Plus agressif que jamais dans sa nouvelle présentation, le Lexus RX 450h distille cependant une sérénité et un confort de très haut niveau. Et son efficience est remarquable au quotidien.
Une lumière douce de fin d’après-midi irradie cette bourgade chic de la région parisienne. Dans la rue, des mères de famille discutent. Une grand-mère arrose des hortensias sur sa fenêtre. Au loin, on entend des rires d’enfants et le bruit d’un ballon tapant sur un mur. Une fourgonnette de la Poste ramasse le contenu d’une boîte aux lettres. Un kéké en T-Max déchire le silence du cri de son silencieux Akrapovic, probablement content de lui, et d’emmerder le monde.
Miii-Faaa.
Soudain, l’air se charge d’une tension. Imperceptible. Indéfinissable, mais pourtant présente. Le temps suspend son vol et les oiseaux prennent leur envol, brutalement, leurs ailes claquent dans un bruissement sec et sonore. Un chien, immobile, une patte levée, la truffe à l’air, cherche à comprendre ce qui se passe.
Miiii-Faaaa.
Dans un landau, un enfant martyrise son doudou et lui arrache les yeux dans une joie primaire et candide, pure et simple. Si jeune et déjà sadique. La tension devient plus palpable. Les oreilles du chien se lèvent. Une porte de garage s’ouvre complètement.
Miiii-Faaaa ; Miiii-Faaaa ; Miiii-Faaaa ; Mi-Fa, Mi-Fa, Mi-Fa, Mi-Fa… Le rythme s’accélère sur ces deux notes entêtantes (signées John Williams) jouées au contrebasson. Dans la mélodie obsessionnelle des Dents de la Mer, le nouveau Lexux RX 450h pointe son museau hors d’un parking souterrain et commence à sortir dans la rue.
Et il le fait en silence, tout comme le Carcharodon Carcharias quand il se jette sur sa proie, toutes dents dehors. Les mères sont inquiètes, le visage de l’une d’entre-elles, paniquée, se fige dans un rictus. Le chien aboie. Le T-Max, lâchement, disparaît. Le ballon ne rebondit plus. L’enfant se met à pleurer.
Mazette, cette calandre ! Flippante, non ?
Plus grand, plus gros, plus puissant, toujours hybride…
Et pourtant, il est gentil, le nouveau Lexus RX 450h ! Super gentil, même, Un bon gros nounours, qui aime choyer son conducteur et prendre soin des familles. Son truc à lui, c’est la douceur, l’efficience, la sérénité. Et pas les mâchoires qui cisaillent tout !
Nonobstant sa nouvelle dentition, le Lexus RX est un engin bien connu sur nos routes. La preuve par les chiffres : depuis la création de Lexus en 1989, un véhicule vendu sur trois a été le SUV RX : il y a en eu presque 2 millions dans le monde entier et nul doute que l’arrivée de la version hybride a fait office d’accélérateur de croissance. Aujourd’hui, le Lexus RX reste le gros véhicule hybride le plus vendu mondialement.
La quatrième génération se remarque instantanément avec sa nouvelle calandre très agressive, bien en phase avec les productions Lexus récentes. Terminé, le physique plutôt mou des versions précédentes, quasiment patatoïdes ! Le nouveau RX s’assume (enfin !) avec cet avant composé de deux trapèzes imbriqués, bordés par des joncs chromés et entourés par des feux à LEDs carrément efficaces. On note aussi l’élément de custode noir à l’arrière, qui donne l’impression d’un « toit flottant » ce qui, avec le hayon plus incliné, souligne son dynamisme. Et il s’assume aussi par ses nouvelles dimensions : par rapport à la troisième génération, le RX 450h MkIV a grandi de 12 cm (en passant de 4,77 à 4,89 m), ceci afin de se démarquer du NX 300h qui serait tenté de lui faire de l’ombre (et en silence, en plus, le fourbe !). Le NX 300h (essayé ici par mon collège JB) mesure en effet 4,66 m de long : quand on pense que le premier RX 300, lancé en 1998, mesurait 4,57 m, ça en dit long sur l’évolution des automobiles. Ceux qui ne s’en plaindront pas, ce sont les nouveaux proprios de ce RX 450h : car l’empattement a pris 5 cm dans l’opération, au bénéfice de l’habitabilité à l’arrière, qui offre un espace aux jambes carrément généreux. Et dans la manœuvre, le coffre gagne 40 litres de capacité en configuration 5 places.
