Mercedes. Ce nom résonne en moi comme LE pilier de l’automobile. Considérée par le grand public comme un des meilleurs motoristes au monde, symbole de classe, de réussite et de qualité, Mercedes me décevait pourtant côté style ces dernières années. Les Classe A et CLA, malgré toutes leurs qualités n’avaient pour moi de Mercedes que le nom. Adoptée par une jeunesse pas toujours très fréquentable, la marque à l’étoile perdait de sa superbe et faisait fi de son histoire où même avoir un modèle d’entrée de gamme se respectait.
Où étaient passées les années des imposantes berlines et gros coupés taillés pour la route, au look de panzer, capables d’avaler des centaines de kilomètres dans un sentiment de bien-être le plus total ? Peu convaincu par la Classe S Coupé (essai à retrouver ici) à la poupe digne d’un cachalot, pas fan non plus de la Classe C Coupé (essai à retrouver là) qui ne semblait être qu’une pale copie taille 3/4, la Classe E Coupé devait en toute logique me laisser à nouveau sur ma faim. Vraiment ? Pas si sûr…
Aéroport de Barcelone, 12h. Briefing de la journée, quelques mots échangés avec les autres essayeurs puis vient la présentation des modèles disponibles à l’essai. C’est à ce moment précis que j’aperçois par une baie vitrée la vingtaine de coupés disponibles à l’essai. J’omets totalement de prendre note des motorisations présentes et me dirige immédiatement vers un des organisateurs.
« – C’est ELLE que je veux ! »
Grand amateur – pour ceux qui ne le savent pas encore – de configurations sobres mais originales, mes yeux sont immédiatement attirés par deux exemplaires couleur « Champagne » assortis de jantes AMG à rayons fins. Exactement ce qu’il me fallait pour immédiatement changer d’avis quant au design Mercedes actuel : une configuration originale et paf, ça vous change une auto. Fini le blanc, les jantes noires, les vitres teintées à outrance, et la main gauche en haut du volant. Vous savez, cette fameuse position qu’aiment adopter les jeunes au volant de voitures de location pour parader dans les banlieues. OK, je suis dans le cliché total. Pour le coup, avec une telle ligne et une configuration si classieuse, on retrouve plutôt l’archétype du retraité à la casquette et aux gants de conduite en cuirs filant droit vers le golf le plus proche, et ça me convient parfaitement !
Contrairement à la génération précédente aux lignes saillantes, tout le superflu a été supprimé au profit pur et simple du classicisme. Aucun trait de travers, un coupé réduit à sa définition la plus terre-à-terre. Et malgré tout, le design parait encore plus agressif, plus dynamique. Comment cette diablerie est-elle possible ? Tout simplement en élargissant les voies et en raccourcissant l’empattement. La finition Sportline aux boucliers et jantes spécifiques ajoute juste ce qu’il faut d’agressivité tandis que subsistent tout de même les deux arrêtes de capot, caractéristiques des coupés Mercedes et/ou modèles sportifs.
Du reste, aucune surprise particulière. Le Coupé E reste parfaitement dans la lignée initiée par la Classe S et se positionne à merveille entre le C et la S que ce soit en termes de gabarit, de motorisations et de prix (et heureusement me direz-vous) !
À l’intérieur, l’ambiance est au yachting. Il faut dire que la combinaison cuir Nappa Beige Macchiato / Bleu Marine assortie d’inserts décoratifs en orme marron clair rappelle inévitablement le plancher des fameux géants des mers ! Les inserts décoratifs sont d’ailleurs parcourus par un léger liseré lumineux bleu du plus bel effet lorsque le soleil décline. Toutes ces couleurs claires, parfaitement adaptées au climat méditerranéen, en plus de se marier à merveille, procurent un effet apaisant sur les occupants et sans même encore vous parler du moteur, invite au cruising plus qu’à la grosse attaque sur routes sinueuses. Luxe, calme et volupté n’avaient encore jamais jusqu’à maintenant trouvé meilleure définition.
Intéressons-nous à la motorisation. Il faut dire que dans la précipitation, je m’étais bien plus intéressé au look extérieur de la voiture qu’à son moteur ou bien ses divers équipements.
