Prise en main, Volvo drive-E : quatre cylindres ça suffit ?

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En pleine transition stylistique et marketing la marque suédoise est sous le feu des projecteurs depuis quelques semaines. Rachetée à Ford par le chinois Geely il y a 4 ans la marque dévoile progressivement son nouveau visage et sa nouvelle stratégie au grand public. Cela passe par la présentation au Mondial d’un nouveau et très remarqué XC90, par la volonté affichée d’en découdre directement avec les stars germaniques du marché premium et par un renouvellement complet de l’offre moteur autour d’une seule et unique architecture : le quatre cylindres. C’est à l’essai de ces nouveaux blocs que Volvo nous a convié entre Lyon et Manigod, entre autoroute et haute montagne, de quoi jauger ces moteurs dans toutes les situations, ou presque…

Plus de brouzoufs et moins d’esbroufe ?

Onze milliards de dollars c’est une coquette somme vous en conviendrez. Et bien c’est la somme qu’a prévu d’investir Geely dans Volvo d’ici à 2016 et ce sont déjà près de huit milliards qui ont été débloqués. Dans quels buts ? Très simple, faire de Volvo une marque premium au niveau des références allemandes (en Suède et en Chine on préfèrera dire au dessus…), renouveler presque complètement la gamme mais également rester fidèle à des valeurs essentielles de l’esprit suédois : bien-être, sécurité, confort, plaisir de conduite et… « écologie ». Pour atteindre ces objectifs ambitieux le constructeur nordique s’est attaché à travailler plusieurs domaines essentiels à ses yeux. La qualité perçue des véhicules tout d’abord qui n’avait déjà rien de vraiment indigente mais qui si l’on en juge par le nouveau XC90 progresse sensiblement, la sécurité de ces mêmes véhicules ensuite, avec un objectif affiché de zéro mort dans une Volvo en 2020 et enfin des motorisations plus efficientes, plus cohérentes et surtout moins coûteuses.

Depuis un an déjà cette mue des moteurs positionnés sous les capots des Volvo (la gamme 60 en tout premier lieu) s’est amorcée et elle va se poursuivre en se généralisant dans les années qui viennent. Même s’ils sont encore vendus sur de nombreux marchés les blocs 5 et 6 cylindres du groupe vont disparaitre (oui les aficionados, je vous vois déjà hurler à la mort… Ahlala quel malheur ! Et non, vous ne vous en remettrez pas…) pour être intégralement remplacés par des 4 cylindres dont l’architecture modulaire baptisée VEA (pour Volvo Engine Architecture) permet sur cette base le développement d’une gamme complète de motorisation couvrant un très large spectre de puissance aussi bien en diesel qu’en essence.

Outre le principe du downsizing (tout relatif cependant puisque il s’agit tout de même d’une cylindrée de 2 litres, on trouve nettement plus petit ailleurs) c’est surtout celui de la rationalisation industrielle et de la volonté de réduire les rejets de C02 afin de répondre aux normes environnementales toujours plus drastiques qui ont présidé aux choix techniques entrepris pour ces blocs. Ainsi, si jusqu’à présent la marque disposait de huit architectures moteur différentes, elle n’en possèdera désormais plus qu’une. Inutile je pense de vous faire un long dessin sur ce que cela peut signifier en termes d’économie d’échelle. En jouant sur des niveaux de suralimentation les ingénieurs seront en mesure de proposer des blocs allant de 120 à 230 ch. en diesel et de 140 à plus de 300 ch. pour les essences. Et probablement beaucoup plus si l’on en croit les promesses faites par la présentation il y a quelques semaines d’une déclinaison – encore à l’état de prototype – du 4 cylindres à trois turbos affichant la bagatelle de 450 ch. ! Les nouveaux blocs ayant par ailleurs été conçus dès l’origine pour aisément accueillir les systèmes d’hybridation rechargeable, Volvo aura de quoi offrir selon Derek Crabb (vice président en charge de l’ingénierie groupes motopropulseurs) « des puissances qui n’auront rien à envier aux V8 »…

De biens belles promesses techniques et marketing mais en vrai ça donne quoi ?

