Essai Honda Civic Type R FL5 : partir la tête haute

25 ans après avoir apposé pour la première fois le badge “Type R” sur une Civic, Honda lève le voile à l’été 2022 sur ce qui sera sans doute, la dernière génération de sa compacte sportive 100% thermique. Reprenant la recette à succès des moutures précédentes, la Civic Type R FL5 arrive sur le vieux continent avec des prétentions à l’échelle de son histoire, et surtout un tarif très salé, notamment dans l’Hexagone où le malus la rend hors d’atteinte pour de nombreux passionnés. Essai.

Un peu d’histoire

C’est en 1997 qu’Honda dévoile la première Civic Type R (EK9), basée sur la compacte éponyme de sixième génération. Un 4 cylindres 1.6 rageur développant 185 ch à 8200 tr/min (!!!), une cure d’amaigrissement, une boîte courte et un différentiel à glissement limité font de la petite traction une véritable petite bombe roulante. Cette dernière ne sera pas importée sur le vieux continent et il faudra attendre 2001 et l’EP3 (Civic de septième génération) pour goûter aux joies de la sportive japonaise. En 2015, la Civic Type R passe au 4 cylindres turbo avec la génération FK2 qui développe 310 ch à 6500 tr/min. C’est d’ailleurs à cette occasion que la compacte (plus si compacte que ça) rentre dans la course folle au record des tractions sur le mythique tracé du Nürburgring. La FK2 aura une carrière plutôt courte (à peine 3 ans) et sera rapidement remplacée par la FK8, encensée par la presse, mais également par votre serviteur. Après des mois d’attente, me voici désormais derrière le volant de ce qui semblerait être l’ultime Civic Type R, qui aura donc la lourde tâche de clôturer la légende en beauté. Mais est-elle seulement digne de cet exercice ?

Une sportive bien née

Pour la Civic Type R FL5, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’Honda n’a pas cherché à réinventer la roue. Mis à part un design bien plus consensuel et une qualité des matériaux en hausse (repris de la Civic “civile”), l’ensemble mécanique n’a rien d’inédit. On retrouve ainsi le même bloc 4 cylindres 2.0 L turbo que sur les FK2 et FK8, avec quelques menus changements : optimisation du système d’admission, modification du turbo et un échappement libéré. En résultent des chiffres en nette amélioration : 329 ch à 6500 tr/min (+ 9 vs la FK8), 420 Nm disponibles entre 2200 et 4000 tr/min (+20), permettant d’abattre le 0 à 100 km/h en 5.4 secondes et d’atteindre une vitesse de pointe de 275 km/h. 

Reposant sur une base de Civic de onzième génération, la Type R FL5 en reprend bien évidemment la majeure partie des traits, avec toutefois une touche “tuning” (dans le bon sens du terme) remarquée, encore plus dans ce colori Bleu Racing (au choix parmi 5 disponibles au total) : ailes et voies élargies, capot ajouré, boucliers & jupes spécifiques, diffuseur arrière marqué, sorties d’échappement immanquables et également, imposant spoiler au programme. C’est d’ailleurs ce dernier qui m’a quelque peu déçu dans son dessin : son intégration laisse clairement à désirer et il n’y aucun rappel de la couleur carrosserie, bref, on dirait qu’il a juste été posé là par le petit garage du bout de la rue. Un effet “aftermarket” qui jure quelque peu pour une voiture de cet ordre tarifaire. Le résultat est néanmoins homogène, avec des traits agressifs, mais moins exubérants que sur les générations FK2 et FK8, décriées pour leur design extraverti, trop au regard de certains des amateurs de la marque japonaise qui les avait habitués depuis près de 20 ans à des modifications plus consensuelles.

On retrouve dès l’ouverture de portière un habitacle dans la plus pure tradition des Type R : des sièges baquets rouges, une moquette et des tapis assortis ainsi qu’un poste de conduite résolument tourné vers le conducteur, avec une bascule vers le 100% digital assez limitée par rapport au reste du marché. En bonne place au milieu du tunnel de transmission : le fameux levier de vitesses et son pommeau anodisé, inauguré sur la dernière FK8 Limited Edition.

Je m’installe à bord et me retrouve avec le même constat que lorsque 5 ans plus tôt, je prenais place pour la première fois à bord de la Civic Type R FK8 : la position de conduite très basse est absolument parfaite, surtout à bord d’une compacte où c’est rarement le cas. Honda l’a d’ailleurs encore abaissée de 8 mm par rapport à cette dernière. On retrouve un environnement feutré, un design épuré et des matériaux à la qualité perçue de premier ordre, très loin de ce que l’on pouvait attendre à bord d’une Honda. A tel point que l’intérieur de cette Civic Type R m’a semblé de meilleure qualité au niveau des matières et des ajustements que mes souvenirs à bord d’une Golf R ou bien d’une Audi RS3 par exemple, pourtant références en la matière il y a quelques années.

