Parlons Kia EV6. Après la petite prise en main par Ugo du côté de Marbella (le chanceux !), le constructeur m’a contacté pour traverser une partie de la France à son bord. Objectif : tester le réseau Ionity et l’autonomie de la coréenne.
Si vous n’avez jamais vu de Kia EV6, comme pour moi avant cet essai, il y a de fortes chances pour qu’elle attire votre attention. Sans forcément la trouver fondamentalement belle, je reconnais qu’elle est impressionnante. De loin, on remarque sans conteste sa corpulence imposante et le coup de crayon futuriste (sans tomber non plus dans le caricatural typique des designers asiatiques). C’est en la regardant plus en détail qu’on commence de plus en plus à l’apprécier. Entre les quelques traits de carrosserie qui sortent de l’ordinaire, le petit becquet aérodynamique, le grand bandeau lumineux à l’arrière ou encore les clignotants en « 3D » qui prolongent ce dernier, il y a véritablement beaucoup de choses à regarder. En outre, la ligne de toit fuyante, donnant une allure de coupé, rend le profil plus dynamique. Et l’ensemble respire la qualité d’assemblage. À force de tourner autour, on finit par l’aimer cette auto !
Ses formes généreuses ne sont pas toujours faciles à assimiler tant elle en impose. Elle mesure tout de même 4m68 de long pour 1,55m de haut. Mais c’est principalement la largeur (1m88) alliée à un capot bombé et agressif qui la rendent si intimidante. J’ai même eu un petit coup de chaud en traversant une longue ruelle très étroite de Versailles. Heureusement, son attirail technologique permet de se tirer de ce genre de situation sans encombre. On apprécie alors grandement la caméra 360° et les différents capteurs de proximité. Mais je serais tenté de dire « malheureusement » également. Car, cela va de soi, elle embarque aussi par exemple un système de maintien de voie ; celui-ci se réactive à chaque démarrage et l’extinction est un dangereux parcours du combattant en roulant. Le système passe son temps à vouloir vous redresser de la pire des manières, en donnant des coups de volant intempestif. Ça en est limite dangereux dans un virage serré ou lorsqu’un motard nous frôle en pleine circulation, et je ne comprends pas comment cela peut continuer à exister. Voire rendu obligatoire sur les véhicules neufs. Sans oublier que le pilotage automatique nous ballotte de droite à gauche, cela faisait bien longtemps que je pensais cette histoire résolue. Non vraiment, si c’était drôle au début, je deviens de plus en plus réfractaire à toutes ces aides électroniques, plus castratrices que sécuritaires.
Sinon, en montant à bord j’ai été bluffé par la sensation d’espace que pourront avoir les passagers, notamment à l’arrière. Que ce soit aux jambes comme à la tête, tout le monde y trouvera son aise. En effet, grâce à un empattement de 2,9m et l’absence de tunnel de transmission, on peut installer trois adultes sans problème. Seule la place centrale souffre peut-être d’une assise un peu trop dure pour un long trajet. En plus, le grand coffre de 490 litres (+52 litres à l’avant) permet d’embarquer pas mal de bagages. Tout ça est globalement bien mis en valeur dans un habitacle bien dessiné, et plutôt ergonomique. Les deux grands écrans, façon Mercedes, demanderaient certes à être mieux intégrés mais ça ne choque pas. Puis, pour ma part, tant que des boutons de clim restent physiques, je suis le plus heureux. Enfin, on apprécie tout particulièrement la facilité à switcher entre Drive et Reverse, les touches de couleurs ou encore les jolis sièges bi-ton. La Kia EV6 donne là encore, un beau sentiment qualitatif et appelle au voyage.
La Kia EV6 ici présente est l’entrée de gamme, emportant une batterie de 77,4 kWh et pas moins de 229 chevaux sous le « capot ». En bénéficiant d’autant de patate sous le pied, disponible immédiatement, il serait dommage de ne pas s’en amuser de temps en temps. Et si elle n’est clairement pas conçue pour ça – on attend néanmoins la Version GT de 585 chevaux avec impatience – elle n’est pas la dernière pour arracher le bitume. 0 à 100 km/h en seulement 7,3 secondes et surtout des relances instantanées sont au programme. En haussant le rythme, on est capable de retrouver un certain plaisir de conduite. Oui oui, c’est vrai. La direction est un peu dure et pas toujours très informative, pourtant on a l’impression d’avoir un bon feeling avec elle. On la sent posée sur des rails, et elle nous donne une pleine confiance ; mais à l’instar d’un train, ça ballotte un peu dans tous les sens. Forcément, son poids de près de 2 tonnes ne pardonne pas et elle a tendance à pas mal s’écraser sur ses appuis dans du serré. À l’inverse, en cravachant plus fortement, son architecture en propulsion la rend joueuse, et c’est assez fun de savoir qu’une telle auto est capable de chasser parfois du popotin.
Soyons sérieux, et revenons-en à sa vraie philosophie, le confort est son maître-mot. Bien lové dans les sièges moelleux, on profite d’une suspension qui filtre très bien les obstacles de la route et les kilomètres défilent tout en douceur. En l’absence de passage de rapport, on jouit en réalité d’un agrément que même la meilleure des boîtes automatiques ne pourra égaler. Elle affiche un tempérament qui pousse à opter pour une attitude cool et détendue à ses commandes. On peut de surcroît parler du freinage facile à doser pour une fois, tout en étant puissant, et qui ajoute un argument supplémentaire à cette philosophie. Nul besoin en plus de préciser qu’elle fait tout ça dans un silence plus qu’agréable lorsqu’il s’agit de passer des heures à son volant. Il n’y a assurément pas de bruit de moteur, et les bruits d’air ou de roulement sont eux aussi parfaitement maîtrisés.