Pour nous permettre de nous faire une idée un peu plus précise sur les capacités de ses nouveaux blocs motopropulseurs Volvo avait mis à notre disposition l’ensemble de sa gamme actuelle : V40, V40 Cross Country, S60, V60, XC60, S80, V70, et XC70. Les véhicules étaient pour la plupart équipés du moteur diesel D4 de 181 ou 190 ch. (cette puissance sera uniformisée, vers le haut, dès l’année prochaine) et seuls les V40 et XC60 étaient également proposés avec la déclinaison essence T5 de 245 ch. Impossible donc d’essayer tous ces véhicules sur une seule journée (ni même sur deux d’ailleurs, mais nous aurons sans doute d’autres occasions de le faire, hop le message est passé 😉 ) et comme nous vous avons déjà proposé à l’essai des véhicules de la marque scandinave (par ici ou par ici, ainsi que par ici), je me suis dirigé vers le XC60 et la S80 tous deux en motorisation D4 mais le premier en boite mécanique et le second en boite automatique et je vous propose donc ici un petit compte-rendu axé sur le ressenti de leur motorisation… mais pas que.

XC60 : Le SUV tranquille qui se conduit… tranquillement

Je n’ai pu m’empêcher à la rédaction de ce titre intermédiaire (et en fait déjà bien avant, au moment même de l’essai) de penser à Jean-Baptiste qui nous expliquait qu’il avait enfin compris ce que signifiait la notion de « conduite en bon père de famille » lors de son essai du XC70… Car si cette philosophie sied parfaitement au grand break baroudeur elle n’est pas loin d’aller également comme un gant à notre SUV suédois qui n’aime guère se faire chahuter mais qui par contre se montrera particulièrement prévenant à votre endroit, notamment en termes de confort et de bien être.

Agressivité sors de ce corps !

Le design du XC60 est déjà en soi un indice quant à sa philosophie profonde. On y retrouve des classiques du design suédois, notamment cet épaulement arrière généreux et marqué qui permet aux feux de se glisser sensuellement sur les contours de cette carrosserie, en l’épousant délicatement et en offrant une signature visuelle agréable et distinctive, ou encore une certaine massivité rassurante laissant subtilement deviner le caractère sécurisant de l’engin. Mais si l’on retrouve l’ADN des anciennes Volvo le tout a été légèrement latinisé, adouci et en même temps dynamisé ce qui fait qu’au final on se retrouve bien loin d’une 740 ou d’une 940 dessinées avec une équerre et un fil à plomb… et peut-être même du plomb tout court. Pour autant, et même si j’apprécie globalement le design du véhicule je ne peux m’empêcher sous certains angles, de profil notamment, de le trouver un peu mollasson et pataud et en tout cas particulièrement lisse (ce qui peut aussi être une qualité cela dit).

Quoi qu’il en soit ce XC60 est loin d’être désagréable à l’œil et il l’est encore plus quand on pénètre à l’intérieur.

Tellement mieux qu’un canapé Ikéa

L’habitacle de ce XC60 impressionne immédiatement. Il faut dire qu’il nous était ici proposé dans sa déclinaison Xénium, la finition la plus haute de la gamme, et, cerise sur le gâteau, il était en plus doté des petits détails de personnalisation du programme Inscription d’où ces magnifiques sièges en cuir fauve de belle qualité et particulièrement agréables tant en confort qu’en maintien, d’où également cette planche de bord recouverte de cuir aux surpiqûres contrastées du plus bel effet et d’où enfin ces inserts en bois véritable (du noyer… scandinave comme il se doit) très valorisants et très esthétiques.

Les compteurs entièrement numériques disposent de trois modes de présentation tous parfaitement lisibles, Eco, Elégance et Performance, (le plus agréable à mon sens). Ils n’intègrent pas d’information de cartographie mais on y retrouve les affichages liés aux gadgets de la voiture (régulateur de vitesse adaptatif, lecture des panneaux de signalisation, etc., on en reparle un peu plus loin). L’ergonomie ne prête guère le flanc à la critique mais on pourra néanmoins chipoter sur un ou deux petits trucs comme le fait que la platine centrale en suspension (à laquelle il faudra dire adieu sur les futures Volvo) pourtant assez généreuse en taille regroupe finalement la plupart de ses boutons sur un tout petit périmètre, le fait que la navigation dans le système multimédia ne se fasse pas à partir d’une unique commande ou bien encore ce frein de parking automatique situé à gauche du volant et sur lequel il faut pousser (sur la partie basse qui plus est) pour l’activer et non le tirer, réflexe habituel pour la plupart d’entre nous. Enfin bon tout cela c’est plutôt du détail car pour le reste on se sent particulièrement bien à bord, c’est propre, élégant bien fini et chaleureux, de quoi se lancer sereinement dans la conduite.

En Suédois confort se dit Volvo ?

