Essai : Toyota Land Cruiser V6 4.0 : pour gentlemen farmer

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Le 4×4 préféré des fermiers et des propriétaires de chevaux se refait une beauté. Et renoue avec le gros moteur essence, pour notre plaisir…

Chez les pratiquants de la religion du 4×4, le vrai, il y a la Sainte Trinité : Jeep Wrangler, Land Rover Defender et, bien sûr, Toyota Land Cruiser. Si les deux premiers sont des icônes, le troisième fait tout de même figure d’institution.

D’ailleurs, inutile de chercher plus loin : le Land Cruiser est le véhicule produit de manière continue depuis le plus longtemps par Toyota, bien devant la Corolla (qui elle, est la série la plus vendue du constructeur japonais). Depuis 1951 (certes produit à 90 unités cette année-là, initialement suite à une demande du gouvernement US qui avait besoin de véhicules pour la guerre de Corée), ce 4×4 inspiré de la Jeep a su évoluer pour devenir une référence chez une large catégorie d’utilisateurs.

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Extrêmement courante chez les ONG dans les pays en développement, dans leur version d’entrée de gamme et toujours peinte en blanc, le Land Cruiser sait aussi se montrer plus cosy, au point de s’imposer comme le choix naturel pour une catégorie d’acheteurs assez classique et conventionnelle, du genre propriétaires terriens, grands fermiers, amateurs de chevaux, etc… Au cours de son histoire, (et voici donc une nouvelle série : apprends des choses étonnantes et fait étalage de ta culture automobile lors d’un prochain barbecue grâce au blogautomobile.fr), le Land Cruiser s’est subdivisé en 2 familles bien distinctes. La version originelle a évolué pour donner à un instant le BJ & FJ40 (produit de 1960 à 1984) dont la cote commence à atteindre des sommets dans les ventes aux enchères, la maison Bonhams ayant réussi à vendre un beau FJ 85 319 € ( !) lors d’une récente vente en Floride.

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(on a le droit de trouver que 85 000 € pour une institution comme celle-là, c’est beaucoup…)

La série 70 est quant à elle apparue en 1984 et le modèle dont nous parlons aujourd’hui en descend directement et porte même le nom de Prado sur certains marchés. Ceci constitue la famille, disons plus « professionnelle ».

Parallèlement, Toyota a développé une série de Land Cruiser toujours extrêmement capables en tout-terrain, mais plus orienté « confort et prestige ». Cette famille a commencé avec le J50 en 1967 et existe aujourd’hui sous le nom de la série 200, qui possède sous le capot des V8 Diesel et essence selon les marchés, voire qui peut même servir de base à un vaisseau amiral de chez Lexus, le LX570 avec son V8 5.7 de 383 ch.

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(l’engin parfait pour la Desperate Housewife qui doit sortir les kids de Wisteria Lane)

Remise à jour

Mais revenons à notre Land Cruiser. Oh, parler de « nouveauté » ou de révolution serait pousser la flagornerie aux frontières du mensonge, car sa génération est arrivée en 2002, a été une première fois retouchée en 2009 puis à nouveau récemment. Comment le reconnaître ? C’est simple : toujours aussi cubique (il fait 1,84 m de haut pour 1,88 m de large) il est un peu plus joufflu au niveau des passages de roue et possède des feux à LEDs qui lui changent le regard.

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Sous le capot, ça change plus profondément. Le précédent bloc Diesel de 3.0 laisse la place à un nouveau 2.8, toujours en 4 cylindres, mais dont les émissions sonores au ralenti ont nettement baissé. Curieusement, il est moins puissant (177 ch au lieu de 190), mais possède plus de couple (450 Nm à 1600 tr/mn au lieu de 420, au même régime). De fait, sa conso officielle mixte descend de 8,1 à 7,4 l/100 et, lorsqu’il se dote d’une boîte auto, celle-ci comporte 6 rapports et non plus 5.

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Autre nouveauté : le retour du moteur essence. Et pas des moindres, puisqu’il s’agit d’un V6 de 4.0. En fait, c’est plus un retour qu’une nouveauté, car ce bloc, présenté au milieu des années 2000, a constamment été remis à niveau. Pour la petite histoire (et voici la rubrique « je vous raconte ma life, dont vous n’avez légitimement rien à faire, mais tant pis »), c’est un moteur que je connais fort bien puisque j’ai, lors de mes jeunes années africaines, eu en voiture de fonction deux pick-up Hi-Lux double cab en V6 4.0, un blanc en boîte auto 5 rapports, et un bleu en BVM à 5 rapports aussi. Donc, si ce moteur date un peu, il a quand même évolué : des 231 ch de 2005 (à l’époque, il s’agissait d’un record chez les pick up japonais à tendance utilitaire puisque l’on utilisait encore des V6 3.0 d’environ 170 ch chez Nissan et Mitsubishi et le Toy n’était pas seulement le must have pour se la pêter dans le bushveld, il offrait aussi des qualités routières incomparablement supérieures à ses rivaux) aux 250 ch du Land Cruiser de 2009, on passe maintenant à 280 ch à 5600 tr/mn, assortis d’un couple de 387 Nm au régime plutôt élevé de 4400 tr/mn.