Passons les détails communs au reste des Civic et concentrons nous sur les éléments spécifiques à cette Type R. La planche de bord est rigoureusement identique à une Civic standard, seul le volant avec sa couronne en suédine et son logo rouge nous rappellent que nous sommes à bord d’une version survitaminée. Le tableau de bord 100% digital, secondé de l’écran principal d’infotainment, nous permet de retrouver toutes les informations nécessaires dans le cadre d’une conduite sportive. Sur la gauche du levier de vitesses, on retrouve deux boutons : “Drive Mode” et “R+”. Le premier nous permet de naviguer entre les différents modes de conduite disponibles “Comfort, Sport, Indivual” tandis que “R+”, à réserver au circuit (nous verrons pourquoi plus tard), s’enclenche via une pression prolongée sur la touche éponyme. 

En terrain connu

Une fois n’est pas coutume, c’est dans le superbe parc naturel régional du Morvan que mon périple me mène pour étrenner cette nouvelle Civic Type R. Routes désertes, bitume qualitatif dans l’ensemble, virages à gogo et reliefs bien présents : le paradis de n’importe quel petrolhead en manque de grandes espaces. C’est donc sur l’autoroute que la sportive japonaise et moi faisons connaissance, via le mode Comfort dans un premier temps. Une appellation quelque peu galvaudée au regard de l’amortissement qui se révèle très ferme d’entrée de jeu, malgré la suspension adaptative et la taille de jantes diminuée d’un pouce par rapport à la FK8. Le siège baquet au maintien difficilement critiquable dispose toutefois d’un renfort aux lombaires trop présent à mon goût. Malgré des exigences de confort en voiture bien en deçà de celles du commun des mortels (je roule en Caterham), le verdict est sans appel : au bout de 2h de route, j’ai mal au dos.

La presque totalité de la puissance est bien présente dès le premier mode de conduite. Le 2.0 L turbo répond ainsi déjà très fort à la moindre sollicitation et s’en donne à coeur joie aux sorties de péage. Je quitte rapidement l’A6 pour rejoindre le réseau secondaire dès Auxerre, l’occasion de remarquer que le talon-pointe automatique fonctionne dès le mode Comfort, et également lorsque l’on rétrograde de 2ème en 1ère, contrairement à la FK8. La consommation sur l’exercice de conduite coulée est acceptable, environ 8.5 L / 100 km mais très difficile de faire moins. Le réservoir de 47 litres se révelera également très juste pour les voyages au long-court.

On lâche les chevaux

Enfin, les premiers virages se dessinent au loin et je décide de passer au mode Sport. La modernité de la Civic Type R se rappelle très rapidement à mon bon souvenir : les premiers freinages appuyés déclenchent les feux de détresse à chaque reprise, tandis que l’approche de la zone rouge nous est signalée par un “biiiip” strident, fatiguant à la longue, et surtout un peu trop tôt. Aller taquiner le bout du compte-tours ne représente toutefois pas grand intérêt, le rupteur ayant laissé place à une coupure électronique des gaz. Ces quelques détails irritants vite oubliés, je me concentre sur le comportement moteur, identique à mes souvenirs à bord de la FK8 : le 4 cylindres souffle fort et surtout, en continu. Le couple maximum dispose d’une plage d’utilisation plutôt large et affiche une courbe carrément avantageuse. Ainsi, les 420 Nm sont disponibles de 2600 à 4000 tr/min tandis qu’à 6000 tr/min, le couple affiche encore un score de 380 Nm. Une belle performance pour un 4 cylindres turbocompressé. Le bruit moteur quelque peu gonflé artificiellement dans l’habitacle n’est pas particulièrement beau mais on lui reconnait un caractère rageur bienvenu qui ne donne en aucun cas envie de relâcher la pédale de droite. Côté bande son, après une franche montée en charge, un levier de pied rapide de l’accélérateur vous gratifiera de petits “pshiiit” en provenance du turbo très amusants. On notera également, une fois la voiture bien chaude, quelques rares pétarades à l’échappement au lâcher de gaz.