À l’intérieur, le RX 450h a également évolué. Le nouveau Lexus RX 450h inaugure un affichage tête haute, sur un large écran de 6,2 pouces de large, et la vitesse ainsi que les indications GPS sont parfaitement lisibles. La gestion de la voiture et l’info-divertissement se commandent à la fois par une molette et par une souris tactile, qui demande un peu d’habitude, mais qui permet ensuite de naviguer dans les menus par une petite impulsion de l’index. Le frein de parking est électronique, ça aussi, c’est nouveau, tout comme la recharge à induction pour les smartphones.
Côté châssis, le Lexus RX MkIV reste construit sur la plateforme du MkII de 2003. C’est décevant, non ? En fait, non, parce que les améliorations ont consisté tout à la fois à rigidifier les ancrages de suspensions, celles-ci étant pilotées sur notre modèle d’essai F Sport et disposant de ressorts plus souples et de barres anti-roulis plus épaisses, afin de le faire virer à plat tout en soignant le confort. En même temps, la colonne de direction a été modifiée : elle est plus basse de 2° pour un meilleur feeling au volant et, dans le même esprit, l’assise des sièges est abaissée de 2 centimètres.
Techno-pragmatisme
Le Lexus RX 450h fut un précurseur. Aujourd’hui, tous les autres acteurs du premium sont également sur le marché de l’hybride. Rechargeable. Ce qui inclut un prix de vente plus élevé, corollaire d’une technologie de batteries plus complexe (Li-Ion au lieu de Mi-MH), plus denses en recharge et moins chères à l’achat.
La raison en est simple. Le groupe Toyota continue de penser que l’hybride rechargeable, c’est beau sur le papier, mais qu’en réalité, les gens ne rechargent pas aussi souvent qu’ils le devraient et que les infrastructures ne sont pas encore adaptées (une théorie portée par l’échec commercial de la Prius rechargeable). Dans la même veine, le groupe Toyota nous a longtemps fait croire que leur transmission par train épicycloïdal était la seule façon de faire tourner ensemble un moteur thermique de concert avec un ou des moteurs électriques, dans des logiques de fonctionnement complexes, chacun des éléments pouvant être actif (ou pas) et tourner seul ou simultanément, et à des régimes de rotation très différents. Ça a tenu la route, jusqu’à ce que les Allemands y arrivent aussi mais avec des boîtes automatiques classiques (comme sur les BMW e) ou des triple embrayages (des DSG avec un troisième embrayage pour désaccoupler l’ensemble).
Bref, tout ça pour dire que la technologie Toyota et Lexus est suffisamment sûre d’elle pour ne pas avoir besoin de beaucoup évoluer. D’ailleurs, dans la nouvelle Lexus RX 450h, si le look a changé, la technologie est relativement proche de la troisième génération. Les moteurs électriques, par exemple, sont identiques : celui à l’avant développe toujours 167 ch et 335 Nm de couple, tandis que le moteur arrière développe, comme avant, 68 ch et 139 Nm. En configuration de roulage normal, le RX 450h est en fait une traction avant, et, au besoin, il ne pourra pas faire le 4×4 très longtemps. Mais Toyota fait aussi des Land Cruiser qui sont parfaitement adaptés à une vie plus difficile.
Le moteur thermique a un tout petit peu changé. Pas beaucoup. Il cube toujours 3456 cm3, mais a fait évoluer son mode d’alimentation, la cartographie moteur et le refroidissement. D’une injection indirecte, il est passé à un système mixte d’injection directe et indirecte baptisé D4-S. Ce faisant, il passe de 249 ch et 317 Nm à 263 ch (à 6000 tr/mn) et 335 Nm (à 4600 tr/mn) ; comme on ne peut additionner le tout, la RX 450h fait désormais 313 ch. Pas mal, non ? D’autant, qu’en passant de la troisième à la quatrième génération, sa consommation normalisée est descendue de 6 à 5,3 l/100 et ses émissions de 145 à 120 g de CO2. Du coup, le RX 450h n’est pas malussé.