En tout cas il est probable que cela s’abrège au moins XC60. Et ce confort passe d’abord par l’ambiance sonore à bord. On est d’ailleurs très agréablement surpris au moment d’appuyer sur Start car notre fameux 4 cylindres s’avère immédiatement particulièrement discret, au point que j’ai commencé par vérifier s’il s’agissait bien d’un diesel. Même constat sur la route, et quel que soit le régime moteur, ce dernier ne vous signalera pas particulièrement sa présence, pas plus que les bruits d’air ou de roulement qui eux aussi sont bien filtrés. Ajoutez à cela des suspensions calibrées confort, enclenchez le régulateur de vitesse adaptatif, allumez le système audio (d’excellente qualité) et vous voila parti pour enchainer les kilomètres d’autoroute dans la plus grande quiétude.

On a dit plus haut : qui se conduit tranquillement…

Les 181 ch. du moteur D4 sont incontestablement tous là et l’on se rend compte très rapidement des qualités de ce bloc et en particulier de sa grande souplesse. Il offre au conducteur une plage d’utilisation particulièrement large ne rechignant pas trop à descendre largement sous les 2000 tr/min et, mieux, acceptant volontiers de passer très au delà des 4000 tours en distribuant au passage son généreux couple de 400 Nm. Résultat la voiture offre des reprises convaincantes et des accélérations sécurisantes (8,5 s. sur l’exercice du 0 à 100 km/h). Mais attention pas question de parler de sportivité car si le bloc diesel ne se montre pas avare en puissance et en couple, le reste du véhicule ne sera pas forcément près à l’encaisser sans broncher. Redisons le tout net, ce XC60 n’aime pas spécialement être bousculé et dès que ça tourne un peu vite les suspensions vous rappellerons par un roulis marqué qu’elles sont chargées de s’occuper de votre dos et non de votre chronomètre, la physique que le véhicule avec deux personnes à bord approche dangereusement de la double tonne et, le train avant, par ailleurs très sain et neutre, vous invitera cordialement par ses pertes de motricité à le laisser respirer un peu vu qu’il éprouve quelques difficultés à faire passer le couple à chaque réaccélération en sortie de virage (essai il est vrai réalisé sur route humide).

Malgré cela ce XC60 est un véhicule attachant et séduisant qui offre des prestations routières de très bonne qualité, un excellent confort, une belle habitabilité, un coffre généreux (et intelligent), un équipement technologique particulièrement complet et une ambiance haut de gamme mais il faut quand même pour notre modèle d’essai signer un cheque de 48 570 €. Et si jamais votre budget est un peu plus étoffé il est possible de se tourner vers la grande berline garée juste à côté…

S80 : Plus toute jeune mais encore vaillante

Plus toute jeune en effet cette S80 puisque cette deuxième génération du modèle a été lancée en 2006, restylée il y a trois ans et que nous découvrirons les images de sa remplaçante, qui montera en grade pour devenir S90, dès l’année prochaine. Malgré cela cette « mamie » a encore de beaux restes, à commencer par sa plastique qui, bien aidée il est vrai par un clacissisme de bon aloi, reste tout à fait au goût du jour. Cette généreuse berline de 4,85 m. dégage par ailleurs toujours une réelle prestance qui permet de l’identifier clairement comme un haut de gamme (et même comme un premium) ainsi qu’une sobriété et une discrétion qui lui donnent une certaine classe sans pour autant passer par la case bling-bling.

Deutsche Qualität ? Ben non, Svensk kvalitet

Dans la même veine que le XC60, l’habitacle de la S80 se montre particulièrement accueillant et chaleureux avec cette finition Xenium agrémentée là encore de la personnalisation du programme Inscription dont on remarquera en particulier la splendide sellerie châtaigne… ne sommes nous pas en automne ? Ici aussi il n’est pas aisé de critiquer la qualité perçue et les assemblages de cet habitacle qui personnellement m’a pleinement comblé par son ambiance extrêmement agréable mais l’on peut néanmoins remarquer que l’intégration de l’écran du système multimédia est un peu maladroite et l’on retrouvera à l’identique les petits défauts évoqués plus hauts en ce qui concerne la platine centrale.

D4 + Geartronic = rapport idéal

Sur cette S80, et contrairement au XC60, ce n’était pas la boite manuelle qui équipait la voiture mais la nouvelle boite automatique Geartronic à 8 rapports d’origine Aisin. Et pour tout dire c’est vraiment bien mieux ainsi. Certes il est difficile de comparer un même moteur sous le capot de deux véhicules assez radicalement différents et dans leur forme et dans leur philosophie mais je pense malgré tout que le bloc Volvo se trouve nettement mieux mis en valeur par cette boite automatique qui se montre à la fois douce, réactive, intelligente et bien étagée. Elle s’adapte parfaitement au style de conduite que vous adoptez avec des logiques de passage des rapports bien différenciés selon le mode choisi et offre également une fonction sport « manuelle » (mais hélas sans palettes au volant) qui permet de pousser le régime moteur haut dans les tours et de bénéficier ainsi des meilleures performances. En un mot comme en cent j’ai beaucoup aimé.

