Enfin ! Après de multiples échecs, Charles s’est imposé à Monaco, dans les rues où il a grandi. Le Monégasque a devancé Oscar Piastri et Carlos Sainz. Max Verstappen a dû se contenter de la 6e place d’une course où tout s’est joué dans le premier tour. La sortie du drapeau rouge a en effet annihilé les stratégies de course avant même que celle-ci ait vraiment commencé.
A l’issue du GP de Monaco, 5 grandes questions peuvent se poser, auxquelles je vais tenter de répondre du mieux possible.
- Que retenir des accrochages du premier tour ? Victimes, coupables et conséquences.
- Monaco et la F1 sont-ils toujours compatibles ?
- Leclerc a-t-il vaincu la malédiction ?
- Que se passe-t-il chez Red Bull ?
- Les Championnats sont-ils relancés ?
Que retenir des accrochages du premier tour ? Victimes, coupables et conséquences.
Piastri/Sainz
Passons rapidement sur la touchette entre Piastri et Sainz à Sainte Dévote. C’est typiquement un incident de course du premier virage, et il n’a finalement pas eu de conséquences en raison du drapeau rouge. Si celui-ci n’avait pas été sorti, les conséquences auraient été bien plus lourdes pour l’Espagnol. Avec une crevaison il serait au mieux reparti en fin de peloton, ce qui est rédhibitoire à Monaco.
Magnussen/Perez (et Hülkenberg)
Le 2e accrochage, entre Kevin Magnussen et Sergio Perez, a été nettement plus spectaculaire, la monoplace du Mexicain étant réduite à la cellule de survie. Nico Hülkenberg, qui passait par là, a été une victime collatérale tandis que Zhou Guanyu, le seul pilote derrière les protagonistes, a été littéralement bloqué par les monoplaces détruites et les débris qui jonchaient la piste.
Si la direction de course n’a pas souhaité ouvrir d’enquête, on peut dire que le Danois a été pour le moins optimiste. Il a essayé de se faufiler à un endroit où il n’y avait clairement pas la place, surtout dans une ligne droite qui n’en est pas une. Checo gardant sa ligne devant, l’accrochage devenait inévitable dès lors que l’écart entre la Red Bull et le rail se resserrait. Aucun des deux pilotes ne fait d’erreur manifeste, mais chacun des deux aurait pu éviter le crash. Comme l’a dit Hülkenberg, cette lutte stérile n’était clairement pas nécessaire.
Gasly/Ocon
Le 3e accrochage est le seul qui a conduit à une pénalité. Le problème, c’est qu’il a mis aux prises 2 coéquipiers, en l’occurrence les 2 Français d’Alpine. Au virage du Portier juste avant l’entrée de l’emblématique tunnel du circuit de Monaco, Esteban Ocon s’est jeté à l’intérieur de Pierre Gasly mais a eu du mal à tourner. Déjà proche du rail à l’extérieur, Gasly ne pouvait rien faire pour éviter le contact et voyait avec effroi Ocon décoller sur sa roue avant.
Alors que les 2 pilotes avaient eu comme consigne lors du briefing d’avant-course d’être prudent pour assurer un maximum de points après la meilleure qualification de la saison, toute l’équipe Alpine a très mal vu la tentative d’Ocon. Bruno Famin, le boss, a promis une sanction en conséquence. Il y a même eu des rumeurs de remplacement pour le GP de Canada, mais elles ont été démenties. En fin de contrat à la fin de l’année, Ocon devra se montrer plus par ses performances que par son comportement. Il le fait d’ailleurs plutôt bien depuis le début de la saison. Mais attention à ne pas montrer une image qui peut être perçue comme contraire à l’esprit d’équipe.
Conséquences directes et indirectes
Les principales conséquences de ces accrochages sont évidemment les abandons (les Haas de Magnussen et Hülkenberg, Perez et Ocon). Mais aussi le drapeau rouge qui a offert à tous les autres pilotes la possibilité de changer de pneus. Un arrêt gratuit pour tous donc, et plus besoin de s’arrêter en gérant suffisamment bien les pneus.
Monaco et la F1 sont-ils toujours compatibles ?
Le débat revient tous les ans. Pourquoi revenir chaque dans les rues de Monaco où les dépassements sont quasiment impossibles ? On est même arrivé à une situation inédite dimanche dernier, avec un top 10 final identique à celui du départ. La faute en revient en partie au circuit, mais aussi aux circonstances. Si les dépassements sont difficiles, il est possible de prendre l’avantage sur un adversaire grâce à une bonne stratégie. Mais quand personne n’a l’obligation de s’arrêter pour changer de pneus, comme ce fut le cas ce dimanche, cette option n’existe plus. Max Verstappen et Lewis Hamilton ont bien tenté de faire un arrêt en profitant de l’écart avec leurs poursuivants, cela n’a rien changé puisque l’avantage qu’ils avaient sur George Russell, juste devant eux, n’a pas suffi pour pouvoir le déborder.
Pour autant, Monaco reste un incontournable, le GP le plus prestigieux de la Formule 1. Par son Histoire, par son cadre et par le spectacle incroyable qu’il offre en qualifications. Mais aussi par la tension qui persiste en course. Même quand rien ne se passe, il est impossible de prédire qu’il ne se passera rien au tour suivant. La moindre inattention peut envoyer n’importe quel pilote dans le rail, et par la même occasion provoquer la sortie d’une Safety Car qui relancera complètement la course.
Pour autant, il serait judicieux de trouver des solutions pour dynamiser la course, quitte à instaurer des règles spéciales pour Monaco. La F2 et la F3 le font bien en séparant la qualification en 2 groupes.
