Moteurs essence : l’injection directe (2/2)

Après avoir parlé de l’injection indirecte (si vous l’avez loupé c’est par ici), nous nous penchons aujourd’hui sur l’injection directe, toujours pour les moteurs essence.

Moteur Mercedes M270 (Mondial de l’Auto)

Pour information, sachez que le premier véhicule de série à avoir été équipé d’un moteur essence à injection directe est la Mercedes 300SL (W198) de 1954 :

Revenons aux inconvénients de l’injection indirecte :

formation d’un film liquide dans les conduits d’admission qui conduit à des difficultés de maitrise de la quantité de carburant présente dans le cylinder et donc à une augmentation de la consommation

– pas ou peu la possibilité de réaliser un balayage des gaz issus de la combustion par de l’air frais

– pas la possibilité de réaliser un mélange stratifié

L’injection directe permet, comme son nom l’indique plutôt bien, d’injecter directement le carburant dans la chambre de combustion :

Injection directe latérale (elle peut aussi être centrale)

 L’injection directe permet une maitrise quasi-totale de la quantité de carburant introduite dans la chambre de combustion. Elle peut avoir lieu en une seule fois (mono-injection) ou en plusieurs fois (multi-injection), pendant la phase d’admission ou pendant la phase de compression.

Quels sont ses points forts ?

pas de film liquide dans les conduits d’admission (évident)

– comme on a beaucoup de liberté sur l’instant d’injection, on peut dérouler la phase de balayage  pour vider correctement la chambre de combustion des gaz brûlés et ensuite injecter

– il permet de fonctionner en mélange pauvre dans la chambre de combustion. Un mélange pauvre correspond à un mélange air-carburant dans lequel la masse d’air est supérieure à la masse d’air nécessaire pour brûler la masse de carburant. En gros, on a plus d’air dans la chambre qu’il n’en faut.

Comme vous le savez peut-être, un moteur Diesel repose sur ce fonctionnement : on admet une certaine quantité d’air (quasiment toujours la même), on comprime cet air puis on injecte une certaine quantité de carburant (en fonction du point de fonctionnement et de la demande du conducteur) qui va s’auto-enflammer et produire du travail.

Le gros inconvénient d’un moteur essence “conventionnel” est qu’il fonctionne avec un mélange autour de la richesse 1 (la masse d’air exacte nécessaire pour brûler une certaine masse de carburant). Pour obtenir cette masse d’air, on est obligé de boucher l’admission par un fameux papillon que vous connaissez tous. Ce papillon est en parti responsable de la consommation élevée d’un moteur essence.

L’un des objectifs de l’injection directe est donc de pouvoir garder le papillon ouvert et d’injecter uniquement la quantité de carburant qui nous intéresse. En fait, l’objectif est de “confiner” cette quantité de carburant près de la bougie, afin d’avoir un mélange proche de la richesse 1 près de la bougie et uniquement de l’air ailleurs. On utilise une forte aérodynamique dans le cylindre et l’injection a lieu pendant la phase de compression : c’est ce qu’on appelle le mode stratifié. Ca ressemble un peu à ça :

Un fonctionnement de ce type permet donc des gains en consommation importants.

– autre avantage : lorsqu’il est injecté et en se vaporisant, le carburant absorbe des calories présentes dans l’air. En réduisant la température de l’air, on augmente sa densité et on autorise donc un meilleur remplissage du moteur. Mais surtout, on vient désensibiliser le moteur au cliquetis (auto-inflammation du carburant) et on peut donc se permettre d’augmenter son taux de compression. L’augmentation du taux de compression du moteur entraine une augmentation du rendement thermodynamique et donc c’est encore des gains en consommation 🙂

Malheureusement, l’injection directe a également des points faibles : 

– le fonctionnement en mode stratifié est très difficile à obtenir, notamment par les variations qui ont lieu d’un cycle à un autre et est très restreint : faibles régimes et faibles charges.

– le système de post-traitement des gaz d’échappement doit être adapté. En effet, en fonctionnement conventionnel (ou homogène), un moteur essence est dépollué par un catalyseur dit 3 voies. En oscillant autour d’une richesse de fonctionnement de 1, on vient traiter le CO, les HC et les NOx. Dans le cas d’un fonctionnement avec une richesse inférieure à 1, on ne peut plus traiter les NOx. Il faut donc les traiter par une autre façon : utilisation de l’EGR et/ou d’un système spécifique (NOx Trap, …). Ces solutions représentent un coût non négligeable.

– le fait d’injecter à haute pression dans la chambre de combustion peut avoir des conséquences qu’on n’a pas en injection indirecte. On peut par exemple venir “arroser” le piston ou la chemise, ce qui peut engendrer la formation de particules et/ou la dégradation de la qualité de l’huile moteur.

– l’injection directe s’accompagne d’une dégradation de l’homogénéité du mélange, même si on fonctionne en mode “homogène” (non stratifié) et augmente donc le risque de formation de particules.

– un coût plus élevé que l’injection indirecte (injecteurs + pompe et rail haute pression)

Etant donné la difficulté à fonctionner en mode stratifié, certains constructeurs font le choix de concevoir des moteurs essence à injection directe qui n’utilisent pas ce type de fonctionnement, notamment en raison du mauvais rapport “gain en consommation/coût supplémentaire” dû à ce type de fonctionnement. Les moteurs en question ont donc les avantages que j’ai mentionnés précédemment mais fonctionnent avec un mélange homogène dans la chambre de combustion.

En bilan, on peut dire que l’injection directe dans les moteurs Essence est un gros pas en avant pour la réduction de la consommation de carburant, surtout si elle est associée à un système de suralimentation. Elle a cependant quelques inconvénients qui font que ce n’est pas la solution ultime. Certains constructeurs notamment Toyota ou Audi font le choix d’adopter un double système d’injection (indirecte + directe) de façon à cumuler les avantages des deux systèmes en fonction du type de fonctionnement : 

 

  Crédits illustrations : blog.motorlegend.com / tpe.villaro-dixon.eu / histomobile.com / Audi

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