente visibilité panoramique font de l’i3 une partenaire parfaite pour se mouvoir dans les grands centres urbains. Reste que d’autres ( Zoe et Leaf en tête) le font tout aussi bien et pour moins cher. La révolution et le risque industriel de BMW sont plus que respectables, mais le positionnement prestations/puissance/prix est discutable, même si le constructeur allemand prétend pouvoir rentabiliser le projet après une seule année de production ! Étrange recette; j’imagine que la planète automobile entière est en train de vouloir percer ce mystère et savoir comment BMW annonce savoir résoudre une équation économique à priori complexe voire insolvable.
Sauf un caprice du système de navigation qui s’est obstiné à me ramener plusieurs fois à mon point de départ, j’aurais peut être pu rouler plus souvent ailleurs que sur les 4 voies du pays creux hollandais et gouter au plaisir de poser près de moulins ou de champs de tulipes. C’était sans compter avec ce buzz d’itinéraire, l’automne, la pluie et le froid. Et tout à coup je regrette de ne pas disposer de l’option du range extender . Le tableau de bord affiche une autonomie de seulement 34km, et le point final de l’essai est fixé à 27km de là, l’aéroport d’Amsterdam. Pas le temps de chercher une borne de secours ni même le temps d’attendre qu’une hypothétique charge réalimente les batteries de mon pauvre carrosse menacé d’extinction des feux. Il y a urgence, prendre au plus vite et sans détour la route de l’aéroport. Habitué à la mobilité électrique avec les essais des Leaf, Zoe et Twizy, j’avoue n’avoir jamais eu le ventre serré à l’idée de la panne sèche. Et pourtant. Si javais repris le chemin conseillé par le road book pour entrer à l’aéroport et shooter la voiture dans les plus beaux spots du coin, je n’aurais pas pu rejoindre l’aéroport à temps pour reprendre l’avion vers Paris. L’électricité est une belle aventure automobile, mais en automobile électrique, il n’y a très peu de place pour l’aventure, sauf à être équipé du prolongateur d’autonomie. Cette option à 4710€ permet de maintenir le niveau de charge de la batterie permettant ainsi de parcourir jusqu’à 300km. Au quotidien, et en dehors de cette option , trois modes de conduite Confort, EcoPro et EcoPro+ aident le pilote dans la gestion de son autonomie. Attention, l’EcoPro+ détériore le confort en coupant la clim’ et limite la vitesse à 90 km/h.
A défaut d’une belle balade en Pays Bas, au moins je me réjouis d’avoir eu l’opportunité d’effectuer un test pas banal pour un véhicule urbain monté sur des pneumatiques hauts et étroits. Si vous devez faire face à une situation d’urgence, pas de stress! Les tests d’évitement et de freinage d’urgence en ligne droite sur circuit fermé nous ont tous rassuré sur l’équilibre de la voiture. Merci les assistances électroniques, nul besoin d’être un bon pilote, la fée électronique veille en permanence sur votre sécurité. Merci aussi la conception de châssis inédite. Le soubassement aluminium intègre les batteries. L’équilibre des masses est parfait : 50/50. Au dessus la cellule habitable en fibre de carbone gage d’une grande légèreté assure au véhicule un gain de performances, de dynamisme et d’agilité propre à en faire une vraie BM, mais surtout ici un gain de consommation d’énergie cruciale. Sécurité active et passive sont donc au top , une auto BMWi est bien une BMW.
Des accélérations de sportives, une autonomie dans la moyenne haute de ses (trop) rares concurrentes, une qualité de fabrication tout juste bonne pour arborer sans trop de gêne l’hélice bleue BMW au-dessus de son double haricot bleu, la BMWi3 souffle le chaud et le froid autour d’elle. Difficile d’être totalement convaincu par sa pertinence mais difficile aussi de résister à son charme. Enfin, comment ne pas succomber au plaisir de conduite qu’elle procure. Son positionnement marketing fera ou non son succès commercial. Et pour vendre un petit véhicule électrique urbain entre 34990 et 41600€ hors déduction du bonus écologique (et hors option !) la force du label BMW ne sera pas de trop. Il n’en reste pas moins que cette i3 très discutée est un premier fuit très piquant sur le long chemin de la transition écologique que devra effectuer tôt ou tard toute l’industrie du transport.
Photos : Philippe Kerleroux.