Leclerc a-t-il vaincu la malédiction à Monaco ?
Entre 2017 et 2021, Leclerc aura tout connu en Principauté. Un double abandon en F2, un troisième en 2018 pour sa première année en F1 chez Sauber, une qualification ratée pour sa première chez Ferrari en 2019, conclue par un nouvel abandon en tentant de remonter, l’annulation du GP en 2020, et le coup de grâce en 2021. Auteur de la pole position, il ne peut pas prendre le départ à cause d’un accident lors de son dernier tour de qualification.
En 2022, tout semble enfin tourner de son côté. Il réalise une nouvelle pole position et mène le début de course assez sereinement. Mais la pluie s’en mêle au tiers de la course et Ferrari s’emmêle les pinceaux. Leclerc s’arrête 2 fois à quelques tours d’intervalle et sort du podium. Il termine enfin mais la 4e place a un goût amer. En 2023, la Ferrari n’est pas dans le coup et Charles termine à une modeste 6e place.
Heureusement, Leclerc ne s’estimait pas maudit et croyait toujours en ses chances de s’imposer à domicile. C’est au terme d’un weekend parfaitement maîtrisé qu’il a enfin enfilé le costume de vainqueur de cette course si particulière. Pour tous les pilotes, et encore plus pour lui, le héros local.
Que se passe-t-il dans la famille Red Bull ?
Depuis quelques courses, tout est plus délicat chez Red Bull. Un rythme en deçà de celui des McLaren à Miami et Imola, et c’est désormais Ferrari qui se mêle à la bataille. Même Mercedes n’était pas si loin. Comme souvent à la même époque, Perez rentre ainsi dans le rang, enchaînant des qualifications décevantes qui compliquent sérieusement ses courses.
A l’inverse, chez la petite sœur Racing Bulls, on monte en puissance et Yuki Tsunoda aligne les performances solides. Au point de menacer le baquet de Checo. Le Japonais n’a jamais vraiment été considéré comme une alternative crédible, mais il s’affirme de plus en plus. A l’inverse, Daniel Ricciardo ne paraît plus être une option. S’il n’est pas ridicule, il est assez largement dominé par son coéquipier. Sauf gros retournement de situation, il ne reviendra pas chez Red Bull, et il paraît peu probable qu’il continue chez RB avec les jeunes qui frappent à la porte.
Une chose est quasiment certaine. Un départ de Max Verstappen en 2025 n’est plus à l’ordre du jour. Toto Wolff semble avoir renoncé à attirer le Néerlandais dans ses filets, Mercedes n’offrant pas assez de garanties en ce moment.
Les Championnats sont-ils relancés ?
C’est une évidence, Red Bull n’est plus aussi dominateur qu’en 2023. En 8 courses, Max Verstappen a été battu autant de fois que sur toute la saison dernière. Dans la lignée de sa progression phénoménale en 2023, McLaren a encore effectué des progrès significatifs depuis Miami. La monoplace papaye est probablement la meilleure F1 à l’heure actuelle. Même quand elle se pare de vert et jaune comme à Monaco. La Scuderia Ferrari n’est pas en reste et semble être revenue au niveau de ses adversaires.
Du côté des pilotes, McLaren comme Ferrari peuvent compter sur des duos solides. Les numéros 1 Norris et Leclerc sont quasiment irréprochables depuis le début de la saison. Oscar Piastri monte en puissance, même s’il lui reste encore quelques progrès à faire en gestion pneumatique, ce qui a été sans conséquence à Monaco. Quant à Carlos Sainz, il est égal à lui-même, assurant régulièrement les gros points même quand il est derrière son coéquipier, et capable de grosses performances comme à Melbourne en début de saison. A l’inverse, comme on l’a vu juste avant, Perez n’est d’aucune utilité à Verstappen dès lors que la Red Bull ne lui convient plus, comme cela semble être le cas depuis quelques courses.
Verstappen reste grand favori après Monaco
Pour autant, Red Bull et plus encore Max Verstappen sont loin d’être battus et ont 5 bonnes raisons d’y croire.
- Tout d’abord le Néerlandais dispose encore d’une petite marge (31 points), certes en baisse mais toujours supérieure à l’équivalent d’une victoire.
- Ensuite, Red Bull va aussi apporter des évolutions à sa RB20 à partir de Silverstone et pourrait reprendre l’avantage.
- Si Red Bull n’était pas la meilleure force sur les derniers circuits, rien ne dit que ce sera le cas partout. Le GP du Canada devrait déjà être nettement plus favorable.
- Paradoxalement, Verstappen peut bénéficier d’avoir 2 concurrents. Car ceux-ci vont se prendre des points mutuellement.
- Enfin, Red Bull dispose toujours d’un facteur X, Max Verstappen. Le Néerlandais peut s’imposer même sans avoir la meilleure monoplace, comme il l’a fait à Imola, et il dispose d’une grosse expérience dans la lutte au titre, quand ses adversaires seront des néophytes s’ils parviennent à l’accrocher jusqu’au bout.
Pour le Championnat Constructeurs, c’est en revanche très ouvert si Perez confirme ses difficultés.
Crédit photos : http://F1.com et F1tv.com
- 1931 : l’année de la dernière victoire d’un monégasque sur ses terres (Louis Chiron)… C’était 19 ans avant la création du Championnat du Monde de F1
- 250 : le nombre de pole positions de Ferrari (record)
- 24 : le nombre de pole positions de Charles Leclerc (record pour un non-Champion du monde)
- 8 : la série de pole positions de Max Verstappen s’est arrêtée (record d’Ayrton Senna en 1988-1989 égalée)
- 6 : le nombre de victoires de Charles Leclerc