Il s’agit donc ici de la Mercedes E300 Coupé dotée du 4 cylindres 2.0 développant une puissance maximale de 245 ch pour un couple maximal de 370 Nm. Malgré 1,7 tonne sur la balance en ordre de marche (chiffres constructeurs), l’E300 abat le 0 à 100 km/h en 6,4 secondes, de quoi surprendre bien du monde au redémarrage après un péage sous ses airs de gros coupé pour retraités.
Nous commençons les essais dès la sortie de l’aéroport et suivons la trace GPS pré-rentrée dans les voitures. La météo est au beau fixe et il convient d’utiliser l’imposant toit ouvrant panoramique et d’ouvrir légèrement les vitres avant afin de profiter des 17°C à l’ombre ce jour-là (rappelons que nous sommes début mars). Un tel climat ensoleillée convient parfaitement à cette teinte Argent Aragonite qui étincelle de mille feux et éblouit sur son passage les passants qui admirent, intrigués, ce nouveau yacht allemand venu faire escale quelques jours en région Catalane. Appareillons direction l’autoroute qui sera sans aucun doute le terrain de prédilection de notre embarcation.
Clignotant gauche actionné, coup d’œil dans le rétro et pied au plancher. La montée en régime tout comme l’impression de vitesse est inexistante. De plus, le sentiment d’un moteur hurlant sous le pied droit (bien que l’insonorisation dans l’habitacle soit absolument parfaite, pas un seul bruit parasite) me déçoit quelque peu et je regrette à ce moment précis de ne pas avoir opté pour le V6 à la mélodie et aux sensations plus onctueuses, c’est le mot qui convient !
Qu’importe, double impulsion vers moi du commodo DRIVE PILOT et essai de la proposition de Mercedes pour la conduite autonome. Sans pour autant égaler Tesla où la conduite sans mains sur le volant est maintenant possible, les technologies proposées par Mercedes sur la Classe E constituent une réelle avancée et placent ainsi la marque à l’étoile devant ses concurrents tels qu’Audi, VW ou Volvo pour lesquels j’ai déjà pu me faire un avis via divers tests routiers.
Ici, via l’association de capteurs radars, caméras 360, régulateur adaptatif et reconnaissance de signalisation, la conduite autonome qui jusqu’à maintenant ne m’a satisfaisait que peu ou prou donne de grands signes d’amélioration. Le mouvement est en marche et j’ai bien peur qui rien ne puisse l’arrêter puisque nombreuses sont les juridictions à autoriser la circulation de véhicules 100% autonomes.
Les deux atouts maitres de la Classe E vis à vis de ses challengers sont l’anticipation (il était temps, c’est pourtant ce qu’on vous rabâche sans cesse à l’auto-école) et le confort des passagers (ça aussi on vous l’a répété souvent !). Mercedes vient donc de passer l’épreuve du permis de conduire avec succès.
La E Coupé est dès à présent capable de progresser seule sur autoroute si vous lui indiquez la direction. La reconnaissance des panneaux de signalisation est immédiate voire anticipée, la vitesse s’adapte ainsi de manière quasi imperceptible puisqu’à aucun moment on ne sent le coupé utiliser ses freins mécaniques (autres que le frein moteur j’entends). La décélération est la meilleure amie de l’anticipation.
C’est en suivant cette logique que chaque mouvement (si aucune situation d’urgence) est analysé, décomposé puis effectué dans une douceur toute naturelle. La voiture décélère dès qu’un obstacle (telle qu’une voiture plus lente) est détecté au loin et évite tout freinage intempestifs désagréable pour les occupants mais également dangereux pour les autres usagers.
Avec des lignes de signalisation bien identifiées au sol, la voiture parvient également à maintenir une trajectoire parfaitement rectiligne ou exactement au milieu de sa voie de circulation dans de grandes courbes là où d’autres voitures vous balancent d’une extrémité à l’autre de la voie, seul le capteur de franchissement de ligne agissant.