280 ch, ça commence à causer ; et la boîte auto, seule transmission disponible, compte désormais 6 rapports. Évidemment, une telle mécanique n’est plus tellement dans l’air du temps – et c’est pour ça qu’on l’aime bien, car l’air du temps a quelque chose de gonflant. Avec une conso officielle mixte de 10,6 l/100, il crache 248 grammes de CO2 et se prend direct 8000 € de malus dans les dents. Autant dire que vous n’en croiserez pas à chaque coin de rue.

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Le charme discret de la bourgeoisie

Si le Land Cruiser est disponible en 3 portes avec le Diesel de 177 ch à partir de 37000 €, le V6 n’est dispo qu’en 5 portes et en finition haute. Soit à partir de 61 850 € en Lounge et 68 250 € pour notre Lounge Pack Techno ; soit, si vous voulez absolument un Land 5 portes, 30 000 € de plus que le Diesel en finition de base (à 39 700 €). Notre engin est donc réservé à une certaine élite.

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Évidemment, à ce prix-là, on est en droit d’en attendre beaucoup. Et la bonne surprise commence dès l’ouverture de la porte, avec un intérieur en cuir beige du plus bel effet, ainsi que de solides placages en bois (ou peut-être en Plastiwood® mais alors vraiment bien imité, car ça sonne bien au toucher…) sur le volant, la console centrale, le pommeau de levier de vitesse et même les consoles de porte. Tout ceci délivre un aspect cossu, pas trop clinquant, on sent que c’est fait pour durer, un peu à l’image de l’auto. Bref, autant dire que l’on se sent bien dans cet intérieur et que les heures de route n’affectent pas le confort des sièges.

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La console centrale doit certainement faire rire les ergonomes qui ont travaillé sur le Volvo XC90, car elle est massive (et Toyota valorise son patrimoine avec un affichage de l’heure, au centre du panneau de clim, avec les mêmes LCD que l’on trouvait déjà sur les Corolla de la fin des années 80…), mais ce qui compte, c’est qu’elle soit complète et finalement assez facile à l’usage. Mention spéciale pour l’audio JBL, qui sonne plutôt bien…

D’autant plus que le Land Cruiser V6 est assez silencieux ; plus que ça, c’est même une de ses qualités, avec une bonne maîtrise des bruits aéro, ce qui est remarquable vu son Cx de parpaing. Certes, au démarrage, le 4.0 s’ébroue et tient un ralenti assez haut, dans le chuintement de multiples pompes et compresseurs. Pas très discret. Mais ensuite, il s’ébroue dans un feulement assez sourd et finalement peu sonore, identique à celui que j’avais dans mon Hi-Lux de 2005. D’autant que la transmission est du même acabit : placide.

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Que les chiffres ne vous induisent pas en erreur : 6 cylindres, oui, 4 litres, certes, 280 chevaux, bien sûr, mais ce Land Cruiser n’a rien de commun avec, disons, un BMW X5 30i ou même un Volvo XC90 T6 (essayé : ici). En cause : une double inertie, venant à la fois du châssis et de la boîte de vitesse. Mais cette inertie n’est pas rédhibitoire : elle constitue un trait de caractère.

Son caractère, c’est la force tranquille : d’abord parce que la boîte tire long, trèèèès long : 1300 tr/mn à 90 km/h sur le dernier rapport en Drive, 2000 tr/mn à 130 km/h. Avec une zone rouge à 6000 tr/mn et une vitesse maxi limitée électroniquement à 180 km/h, je vous laisse calculer vous-même la pertinence de la démultiplication.

Dans les faits, et en mode Drive, le Land Cruiser V6 passe les rapports assez tôt, aux environs de 2000 / 2200 tr/mn et, effectivement, la boîte de vitesse engendre un peu trop de patinage. À moins de le contraindre en enfonçant plus vigoureusement l’accélérateur, ce qui génère, d’abord, un peu plus de patinage, puis un kick-down qui va faire passer le régime au-delà de 3000 tr/mn. Le meilleur reste à venir : à 4000, la sonorité devient plus métallique et le V6 grimpe alors vers la zone rouge dans une vivacité que l’on ne lui soupçonnait pas. Pas de doutes, les 280 ch sont là et l’accélération est objectivement nettement plus soutenue qu’avec mon vieil Hi-Lux de 231 ch.

