Toujours aussi anticonformiste sur le créneau des berlines premium, la Lexus IS 300h s’est refait une beauté. Ça valait donc bien un nouvel essai.
Si l’être humain était rationnel et prévisible, les psychanalystes seraient au chômage. Je vous dit ça parce sortant d’une belle série d’essais très orientés sur le plaisir de conduite (pour rappel, la Nissan GT-R ici, la Mazda MX-5 là et la 208 GTI by Peugeot Sport ici), vous risquez de penser que de se retrouver au volant d’une voiture hybride, c’est prendre le risque de lui coller un bel enterrement de première classe !
Car on vient juste de dire que la puissance ne fait pas tout. Là, on a 223 ch en puissance cumulée, certes, mais la fameuse transmission par train épicycloïdal, qui a ses détracteurs : la Lexus peut donc ne pas convenir à tous les goûts. Et pourtant, quitte à détruire tout suspense, elle convient parfaitement aux miens, de goûts. Ce qui m’incite même à déclarer que peu de berlines sont aussi bien adaptées aux exigences du quotidien que cette Lexus IS 300h. Mais n’allons pas si vite en besogne.
Le jeu des 7 erreurs
Apparue en 2013 dans cette troisième génération codée XE30 (les historiens se souviennent de la première génération XE10, apparue en 1998 et qui était alors une Toyota Altezza rebadgée, de laquelle a été tirée une étonnante version hatchback à 5 portes, la SportCross, tandis que la seconde, la XE20, philosophiquement plus proche de notre modèle, est arrivée en 2005), la Lexus IS s’est distinguée par des lignes qui présentaient un bel équilibre entre sportivité, classe et élégance, tout cela concentré dans 4,68 m de long. Certes, les goûts et les couleurs, vous savez ce que c’est, mais l’IS est bien proportionnée et son style n’a pas vieilli. Et en plus, elle possède une identité bien affirmée qui lui permet de se distinguer parmi les autres berlines premium.
Du coup, la Lexus n’évolue qu’avec parcimonie en 2017 : on reconnaît la face avant plus agressive, notamment au niveau des entrées d’air en bas de la calandre, des optiques et du bouclier. A l’arrière, c’est encore plus subtil, avec un dessin des feux légèrement modifié (trois lignes de LEDs au lieu de deux). A l’intérieur, c’est pareil : on retrouve ses marques, puisque la console centrale est un peu amincie et que l’écran peut afficher la cartographie sur une surface plus large qu’auparavant, soit 10,3 pouces au lieu de 7.
Maintenant, partant du principe que, qui aime bien châtie bien, il faut reconnaître que Lexus aurait pu faire mieux. Pas au niveau de la ligne, qui me convient parfaitement, encore plus dans cette combinaison « bleu nuit métallisé » (en option à 1000 €) avec intérieur en cuir beige, très classe à mon goût, qui peut ne pas être le vôtre.
Pas non plus au niveau de la finition, puisque la qualité des matériaux et des assemblages soutient globalement la comparaison avec les références allemandes, d’autant que sur ce millésime 2017, il faut aussi noter quelques évolutions au niveau du revêtement du tableau de bord et des accoudoirs.
Par contre, et c’est dommage, il reste quelques éléments qui font vieillot dans cette Lexus, alors que c’est paradoxalement une auto très moderne. On passera sur l’absence d’affichage tête haute, ça, c’est moderne, mais la console centrale (notamment au niveau du système audio, digne d’une chaîne hifi – ou d’une Toyota Corolla – du début des années 90), ça craint vraiment et c’est indigne d’une telle auto. Idem pour le pavé tactile et l’ergonomie des commandes de l’infodivertissement, qui demandent du temps pour maîtriser la logique, l’intensité des impulsions. C’est simple : si on finit par s’y faire (quoique pas totalement), on fait aussi beaucoup mieux ailleurs. Par contre, la petite montre analogique, c’est classe.
Bon, c’est pas le tout de râler, faut aussi reconnaître les points positifs : un équipement complet ainsi qu’une super sellerie, grâce à laquelle j’ai trouvé rapidement une position de conduite parfaite. Et on note une place assez généreuse à l’arrière, pour deux personnes toutefois, à cause de l’imposant tunnel central.
La vie tranquille
Ne mélangeons pas tous les plaisirs automobiles. Il y a le plaisir du week-end, à condition de pouvoir accéder facilement à un biotope réceptif ; et il y a le plaisir de la semaine. La semaine, elle dépend bien évidemment de tout un chacun. Cependant, dans un pays urbanisé à plus de 80 %, il est des constantes. En ce qui me concerne, il n’est pas rare que mes activités m’obligent à me taper un demi-périphérique le matin et la même joie le soir.
