On vous en parle beaucoup en ce moment mais Rétromobile et les événements concomitants sont sans conteste le point d’orgue de la saison francilienne. Une semaine dédiée à la passion automobile avant d’enchaîner en Suisse le mois prochain avec le salon de Genève, le rendez-vous des supercars modernes.
Le gratin des collectionneurs mondiaux faisant le voyage, les maisons de vente se greffent dans le calendrier et nous offrent des plateaux toujours réjouissants, même lorsque les moyens financiers ne sont pas là. Si Artcurial opère directement au sein du salon, Bonhams et RM Sotheby’s investissent deux monuments très parisiens : le Grand Palais et l’hôtel des Invalides. Chacune conserve sa spécificité. Bonhams propose un plateau fourni, quelques pépites et des autos plus accessibles dans un décor grandiose. RM nous gratifie tous les ans d’une concentration incroyable de voitures plutôt modernes, se concentrant sur les 30 dernières années. Artcurial, dans un désordre dû à l’étroitesse du lieu, nous habitue désormais à un ou deux lots d’exception. Rappelons-nous la collection Baillon, la Ferrari 335S (record absolu d’une enchère en euro), la Ferrari 166 Spyder Corsa ou le prototype Dino des collections du Mans.
2018 n’aura pas permis de remettre en cause ces grandes règles. Retour en image sur quelques lots qui ont attiré notre attention. Evidemment, il y en avait beaucoup d’autres…
Commençons par RM Sotheby’s et ses supercars. La vente record de la soirée a été assurée par la Bugatti Chiron. Une livrée assez classique et un carnet de commande toujours ouvert n’ont pas suffit à son nouveau propriétaire : il lui fallait la Chiron tout de suite. Pour cela, il a déboursé 3 323 750€ auxquels il faudra probablement ajouter 20% de TVA pour se l’offrir. En aparté, avoir pu tourner autour pendant de longues minutes me font réviser ma position sur cette auto. Ce n’est certes pas la plus belle mais elle est plus charismatique que la Veyron et la qualité de finition est ahurissante (ce n’est pas nouveau mais toujours aussi bluffant). En revanche, sa copine McLaren P1 MSO n’a pas trouvé preneur malgré une enchère haute au delà de 1,5M€. Il faut croire que le vendeur avait calé son prix de réserve dans la fourchette basse de l’estimation à 1,7M€. Pas de prix minimal pour la Maserati MC12, elle est donc bien partie mais en dessous de l’estimation basse à à peine plus de 2M€. Les supercars récentes restent chères mais en partent pas à n’importe quel prix. Une production très limitée à 50 exemplaires ou une personnalisation de plutôt bon goût ne suffisent plus à battre les records.
Les trois autres stars de la vente restent aussi sur le carreau. La Ferrari 275 GTB alu, l’Iso Grifo A3/C ex Johnny et la 166 MM Spider ont toutes échoué à faire tomber le marteau. C’est finalement la discrète mais élégante BMW 507 qui a signé un gros score avec 1 776 875€ malgré une probable restauration à entreprendre. La belle histoire de cette automobile, 40 ans dans la même famille, utilisée sans interruption depuis sa livraison et entretenue par un seul et unique mécanicien a pu en attendrir plus d’un.
Pour finir, la rarissime Porsche 993 Turbo Cabriolet (il y n’en existe que 14, rappelons qu’une est déjà passée sous le marteau de RM Sotheby’s l’an dernier à Paris) a été vendue pour 680 000€. Largement justifié compte tenu du caractère exceptionnel de l’auto.
Moins de lots nous ayant titillé chez Bonhams, le clou du spectacle ayant été assuré par la présentation surprise de la star de la vente qui se déroulera dans le cadre du Goodwood Festival of Speed dans quelques mois : l’Aston Martin DB4 GT Zagato “2VEV”. On vous a déjà proposé un historique rapide des collaborations anglo-italiennes, la DB4 n’est pas la moindre : une ligne à couper le souffle, une concurrence frontale avec la Ferrari 250 GT SWB (largement perdue, il faut dire…) et seulement 19 exemplaires. Bonhams annonce un probable record pour une voiture britannique vendue en Europe. Rappelons que la voiture anglaise la plus chère de tous les temps est une Aston Martin DBR1 vendu 22,6M de dollars l’an dernier aux USA. Nous n’irons pas aussi haut mais le marteau risque bien de s’affoler.
Du côté des lots proposés sous la majestueuse coupole du Grand Palais, la très belle Lamborghini Miura P400S est repartie invendue, un prix de réserve peut être un peu trop gourmand pour cet exemplaire très classique. Sa descendante Countach LP400 “Periscopio”, la plus pure de la lignée, a été adjugée 638 250€. 157 exemplaires seulement, 2 propriétaires méticuleux, de quoi justifier un prix coquet.