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Pour jouer un peu plus, on peut mettre la boîte en mode sport : le régime monte alors un peu plus entre chaque passage de rapport et l’électronique limite la boîte en 4, histoire d’éviter les deux autres et leurs démultiplications longuettes. Néanmoins, s’obstiner à faire travailler le Land Cruiser de cette manière est un peu contre nature. D’autant qu’avec ses 2070 kilos posés sur ses pneus à flanc haut (265/65 X 18) et conçu pour les croisements de pont, il traîne un peu ses trains roulants comme des haltères sur les petites bosses, même s’il fait preuve d’un confort remarquable sur les ondulations plus souples. Et même avec la suspension en mode sport, on constate un peu de roulis à bord.

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C’est que le Land Cruiser est avant tout un vrai 4×4, pas un frimeur des beaux quartiers qui cherche à se donner un genre. La console centrale indique la couleur : suspension pneumatique avec hauteur de caisse variable, fonction « crawl » (vous sélectionnez une vitesse au régulateur, faible, la vitesse), et vous n’avez qu’à vous occuper de la direction : idéal pour franchir un pierrier à 6 km/h), contrôle de descente (il peut descendre des pentes de 42°), gamme de vitesses courtes, blocage du différentiel central ou arrière : pas grand chose ne devrait l’arrêter. Il possède, comme les Range Rover, une sorte de « Terrain Select », qui permet de choisir entre les cailloux, la boue, le sable ou la neige, et d’avoir un engin qui répond au mieux selon les conditions. L’angle d’attaque ou de dévers (il peut là aussi encaisser 42°, pas à recommander aux estomacs sensibles !) peut s’afficher au tableau de bord et les 4 caméras envoient 6 images pour manœuvrer au mieux le Land dans des environnements exigus. On comprend pourquoi on en trouve plus à la campagne que dans les banlieues chic, garé entre un Porsche Macan et un Audi Q7, qui valent pourtant le même prix…

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Le Land Cruiser new gen soigne pourtant l’agrément à bord, avec un nouvel infotainment « Toyota Touch & Go Touch 2 » qui dispose du Bluetooth®, d’une reconnaissance vocale, d’une cartographie 3D, ainsi que d’une caméra de recul, bien pratique pour garer ses 4,76 m dans Paris. Ou ailleurs.

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Et sur la route, on peut compter sur le régulateur de vitesse adaptatif, tandis qu’au quotidien, ses aspects pratiques peuvent faire mouche : coffre pouvant aller jusque 1950 litres, présence d’une prise 220 V dans le coffre, boîte à outils dans la porte, dont la vitre peut s’ouvrir, capacité de remorquage de 3 tonnes avec contrôle de stabilité de la remorque (c’est Jolly Jumper, qui va être content)… Si vous cherchez un outil, il a du répondant…

Alors oui, sa conception de 4×4 à l’ancienne peut faire sourire ceux qui cherchent avant tout du dynamisme. Mais le Land Cruiser n’est pas fait pour cela. Il reste fidèle à sa vocation, tout en se modernisant côté équipement et en faisant un gros pas en avant en termes de confort.

Et surtout, il a ce petit plus qui saura parler à ceux qui ont la sensibilité appropriée : une forme d’efficacité tranquille et de sérénité inébranlable qui font que les grands trajets à son volant, même à allure raisonnable, deviennent des moments de plaisir.

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Un instant, dans une longue ligne droite, une boule de feu à l’horizon irradiant des champs de blé dont la blondeur semblait tutoyer l’infini, le coude à la portière, la boîte auto sur Drive et le régime moteur à un petit 2000 tr/mn, je me suis laissé à penser que je m’achèterai bien une ferme et des chevaux. Alors que jusque là, les chevaux, je les voyais plutôt sous le capot.

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Vous allez vous dire que le premier passage à la pompe allait me rappeler à la réalité, et qu’elle pique un peu, la réalité ! Un bon gros 4×4 à l’ancienne avec un V6 auto, ça doit tuter autant que l’Amoco Cadiz ! Et là, aussi, la surprise fut plutôt bonne : alors qu’il est donné pour 10,6 l/100 en conso officielle mixte, je m’en sors avec un 13,7 l/100 de moyenne avec une bonne partie d’autoroute et de ville, en ayant réussi à descendre à 11 l/100 sur route départementale, tranquille. Ça peut paraître beaucoup, mais avec mes vieux Hi-Lux et leurs 50 ch de moins, c’était jamais moins de 14 avec la BVA et impossible de faire moins de 12 avec la BVM. Morale de l’histoire : le Land Cruiser a bien progressé à tous les niveaux.

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Photos : Benoît Meulin (© Blue Door Prod)

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