On sait que dans ces circonstances, la Lexus IS 300h excelle. Mais la réduire à cet exercice est la meilleure occasion de ne pas découvrir ses autres qualités. Il se trouve que dans le cadre de cet essai, j’ai du à la fois me rendre dans l’Oise par les petites routes puis sur le magnifique circuit de Dijon-Prenois, ce qui a permis de varier les usages. Au quotidien, la IS 300h est juste magistrale : c’est comme une Prius IV, mais en mieux, car l’excédent de cylindrée et de puissance disponible permet d’optimiser le fonctionnement de la chaîne hybride et d’éviter la hantise des opposants au système : faire trop patiner le truc dans la semoule. Evidemment, cela requiert une compétence particulière : celle de ne pas conduire comme un bourrin, de savoir lire et anticiper le trafic, pour faire le plus de mode EV et de freinage régénératif possible. Auquel cas, on se retrouve méga zen au volant, commutant en silence, sans effort, profitant de l’excellente installation audio Mark & Levinson, ce qui permet de prêter peu attention aux transitions électrique / thermique, qui sont d’ailleurs peu perceptibles.
Et après quelques jours d’utilisation dans Paris, je m’en sors avec une consommation de 4,7 l/100. Remarquable !
Le cruising avant tout
Oui, on est bien installé dans les sièges. Oui, la direction est précise et directe (presque collante à basse vitesse), oui, le châssis est bien calibré et prend peu de roulis. La Lexus IS 300h est de la race des voitures destinées à ceux qui aiment conduire. Et pourtant, sa philosophie générale incite à la décontraction et au respect des limitations. En fait, elle a deux visages, que ce soit sur route et sur autoroute ; soit on roule cool, dans le respect des règles et des autres usagers, et dans ce cas on ne subit quasiment jamais les désagréments de la transmission si particulière des hybrides du groupe Toyota ; soit on a besoin de chevaux et alors, dans ce cas, mieux vaut se mettre en mode « sport » (l’affichage du tableau de bord change et un compte-tours apparaît), afin de bénéficier de toute la puissance dispo et de limiter le patinage. Là encore, la Lexus IS 300h ne se destine pas aux mous du bulbe. Il est toujours préférable de lire la route, d’autant que la réactivité des moteurs est nettement marquée, entre les modes « éco », « normal » et « sport ».
Du coup, sur route, sans chercher à faire d’excès, on ne subit pas le trafic, on cruise en silence et, sans me traîner grâce à un châssis bien calibré et peu de roulis, je sors une conso à 6,3 l/100. Remarquable, encore !
Le lendemain, sur l’autoroute vers Dijon, je constate que finalement, j’ai peu d’occasions de solliciter vraiment la puissance. Et lors du retour, avec Waze assez inquiet, je la joue profil bas. En même temps, après avoir joué à ça toute la journée :
Et libéré mon adrénaline dans des conditions sécurisées, je n’ai plus envie de faire des excès sur la route, même si le 0 à 100 couvert en 8,3 secondes permet de sortir des péages avec dignité. Du coup, un mode éco-conduite me fera enregistrer une conso de 6,8 l/100. Très correct… Et le confort reste une qualité marquante.
C’est ça qui me plaît dans cette Lexus. Sa ligne m’attire. Le feeling de ses commandes me parle. Et sa philosophie me calme, sans toutefois me frustrer. Son tout est tellement en phase avec les conditions de circulation actuelles.
Oui, sa transmission particulière patine à l’occasion dans la choucroute, et cela suffit pour en faire une machine rédhibitoire aux yeux de certains, même si l’insonorisation est excellente. Mais si vous êtes intelligent et zen (et un peu écolo, aussi), vous ferez fi de ce particularisme.
Du coup, je pense surtout aux cadres moyens-sup qui doivent choisir une voiture de fonction avec le diktat du C02, avec un budget allant de 40 à 50 k€, courant pour ce type de voitures. On note cependant que Lexus propose plein de versions (9 !) de sa IS 300h, à des tarifs débutant à partir de 40 490 €, et que passer d’une spécification à l’autre n’est pas super lisible mais pour avoir la totale, prenez donc la F-Sport Executive (59 990 €).
Réflexe pavlovien, le triumvirat allemand, avec des 2.0 Diesel performants mais manquant un rien de bonnes manières. Et c’est d’un banal !
Seconde alternative, pour les originaux : les Wannabe premium, Jaguar, Volvo, Infiniti. Et toujours le bruit du Diesel. En ce qui me concerne le choix serait vite fait : les consos d’un Diesel, le silence d’une essence, l’agrément au quotidien d’une hybride, une touche d’originalité en plus. C’est ça la troisième voie : vive la Lexus IS 300h !
Photos : Gabriel Lecouvreur & JPM (moto)