Il y a près de vingt ans, j’en étais encore à mes années “majorette“, n’en déplaise à certains de mes confrères à qui je rappelle par la même occasion leur âge bien plus avancé que le mien (niark niark). C’est à travers ce fabricant français de modèles réduits pour enfants que je découvrais l’Audi TT, dont la forme si particulière m’avait marquée, au milieu des dizaines d’autres petites autos. Je l’ai attendue un bon moment celle-ci, avant que ma gueule d’ange (ça devait sûrement être ça) ne fasse craquer mes grands-parents, dans un petit supermarché provincial dans la campagne alsacienne. Cette petite auto sous forme de jouet était mienne, et pour moi c’était déjà beaucoup ! Quelques années après, ce n’est pas au détour d’un des étalages du rayon jouet que je fais de nouveau connaissances avec la TT, mais bien dans la forêt noire, au volant de l’édition anniversaire “20 years”.
Un design devenu institution
Outre une édition spéciale destinée à fêter 20 ans de succès, la TT de troisième génération s’offre également un discret facelift de mi-carrière avant de disparaître définitivement / être remplacée (rayez la mention inutile). L’avenir du petit coupé de la firme d’Ingolstadt reste en effet plutôt flou. Les clients veulent des SUV à toutes les sauces et en Europe, la carrosserie “coupé” ne bénéficie plus de son aura d’autant. Elle a pourtant de l’allure cette TT. Parfaitement proportionnée, sa silhouette n’a elle s’est imposée dans le paysage automobile pour qu’on la reconnaisse au premier coup d’oeil. En 20 ans, la TT a pris une quinzaine de cm en longueur, 6 cm en largeur et a perdu un petit cm en hauteur, de quoi rendre la ligne plus dynamique, plus agressive. Le mieux dans tout ça ? Le poids n’a quasiment pas bougé avec les années. À puissance équivalente, la TT a même perdu plus de 10 kgs sur la balance. Ça va dans le bon sens tout ça ! Alors pourquoi abandonner ?
Les mises à jour sur ce facelift sont mineures. La calandre adopte le nouveau dessin “singleframe 3D” et les optiques arrières inaugurent la technologie “Matrix OLED”. Les boucliers avant/arrière ne changent pas sur la dotation de série tandis que le pack S-line adopte un dessin revu en intégrant des prises d’air surlignées d’un bandeau couleur argent qui rappellent instantanément le sommet de gamme, la bestiale TT RS (que mon estimé collègue a d’ailleurs eu la chance de vous faire découvrir ici). La TT “20 years” se pare quant à elle de détails bien spécifique tels que :
- les 4 anneaux sérigraphiés sur les flancs entre les portières et les roues arrières
- la teinte exclusive Gris Flèche métallisé (vous pouvez aussi opter pour le Gris Nano, plus foncé)
- les jantes 5 branches couleur métal brillant
- un intérieur en cuir Nappa Brun à surpiqûres jaunes dont l’extravagance plutôt surprenante de la part d’un constructeur germanique trouve ses origines, une fois de plus, chez sa devancière de deux générations qui présentait une sellerie dite “baseball” évoquant notamment les coutures d’un gant du sport éponyme.
Je trouve pour ma part le résultat parfaitement réussi (et très photogénique !). Une édition collector en devenir que les amateurs de youngtimers s’arracheront sûrement d’ici une vingtaine d’années.
Douce évolution
Je me souviens avoir pris le volant il y a environ 4 ans d’une Audi TT Cabriolet de première génération. Un exemplaire de premier choix puisque il arborait une somptueuse teinte Bleu nuit, le fameux intérieur baseball mais surtout, ses entrailles abritaient le V6 3.2 de 250 ch, qui n’était autre que le VR6 emprunté directement dans la banque d’organes VW. Je n’avais effectuée que quelques kilomètres à son volant mais j’en garde un excellent souvenir et j’ai encore en tête les sensations si particulières que j’avais ressenties : l’impression de conduire une auto au gabarit minuscule mais à la direction lourde, aux reprises surprenantes et à la sonorité si enchanteresse, prête à faire rougir les 718 Cayman/Boxster actuels. À sa sortie, la TT proposait un 4 cylindres 1.8 L turbo, décliné en 4 niveaux de puissance, 150, 180 et 225. La gamme était donc coiffée par le fameux V6 de 250 ch. La deuxième génération inaugurait un style plus quelconque et voyait arriver sous le capot un bloc TDI (enfer et damnation), choix techniques perpétués jusqu’à fin 2018. En effet, la gamme de motorisations abandonne le Diesel mais également le petit 1.8 L Turbo de 180 ch d’entrée de gamme (essayé également par Gabriel ici). La gamme se décline donc ainsi :
- TT 40 TFSI 197 ch (uniquement disponible en BVA S-Tronic)
- TT 45 TFSI 245 ch (BVM 6, BVA S-Tronic ou BVA S-Tronic + quattro)
- TT S TFSI quattro S-Tronic 306 ch (310 ch avec le pack Compétition)
- TT RS TFSI quattro S-Tronic 400 ch
Une gamme somme toute rationnelle et au niveau du standing de la TT.