Beaucoup moins cher, la Mercedes E36 AMG était le coup de coeur de notre ami Ancelin : il aurait peut être pu se l’offrir pour 54 050€. Régis a eu le nez encore plus creux avec la discrète E500 adjugée 28 750€ seulement. Plus brutale, la Delta S4 Groupe B est restée sur le carreau. Une estimation au delà du demi-million pour une voiture inutilisable et pas encore star des concours d’élégance était peut être un peu exagérée.
La Mercedes 300 SL mise au spécifications SLS, invendue à Chantilly l’an dernier est partie quant à elle à 632 000€ soit nettement moins que la cote actuelle d’une 300 SL “normale”. Au-then-ti-ci-té ! Le marché ne veut que cela en ce moment et c’est tant mieux ! Absente des coups de coeur, cette Diablo VT Roadster à la spécification remarquable ne l’était peut être pas assez, invendue également. Même sort pour la Porsche 911 Carrera RS 2,7 en version Touring, estimée entre 650 et 850 000€.
Enfin, terminons par Artcurial et une densité de lot hors du commun assez extraordinaire :
La déception était palpable dans le court communiqué du 25 février : la Ferrari 275P de la collection Baillon a été retirée de la vente par les héritiers au dernier moment. Châssis vainqueur au Mans, la dernière Ferrari d’usine à avoir eu cet honneur, Artcurial, sans le dire ouvertement, avait forcement en tête le record absolu de prix pour une voiture mise aux enchères. Nous n’avons pas eu l’honneur d’approcher cette voiture historique et espérons que les “procédures en cours dans le cadre de la succession” permettent à la 275P de faire un retour triomphal pour l’édition 2019…
Il ne faudrait pas que cette nouvelle vienne ternir la qualité exceptionnelle des autres lots. Chez Ferrari, cette 250 GT cabriolet Pininfarina Série I (la plus rare), est restée invendue. Un modèle qui n’a pourtant pour seul défaut d’être quasiment contemporain de la très sportive version California qui lui vole la vedette depuis toujours ! Probable déception du côté d’Artcurial, il s’agissait en effet du plus gros lot des 3 ventes parisiennes après le retrait de la 275P. Le cheval cabré fait aussi du moderne avec une Enzo à la configuration traditionnelle mais invendue… les cédants sont décidément trop gourmands lorsqu’il s’agit de gros lots. Thomas, elle était à toi si tu le voulais 😉 La version piste, non homologuée, FXX est quant à elle partie pour 2 674 400€. Utilisable uniquement sur circuit lors des événements organisés par la marque, elle pourrait aussi aller simplement garnir une collection privée pour le seul plaisir de la possession et des yeux. Artcurial a longuement insisté sur son caractère quasi-neuf : 97km au compteur, une sixième vitesse jamais engagée… je ne comprendrai décidément jamais ceux qui spéculent sur de telles machines sans une seule once de passion.
La Citroën DS 21 Palm Beach estimée entre 400 et 600 000 euros (!!) n’a pas trouvé preneur tout comme la sublime Aston Martin DB4 série V (la toute dernière, celle qui ressemble trait pour trait à la DB5 de notre agent secret préféré). Une des grandes vedettes de la vente avec la Maserati A6GSC/53 Spyder à 2 445 600€ n’a pas trop déçu, bien que sous son estimation initiale comme de nombreux lots des trois maisons. La version carrossée en coupé est quant à elle restée sans enchère suffisante pour changer de main.
Artucurial réalise tout de même un beau coup avec le record du monde pour une Bugatti Type 57 Atalante à 2 903 200€, la version la plus désirable de la 57 si on occulte la SC Atlantic qui trône seule tout la haut. Beau coup également pour la Porsche 904 GTS qui avait l’honneur de la couverture de la vente à 1 873 600€.
On finit par une petite française bien de chez nous, une Renault Clio partie à plus de 41 000€. Cher? Un peu peut être mais il s’agit d’une version Williams, encensée depuis plus de 20 ans par la critique auto pour son caractère, châssis #001 livré à Bernard Dudot. Un pedigree qui explique probablement le prix payé.
Evidemment, bien d’autres lots ont trouvé preneurs la semaine dernière, cette sélection toute personnelle s’arrête ici. N’hésitez pas à nous faire part de vos propres coups de coeur durant cette car week parisienne !
Crédit photos : Bonhams, RM Sotheby’s, Artcurial, Thomas, D., Ugo Missana, Pierre Clémence