Sinon, elle se conduit comme n’importe quelle autre voiture. Réactive, souple, maniable, il y a tout pour être tout de suite rassuré. Et séduit. Seule chose qui pourra vraiment la différencier d’une thermique, et que j’apprécie énormément depuis ma prise en main du Volvo XC40 Recharge, c’est le système i-Pedal. Grâce à la forte régénération, il est donc possible de ne la piloter qu’avec la pédale d’accélération, sans jamais utiliser la pédale de frein. Notamment en ville, ou en péri-urbain avec beaucoup d’anticipation. Si vous avez sûrement déjà entendu parler de ce système depuis quelque temps, cela reste toujours bluffant. Et si en prime vous optez pour le mode Eco, elle vous poussera davantage à une conduite pleine de sérénité.
Ah non, en fait ce nouveau crossover ne se conduit pas totalement comme n’importe quelle autre voiture. L’autonomie, qui n’est pas encore suffisante pour que tous les automobilistes puissent se projeter, n’est quand même pas un frein pour un usage quotidien à la maison. Permettant pas mal de trajets par semaine sans nécessiter de se brancher. C’est plus lors d’un départ en vacances ou si un imprévu survient que les 528 km WLTP (moins dans la vraie vie) ne seront pas suffisants. Un stressé de nature tel que moi, faut bien le reconnaître, aura vraiment besoin de programmer son voyage. Si vous devez partir sur un coup de tête pour un souci familial, un déplacement professionnel non prémédité, ou un week-end à l’improviste ça peut devenir plus compliqué. La faute n’étant pas à mettre sur Kia, mais plutôt sur la lenteur de développement des stations et surtout le manque d’entretien ou autre incivilité. Tandis que je ne roule pas en électrique au quotidien, chaque essai révèle son lot de petits couacs. Entre une borne qui ne fonctionne pas, ou en dessous de sa capacité, un véhicule thermique garé dessus, un badge non compatible, ou une puissance bien trop faible, il y a souvent quelque chose pour contrarier les plans. Le problème de quitter une borne publique en pleine nuit ou très tôt le matin se pose également, pour ne pas payer des frais d’inactivité ou bloquer un autre automobiliste. Il n’est en effet pas toujours simple de trouver une prise près de son lieu d’hébergement.
Heureusement, Kia propose un abonnement appelé Ionity Power pour l’ensemble des clients. Après s’être acquittés de 13 € par mois, ils bénéficient alors d’un prix de charge de 0,29 € par minute (au lieu de 0,79 €). De quoi réaliser un 20 % à 80 % (200/250 km en moyenne) pour seulement 5,80 € (si évidemment la charge, jusqu’à 240 kW, se passe comme prévu en 20 minutes). Pendant l’essai, les recharges duraient plutôt 30/40 minutes en plafonnant à 130 kW. Sinon malgré légèrement moins de 100 stations Ionity en France, sur les grands axes, il est assez facile d’aller un peu partout en France. On peut compter par ailleurs sur les quelques autres bornes rapides en cours de déploiement (Total, EDF, …) et sur l’ouverture petit à petit des Superchargeurs Tesla aux autres marques. Cependant, dès qu’on prend l’autoroute, la consommation s’envole facilement à plus de 25 kWh/100 et l’autonomie baisse à vue d’œil (300 km). Il ne faut surtout pas louper l’aire de repos ! Des conditions difficiles (froid, vent, …) font perdre encore des kilomètres, comme allumer le chauffage qui enlève directement 45 km d’autonomie à l’écran. Pour en finir avec tous ces chiffres barbants, votre usage à la maison permettra plutôt de consommer environ 17 kWh/100, soit une autonomie de 450 km environ. Enfin, avec votre Wallbox personnelle, comptez au minimum 8h de recharge.
Côté prix, la Kia EV6 débute à 47 990 € ou 55 790 € pour notre version 168 kW RWD GT-Line. Cette finition ajoute des projecteurs full LED matriciels, des boucliers spécifiques, un système audio Meridian ou encore le grand affichage tête haute avec réalité augmentée. On peut entre autres ajouter à la facture une teinte à 950 € et un pack d’aides à la conduite à 2000 €. Pour un total ici de 59 240 €. Tout juste pour bénéficier de 2000 € de bonus écologique (1000 € au 1er juillet).
Si on oublie les difficultés inhérentes au forcing qu’effectue l’Europe pour imposer les engins électriques, cette Kia EV6 est objectivement une excellente voiture. Que ce soit pour un usage de tous les jours ou pour partir en vacances, on apprécie son agrément irréprochable et son grand silence de fonctionnement. Elle sait se montrer à la fois très douce, mais aussi plus caractérielle, tout en assurant à ses passagers une quiétude à toute épreuve. Son autonomie vous permettra de vivre normalement toute l’année et de partir en vadrouille en sa compagnie. Sous réserve simplement d’une bonne préparation, comme je le disais plus haut. Et vous, dites-nous ce que vous recherchez dans une voiture électrique ?
Crédit photos : Thomas D. (Fast Auto)