Sous le capot de cette grande berline le 4 cylindres suédois m’a également offert d’autres sensations. La première, moins sympathique que sur le XC60, concerne l’insonorisation puisque sur la S80 le moteur, mais aussi les bruits de roulement ou d’air, se font nettement plus entendre et ce dès la mise en route. Cela ne devient pas insupportable, loin de là, mais il est évident que la conception un peu plus ancienne du véhicule se ressent dans ce domaine. Il en va d’ailleurs de même pour le confort qui, paradoxalement, se révèle un cran en dessous de celui du SUV, rien de catastrophique là non plus, c’est toujours de très bon niveau mais légèrement inférieur. En contrepartie, l’amortissement étant un peu plus ferme, la voiture, sans devenir d’une agilité phénoménale (n’oublions pas sa taille tout de même) fait montre d’une bonne aisance sur les routes de montagne et le moteur, grâce à la boite de vitesse mais sans doute aussi grâce aux 200 kg de moins sur la balance, propose des performances très honorables avec un 0 à 100 annoncé à 8,4 secondes et un réel agrément de conduite aussi bien en jouant au Fangio des bacs à sable dans la montagne qu’en se baladant en père peinard sur l’autoroute.

Enfin on soulignera que malgré son âge cette S80 propose toujours un équipement, notamment de sécurité active et passive, de tout premier plan parmi lesquels je retiendrai le très agréable régulateur de vitesse adaptatif déjà évoqué plus haut ou le système de surveillance des angles morts simple et efficace (mais qui avec la pluie peut tout de même avoir tendance à s’allumer sans raison). Je mettrai par contre de côté la caméra de lecture des panneaux routiers qui se trompe régulièrement (et ça n’est pas uniquement sa faute) et finit par vous perturber plus qu’autre chose, sans compter qu’elle a un peu tendance à faire baisser votre vigilance. A cela vous pouvez rajouter une liste d’équipement longue comme un jour sans pain dont je vous épargnerai le fastidieux détail (pour les plus mordus rendez-vous sur le site Volvo). Et tout cela a naturellement un prix : 55 670 €.

Alors, quatre cylindres ça suffit ou pas ?

Ma réponse quant à la qualité des blocs sera largement positive pour plusieurs raisons. La première est que le moteur D4 testé s’est révélé très agréable, souple, élastique, coupleux et assez peu sonore. La deuxième est qu’il s’est montré tout à fait adapté aux plus gros bébés de la gamme (en attendant le XC90) qui n’ont pas du tout donné la sensation de se retrouver sous-motorisés. Cela laisse donc présager de résultats encore meilleurs sur le reste de la gamme 60 et, a fortiori, sur la gamme 40. La troisième est que ce bloc s’avère également très frugal sur le plan de la consommation. Volvo met d’ailleurs bien en avant ce point en insistant sur sa nouvelle technologie i-ART jouant sur la quantité de carburant à injecter dans chaque cylindre et permettant des gains de consommation de l’ordre de 30 %. Alors bien entendu les consommations annoncées sur les brochures et obtenues lors de cycles de roulage irréalistes, bien qu’officiels, sont sans grand intérêt mais les chiffres que j’ai relevés sur la S80 sur un parcours d’un peu moins de 200 km de montagne (à rythme soutenu) et d’autoroute (au régulateur de vitesse) sont probants puisque l’ordinateur de bord nous affichait un remarquable 5,9 l/100.

Maintenant si les blocs motopropulseurs sont bons il reste à Volvo à gérer l’image que véhicule un 4 cylindres sur le marché que la marque prétend conquérir et dans lequel on se fait une joie de compter jusqu’à 6, 8 voire 12. Le constructeur suédois semble très confiant mais seul l’avenir nous permettra de voir si son pari risqué sera ou non un succès.

Un grand merci à Volvo (Marc Debord, Hélène Laoudi et toute l’équipe) pour l’organisation très réussie de ces essais et un grand remerciement également à Marc Veyrat pour son chaleureux accueil dans son restaurant de La maison des bois.

Crédit photo : Eddy P., Volvo

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