Il y a des invitations qu’on ne peut décemment pas refuser. Par exemple, lorsque BMW nous propose de faire un tour en i8, aussi court soit-il, on ne réfléchit même pas…
Une soirée de Juin, circuit du CERAM, Mortefontaine. Le soleil va bientôt se coucher et nous sommes quelques blogueurs a avoir la chance de découvrir la nouvelle supersportive de BMW, la i8. Dire que j’étais impatient tient de l’euphémisme.
Pourquoi en faire tout un fromage ?
Parce que ce n’est pas n’importe quelle voiture. L’i8 est le fruit d’un long développement que l’on suit depuis 2008 et la présentation du Concept Vision EfficientDynamics. Six ans plus tard, l’auto est bien réelle, et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’expression “concept-car dans la rue” est très très loin d’être galvaudée, tant les différences entre le show car de 2008 et la voiture de série sont ténues. Dans ce Crystal White nacré agrémenté de quelques touches de bleu électrique, l’i8 apporte vraiment quelque chose de nouveau dans la catégorie. La face avant est basse et large, avec les haricots pleins cerclés de bleu, d’où partent les optiques effilés pouvant -première mondiale- recevoir des feux au laser, garantissant une visibilité optimale jusqu’à…600m. Le capot reçoit une généreuse prise d’air qui marque le début de la Black Belt, recouvrant toute la partie supérieure de l’auto, typique des BMW i. Le profil est spectaculaire, avec ses portes en élytre, ses vitres prolongées visuellement vers l’arrière et ses bas de caisse sculptés à l’extrême. Je n’ose imaginer le travail d’usinage des éléments de carrosserie, tant les plis sont omniprésents. L’arrière se hisse au niveau Headshot dans ta face, principalement dû au panneau de carrosserie s’échappant du toit, rejoignant le reste des petites fesses via les feux. Le noir laqué occupe quasiment tout l’espace disponible, à l’exception de l’élément central, dont le pli de carrosserie donne l’impression qu’une 911 est bloquée à l’intérieur (si si je vous promets). Sur pas mal de sportives, le blabla des marketeux parle d’un “dessin dicté par l’aérodynamismes”, d’une “carrosserie sculptée par le vent” et beaucoup d’autres bêtises du genre, mais là j’étais bien embêté car c’est vraiment l’impression qui en ressort…
Même refrain à l’intérieur. Les BMW sont connues pour toutes avoir un tableau de bord au dessin relativement comparable, avec un certain nombre d’éléments (coucou les compteurs oranges que même Lucy a dû connaître), mais là… Pas du tout. Cachez le levier de vitesse et quasiment aucun indice ne pourraient indiquer que vous êtes à bord d’une béhème : la planche de bord est constituée de strates (paramètres conduite/clim/raccourcis GPS/aérateurs/écran), tandis que les compteurs sont entièrement digitaux et paramétrables selon le mode de conduite engagé. Le volant reprend des éléments de celui de l’i3 (cerclage métallique, logo bleuté) mais ajoute une touche plus sportive. Question finition, on est sur du BMW, pas de souci à avoir là-dessus : matériaux choisis, assemblages sans reproche… Et pour finir sur l’habitabilité, si les sièges avant sont confortables, les strapontins à l’arrière (car oui, l’i8 est une 2+2) ne sont là qu’en cas de dépannage, comme c’est le cas de quasiment tous les coupés sportifs.
Mais si l’enveloppe extérieure de l’i8 est alléchante, c’est en dessous que ça devient carrément intéressant. Le châssis de l’auto est, comme sa petite sœur l’i3, composé de deux éléments, dont l’architecture générale rappelle un peu le monde de la Formule1 et de l’endurance : le module Life, sorte de cellule de survie englobant l’habitacle, est constitué de fibres de carbone (CFRP pour les intimes) visibles à l’ouverture des portes, tandis que la partie Drive, regroupant tous les éléments relatifs à la conduite (moteurs, liaisons au sol), est fabriqué en aluminium. Tout cela permet de limiter le poids à “seulement” 1 490 kgs. Vous pourriez penser que, au vu des technologies employées, on pourrait s’attendre à quelque chose de plus léger, ce à quoi je vous rétorquerai que la majeure innovation de l’i8 provient de son moteur. Ou plutôt, de ses moteurs. Car oui, comme ma Volt ou la V60 d’Eric, la BMW i8 est une hybride rechargeable, ce qui signifie que vous branchez votre voiture chaque soir sur une prise électrique et paf, trois heures plus tard (deux si vous avez investi dans une wallbox), vous pouvez rouler jusqu’à 35 km en mode zéro émission, grâce au moteur électrique (131 ch / 250 Nm de couple) sous le capot et aux batteries de 5 kWh logées entre les deux sièges pour conserver une parfait rapport des masses avant/arrière. Derrière l’habitacle se loge donc le moteur thermique de 231 ch pour 350 Nm de couple. Des valeurs qui n’ont rien d’extraordinaire ? Peut-être, mais sachez qu’il n’y a pas 6 cylindres dans ce moteur, mais…seulement la moitié. Une supersportive avec un trois pattes, voilà qui peut intriguer… Mais les 362 ch cumulés, le 0 à 100 km/h expédié en 4,4 s et la vitesse max autolimitée à 250 km/h pourront rassurer les sceptiques. D’ailleurs, en parlant de ça, et si on allait faire un tour ?