Enfin, par simple action du clignotant gauche ou droite en fonction de la situation, la E Coupé sait également changer de voie (sans que vous n’ayez à toucher au volant). Combiné au détecteur d’obstacle, si vous anticipez suffisamment, la voiture est capable de ré-accélérer tout en changeant de voie (après vérification automatique des angles morts) et non pas de n’accélérer que d’un coup lorsque vous êtes parfaitement sur la voie de gauche comme le font encore une fois beaucoup de voitures de la concurrence. Malgré tout, le DRIVE PILOT réclame encore que le conducteur garde ses mains sur le volant.
Avec un tel niveau d’avancée dans la conduite autonome, n’aurait-il pas été possible de se placer au niveau de Tesla pour qu’au moins les trajets autoroutiers puissent s’effectuer sur quelques portions dégagées et sans danger sans les mains ? Lorsque le message de rappel s’affichait, je n’avais personnellement qu’une envie, tout désactiver et reprendre la conduite que l’on pourra bientôt qualifier de « à l’ancienne ».
Mais c’est qu’elle me manque cette conduite à l’ancienne ! Direction le chemin des écoliers et utilisation des petites routes environnantes ensoleillée et surtout désertes ! Pas de chichi, on passe directement du mode « éco » au mode « Sport + », c’est qu’on a du boulot !
Le petit 4 cylindres se transforme littéralement pour rugir (si si !) à chaque montée de rapport comme on pourrait l’attendre de ses cousines AMG survitaminées. Un petit « broop » gratifiant n’incitant à aucun moment de relever le pied droit. La poussée ne se fait pourtant pas phénoménale et bien que l’on atteigne en un temps honorable des vitesses qu’il ne convient pas de préciser ici, la totalité des sensations est gommée par un élément essentiel dans le confort de ce gros coupé allemand : la suspension pneumatique. Disponible en trois versions, nous disposons ici de l’Air Body Control ou en français une suspension active multicoussins qui via une adaptation permanente au revêtement et à la typologie de la route assure un confort presque démesuré. On ne sent plus la route !
Et c’est bien là la problème en conduite dynamique avec une propulsion. En virages serrés, même en forçant, le train arrière ne se décale pas d’un mm, les aides s’actionnent en permanence pour vous aider à mieux « enrouler » les virages (et ça se sent vraiment !), la direction se fait plus dure et plus incisive mais rien de neuf en ce qui concerne la suspension. À tel point comme je le disais que cela peut tendre à devenir dangereux, je défie quiconque de prédire avec certitude à quel instant le train arrière va décrocher et se mettre à danser. Empattement raccourci et voies élargies, la nouvelle E Coupé est à coup sûr plus dynamique que la précédente comme nous l’ont répété les ingénieurs Mercedes présent pour ces essais internationaux, mais après 10 min de conduite sportive, de freinages appuyés (il faut la freiner la bête !) et de vitesses de passage en courbe de plus en plus élevées, je mets un terme définitif à cette échappée.
On est quand même mieux sur l’autoroute non ? J’actionne de nouveau le DRIVE PILOTE, adopte une position de conduite allongée et ô bonheur, choisis de m’écouter une sympathique compilation d’Hans Zimmer, tous Watts dehors. Agréable ? Littéralement ! Déçu ? Oui, tout de même.
Après de multiples réglages, le système audio Burmester équipant le reste de la gamme et tout de même facturé une jolie somme ne répond pas à mes attentes. Bien que ne disposant pas de la meilleure oreille musicale qui soit, le système Bower & Wilkins proposé sur la gamme Volvo reste pour moi le must actuel. Du reste, cruiser en yacht sur l’autoroute reste définitivement la meilleure comparaison que je puisse trouver à cette nouvelle Classe E Coupé.
Minute papillon, le prix. Une E300 Sportive démarre à 64 200€, la liste de prix de la totalité des équipements n’étant pas disponible tout comme le configurateur français, je ne peux affirmer avec certitude le prix de l’exemplaire dont fait l’objet cet article. En revanche, je n’hésite pas un seul instant à dire que l’on doit approcher sans mal les 80 000€. 80 000€ pour un 4 cylindres ? On s’est compris.
Crédits Photos : Maurice Cernay
Un grand merci à Mercedes France pour la sympathique invitation.