20 ans d’expertise
Et sur la route, comment s’en sort notre jeunette de 20 ans ? À travers ses choix techniques (c’est une traction avant tout), la TT se retrouve plus ou moins seule sur son marché. La défunte RCZ proposée par Peugeot n’aura pas réussi à ne serait-ce que faire rougir la TT commercialement parlant, du haut de ses maintenant 600 000 exemplaires écoulés à travers le monde. Notre version d’essai adopte le 2.0 L TFSI Turbo de 245 ch et affiche des chiffres dignes de bien des compactes sportives : 370 Nm de couple disponibles dès 1600 trs/min, un 0 à 100 km/h abattu en 5,2 secondes et une vitesse de pointe limitée à 250 km/h, chiffre que nous n’avons d’ailleurs pas eu de mal à approcher sur les routes germaniques adéquates. La poussée à l’accélération est étonnement linéaire, sans à-coup, sans trou de couple et surtout sans manque de souffle à l’approche des 6500 trs/min. La sonorité est elle-aussi admirablement bien travaillée (au même niveau que la TT S) pour un 4 cylindres. Le turbo se fait très discret dans son action tandis qu’un son rauque envahit l’habitacle, sans déflagration intempestive et ô combien artificielle dont sont friands les constructeurs actuellement. C’est rigolo un moment, mais lorsqu’à chaque lever de pied vous avez exactement 4 déflagrations identiques en tout point quelque soit le rapport engagé ou le régime moteur, ça sent tout de même bon le pré-fabriqué. Audi ne fait pas l’erreur de passer par cette case sur la TT classique. Relativement confortable malgré son gabarit et ses jantes de 19 pouces, elle incarne plus l’esprit GT originel que l’arsouille permanente.
L’envie me prend quand même de la bousculer à la vue d’un petit groupe composé d’une Focus RS, d’une Golf GTi et d’une Audi S3 jaune de première génération attaquant gaiment une petite route au revêtement idyllique serpentant entre les hauts sapins et s’enfonçant peu à peu dans l’obscurité des limites de la forêt noire. Je ne me fais pas prier. Et c’est parti pour quelques enchainements musclés. La prise en main du volant est parfaite, épaisseur de jante, méplat, emplacements pour les pouces, tout y est. Les sièges confèrent également un maintien exemplaire, la position de conduite est d’ailleurs réglable à l’envie bien qu’une fois n’est pas coutume, j’aurais bien baissé le siège d’encore un centimètre. En ascension, je n’ai à aucun moment l’impression de manquer de puissance, sortant pourtant d’une R8 V10 Performance un jour avant et d’une TT S Compétition quelques heures auparavant. Les accélération très linéaires me rappellent un peu dans le même genre celles de la Mégane 3 RS au turbo à la montée en pression progressive. Toutefois, l’absence quasi-totale de sensation gomme mon plaisir. Pas vraiment d’impression de vitesse, aucune réaction particulière pour vous rappeler à quelle vitesse vous roulez (bien trop vite assurément). Même lors d’une entrée brutale en virage, le train avant ne dévisse pas et le sous-virage est admirablement bien maitrisé, même en forçant le jeu à la ré-accélération. C’est le propre de l’Audi TT, une docilité sans pareil. C’en est presque dommage. Une mécanique plus “noble” changerait la donne sans aucun doute.
Souvenir de souvenirs
De la petite “majorette” à ma première expérience au volant de la TT de 1re génération, je partais avec un bon a-priori sur le modèle. Et force est de constater que la TT a su évoluer majoritairement dans le bon sens, osant même proposer une version surpuissante à l’architecture technique atypique, je pense bien sûr au 5 cylindres de la TT RS. C’est assez rare aujourd’hui pour être remarqué. Sans réelle concurrente, sans réel marché et affichant pourtant des chiffres de vente honorables, la question de l’avenir du TT est posée. Sera-t-elle remplacée par un énième SUV ? Rien n’est moins sûr, les réalités commerciales sont là. Il reste intéressant de constater qu’Audi accorde encore beaucoup d’importance, en tout cas dans la communication, à son coupé phare. C’est qu’on l’aime nous cette TT !
Merci à Audi Sport et Sabrina pour l’invitation mémorable.
Crédits Photos : Maurice Cernay