Porsche 919 Hybrid Evo à Spa : retour sur un record

1 minute, 41 secondes et 770 millièmes pour parcourir les 7,004 km du toboggan des Ardennes, qui dit mieux ? Personne, pas même la redoutable Mercedes W07 de Lewis Hamilton. Mais comment est-ce possible ? Ce temps stratosphérique est l’œuvre de la Porsche 919 Hybrid Evo.

919 Hybrid ? Evo ? Porsche s’est en effet brutalement retiré du circuit en fin d’année 2017, laissant derrière elle 3 victoires de rang aux 24h du Mans et autant de titres en World Endurance Championship, le WEC si vous préférez. Mais la marque n’en a pas pour autant fini avec sa voiture et s’est engagée dans une course au record qui ne manque pas d’intérêt.

La philosophie de l’équipe est claire : se libérer du carcan de la réglementation WEC sur deux sujets majeurs.

Le premier aura été un travail aérodynamique poussé. L’aileron arrière est entièrement nouveau et nettement plus imposant. Il est équilibré par un diffuseur avant totalement repensé. Tous deux bénéficient d’un système actif de réduction de la traînée. Le bord de fuite du diffuseur avant est coupé par un système hydraulique qui ouvre également un espace entre la lame principale et l’aileron annexe à l’arrière. Sous la voiture, ce sont les ailettes directrices et le fond plat qui ont été optimisés. L’appui gagne 53% au total.

Le second porte sur un domaine moins visible mais primordial dans le règlement FIA/WEC : les limitations énergétiques. Il faut tout d’abord noter que l’ensemble moteur thermique / moteur électrique a été conservé en l’état. Le V4 d’une cylindrée de 2 litres et la récupération d’énergie via le freinage et les gaz d’échappement ne bougent pas. Le V4 entraîne toujours les roues arrières, le moteur électrique les roues avant : oui, les LMP1 sont plus 4×4 que tous ces SUV à 2 roues motrices… En revanche, plus de limite de consommation : au lieu de brûler 2,464 litres d’essence par tour au maximum, on peut ici consommer autant que l’on veut. Une programmation différente du logiciel d’exploitation du bloc propulseur et ce sont 220 chevaux qui s’ajoutent aux 500 habituels. L’essence reste la même. Au lieu des 6,77 mégajoules pour le moteur électrique, ce sont 8,49 qui furent à la disposition du pilote pour améliorer la relance en sortie de virage. De 900 ch, on passe donc à un total de 1160 ch !

Évidemment, le poids a aussi été réduit par la suppression de tout ce qui n’est pas utile à une tentative d’un tour vs une course d’endurance : exit la climatisation, l’essuie-glace, les capteurs, les mouchards du contrôle de course, l’éclairage… 39 kg de gagnés. Michelin a développé une gomme spécifique pour la voiture, de même dimension que celle réglementaire mais apte à supporter l’appui et la puissance supplémentaire. Les suspensions ont été renforcées dans le même but.

Le temps dûment enregistré est donc inférieur d’un peu plus de 7 dixièmes à la pôle position de F1 en 2017 mais surtout 12 secondes plus rapide que le WEC cette même année ! 359 km/h en pointe, un moyenne de 245,61 km/h sur le tour. Alors vous me direz que tout ceci ne sert à rien puisque la voiture ne pourra pas être comparée. Ce n’est pas tout à fait faux. Gageons toutefois que les travaux effectués dans cette quête de la performance trouveront un jour un débouché en course voire sur route. Ah oui, cela fait aussi un peu de pub qualitative ce qui n’est sans doute pas négligeable pour Porsche.

Cela montre également l’immense influence du règlement sur la performance d’une voiture qui n’a finalement pas connu tant de modifications mécaniques que cela. La limitation de la consommation est dans l’air du temps et tout le monde doit s’y adapter, parfois un peu contraint et forcé par le mouvement de fond. Faire sauter la limite permet en quelque sorte un retour à la source du sport automobile : aller le plus vite possible.

Et si finalement polémique il y a (il y a toujours polémique…), n’oublions pas qu’à la fin des années 90, une Mercedes CLK GTR répondant au règlement se qualifiait en milieu de grille de la F1 contemporaine. Les sports proto et GT1 n’ont pas l’aura de la Formule 1 mais ont régulièrement montré que d’autres concepts auraient pu prétendre au titre de discipline reine du sport auto. Alors que se murmure un retour des vraies GT1 d’ici quelques années, souhaitons que ce record permette au WEC de retrouver la noblesse de son ancêtre des années 60.

La 919 Hybrid Evo sera en tournée cette année : 12 mai au Nürburgring pour les 24h, 12 juillet à Goodwood pour le FoS, 2 septembre à Brands Hatch pour le Festival Porsche et enfin le 26 septembre à Laguna Seca. A vos agendas.

Crédits photos : Porsche

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