La boîte est un véritable régal, sans doute LA pièce maitresse de cette “hot hatch”, à l’heure où l’ensemble des survivantes de la catégorie sont passées à la boîte à double embrayage. Même la sacro-sainte Mégane R.S. a récemment perdu sa troisième pédale. En résulte un sentiment d’exclusivité. Ce simple élément est une manière exacerbée de ressentir le comportement de la japonaise jusque dans le poignet. Tout est absolument parfait : le guidage est précis, les verrouillages carrément francs et les débattements d’une longueur idéale. Le pommeau anodisé, légèrement frais au toucher après avoir laissé la voiture quelques heures sans rouler, est un véritable bonheur à manier. Et bien que la Civic Type R fasse le travail à votre place, il vous est parfaitement possible de faire votre talon-pointe “à l’ancienne”, avec un pédalier parfaitement disposé pour un tel exercice. 

Le freinage est quant à lui progressif, facilement dosable avec un mordant juste comme il faut à l’attaque de pédale et une régularité dans le freinage parfaitement en ligne avec la pression exercée sur cette dernière. Les freinages trop appuyés mettent toutefois en lumière un déclenchement de l’ABS intempestif alors même que le revêtement des routes parcourues n’était pas si accidenté que ça. Le coupable dans tout ça ? Le mode “R+” sans aucun doute. Car oui, si j’ai rapidement eu envie de l’activer, j’ai finalement fait le chemin inverse quelques minutes après. Ce dernier rigidifie la suspension à son maximum, clairement trop pour de la route ouverte ou un parcours à reliefs changeants. Les remontées d’informations sont caricaturales dans le volant, le train avant lit la moindre aspérité comme un nid de poule géant et entraine des changements de cap intempestifs. On arrive rapidement en butée d’amortisseur et l’exercice de la conduite dynamique en devient tout sauf plaisant.

Tout n’est pas noir au chapitre du comportement, bien au contraire, d’autant que les défauts mentionnés juste au dessus peuvent être mitigés via la sélection du mode “individual” aux multiples réglages possibles. Le travail effectué sur le châssis est assez bluffant. La Civic Type R, malgré son gabarit toujours plus volumineux, se joue des virages telle une petite GTI. On oublie rapidement à son bord le gabarit plus proche d’une berline que d’une compacte pour se concentrer uniquement sur le fait que cette nouvelle mouture semble se jouer de n’importe quelle loi de la physique. Le train avant a été pensé par des sorciers. Je ré-accélère en sortie de virage de plus en plus tôt, de plus en plus fort, pour finalement mettre godasse dès le point de corde atteint. Pas une seule amorce de patinage, pas une once de sous-virage, c’en est même perturbant. L’action du différentiel auto-bloquant est dantesque, le niveau de motricité impressionne en toutes circonstances (rappelons que notre Type R est chaussée de Michelin Pilot Sport 4S). Et comme si cela ne suffisait pas, la Civic Type R, grâce notamment à ses voies élargies et à ses gommards de 265 mm (!!!), démontre une aisance encore une fois surprenant dans les longs virages rapides, avec une stabilité déconcertante.

Rigoureuse en tous points, la Civic Type R peut également délaisser son côté sérieux en désactivant l’ESP qui permet notamment, de placer gentiment le train arrière au frein. S’il vous sera difficile d’en jouer sur les petites routes de forêt, une belle et large épingle en descente avec le frein dégressif et le mouvement du volant qui va bien vous permettront de le constater par vous-même. Le même exercice en montée s’avérera plus compliqué, cette dernière génération n’étant pas équipée d’un frein à main manuel.

Le coup de grâce

Il ne m’en fallait pas plus pour me convaincre que oui, définitivement oui, les compactes sportives 100% thermiques vont terriblement me manquer. Surtout sous la forme de cette Civic Type R qui, non contente d’être l’une des dernières résistantes de cette catégorie, enfonce le clou pour de bon en proposant une copie quasi sans reproches du point de vue de la sportivité. Seule la rigidité du châssis vient quelque peut perturber ma conclusion, permettant en revanche à la Civic Type R de virer à plat dans n’importe quelle situation. Un simple harnais me permettrait finalement de tirer toute la quintessence de cette proposition unique en son genre. Le coup de grâce ? Un tarif carrément prohibitif, à partir de 57 220 €, hors frais d’immatriculation avec un malus de 12 552 € pour cette année 2023, soit 70 000 € clefs en main pour cette Civic Type R FL5. 

Quelques chiffres

Dimensions : 4594x1890x1401 mm
Poids à vide : 1430  kg
Volume coffre : 410 L
Volume réservoir :  47 L
Consommation mixte annoncée (WLTP) :   8.2 L/100 kms 
Rejet CO2 moyen annoncé (WLTP) : 186 gCO2 / km
Moteur : 4 cylindres turbo 1996 cc
Puissance max combinée : 329 ch à 6500 tr/min
Couple max : 420 Nm de 2600 à 4000 tr/min
Vitesse max : 275 km/h
0 à 100 km/h : 5.4 s

Crédits Photos : Maurice Cernay

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