Quoi quoi quoi, BMW t’a prêté une i8, genre tu l’as eue pendant tout un week-end et tout ?
Ha ha ! Non. C’était du concentré, et je n’aurai pas passé beaucoup plus de 10 minutes à son bord. Mais bon, c’est quand même 10 minutes de plus que 99,998 % de la population mondiale alors ne boudons pas notre plaisir. Le programme était le suivant : une paire d’accélérations avec votre serviteur au volant, puis un tour d’anneau de vitesse en passager. Étonnamment, entrer à bord -ou en sortir- n’est pas la plus compliquée des choses, et on peut même effectuer l’opération sans trop se taper l’affiche (on n’aura peut-être pas la classe de Tilda Swinton, mais on peut quand même garder sa dignité). On prend donc place très bas dans un baquet accueillant et confortable, mais qui n’oublie pas de maintenir correctement le dos. On appuie sur le bouton “Start/Stop”, une douce mélodie s’échappe des hauts-parleurs -signe que la voiture est prête à rouler-, j’enclenche la marche avant et c’est parti mon kiki… Bien entendu dans le plus grand silence. Qui ne va pas durer. Pour bien comprendre ce qui va suivre, il est important de souligner que la prise en main s’est réalisée avec un véhicule dont les batteries étaient déchargées, et les accélérations ne se sont faites qu’en mode “Normal” : toute la puissance n’était donc pas disponible. Mince alors, on va devoir en demander une en parc presse pour voir la différence.
Pour autant, on ne peut pas dire que l’i8 se traîne, oh que non. Mais les sensations sont assez étonnantes, surtout lorsqu’on compare avec une brute du genre M6 Gran Coupé. Non, l’accélération est ici bien plus feutrée, plus linéaire, moins hardcore (ce qui n’enlève rien, une fois encore, à la poussée ressentie à l’accélération). Et si je devais m’arrêter sur un point en particulier, c’est bien entendu sur la sonorité du 3 cylindres, tant le petit bloc de 1.5L gronde comme un grand. Alors, certes, le son est bidouillé de partout via des hauts-parleurs, mais le ressenti est absolument naturel…et carrément dingue. Quant au tour d’anneau, la voiture a “seulement” atteint les 210 km/h (60 km/h moins vite qu’en M6), mais, là aussi, on se sentait moins ballotté, la voiture restait extrêmement stable, tandis que le moteur se faisait discret : en un mot, on était posay. Du coup j’aurais volontiers poursuivi cet exercice, bien à l’aise dans mon siège, mais c’est déjà la fin et il faut dire au revoir à cette extraordinaire voiture.
Oui, je lui dis au revoir et non adieu. Car je suis certain que la BMW i8, avec le trio 918-P1-LaFerrari, incarne cette nouvelle génération de supercars où l’électricité ne bride pas le plaisir de conduite mais le décuple. Une nouvelle page dans l’histoire des voitures de sport et qui prouve que, oui, on peut se faire plaisir avec une hybride à trois cylindres, et je trouve que, rien que pour l’image, BMW a fait fort. Et à bien fait. Alors certes, à 141 950 €, elle n’est pas forcément donnée, mais le moindre coup d’oeil à la technologie embarquée et au pas de géant qui la sépare des ses autres concurrentes justifieront immédiatement le prix. Ma chère i8, c’est avec impatience que j’attends de te voir dans la rue…
Crédits photos : Jean-Baptiste Passieux
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