Les performances évoluent peu : la vitesse de pointe reste limitée à 200 km/h, ce qui n’est pas terrible (surtout si vous habitez en Allemagne), et le 0 à 100 est couvert en 7,7 secondes, ce qui n’est pas si mal. Voire carrément pas mal, en fait.
Au-delà des chiffres, une Lexus vaut aussi pour l’environnement dans lequel elle vous plonge et les sensations qu’elle vous prodigue.
Cela commence par l’ambiance intérieure. Auparavant, je trouvais que le raffinement auquel prétendait les Lexus était parfois gâché par l’utilisation de quelques composants issus de l’univers Toyota (comme le combiné radio des IS 300h et NX 300h, par exemple). Mais là, il n’y a juste rien à dire et la RX n’a rien à envier aux marques allemandes bien établies, Volvo restant un cas à part dans la pureté de son ergonomie. Entre la qualité des assemblages, des cuirs qui recouvrent la planche de bord, des placages aluminium (courbé !) au niveau de la console centrale, rien à dire. Idem pour la lisibilité du tableau de bord (dans ses différents modes, éco ou sport avec apparition d’un compte-tours au centre), du grand écran d’info-divertissement de 12,3 pouces, de la qualité et de la taille de l’affichage tête haute, c’est du tout bon. La souris tactile qui gère tous les menus demande une petite prise en main : en fait il faut lui donner des petites impulsions en direction des fonctions que l’on veut atteindre sur l’écran, sinon elle se comporte comme une souris de PC sous acide. Quand on réalise ensuite que la qualité de l’insonorisation est au top, l’habitacle du RX 450h est un endroit où il fait bon vivre.
Lexus promet 2 ou 3 km sur les batteries en mode EV. Cela doit être possible mais avec un orteil en plume sur l’accélérateur, car avec ses 2100 kilos, le RX 450h a quand même une certaine masse à déplacer. Alors le V6 entre en vie dans un ronronnement sourd et participe à la mobilité de l’ensemble, en douceur et avec des transitions qui sont relativement imperceptibles. C’est zen, porté par la qualité de la sono Mark Levinson, ses 15 HP, et son système surround 7.1.
Au quotidien, tout l’ensemble moteur et transmission suggère une conduite vraiment détendue. Bien entendu, en prêtant vraiment l’oreille, on distingue les différentes phases de conduite, mais ce n’est pas très important. Bien calé dans des excellents sièges, profitant d’une suspension conciliante malgré les roues de 20 pouces (une dimension qui fait son apparition sur le RX 2016, auparavant, il était limité à 19 pouces, mais avec les mêmes tailles 235/55), on se laisse aller en douceur en sachant qu’on en a toujours suffisamment sous le pied pour rester serein. La transmission fonctionne à la manière d’une CVT, mais l’avantage d’avoir un gros V6 de 3.5 en bout de chaîne, c’est qu’il y a du répondant tout de suite, ça me change de mon essai précédent pour le blog, la Honda Jazz 1.3 CVT. C’est quand l’horizon se dégage et que l’on se retrouve, lors d’une accélération, à charge partielle, que l’effet « ça mouline sous le capot » se fait quand même ressentir. Mais encore une fois, le son et le velouté du V6 aident (très largement !) à supporter ce moment anti-mécanique, et il suffit d’appuyer plus franchement pour retrouver de la connectivité entre le moteur et la transmission. Les 313 ch sont alors bien présents, les reprises sont bien vigoureuses, et je suis sûr que l’on gagne en efficience à accélérer franchement puis à se laisser glisser dans un effet de roue libre, qu’à faire le médiocre en sollicitant moins le V6, mais plus longtemps.
Et côté efficience ? Dans le détail, j’ai noté des consos allant d’un peu moins de 8l/100 à 9,4 l/100 sur route, selon le rythme et le profil. En ville, c’était 10,4 l/100. Le problème du RX 450h, c’est sur autoroute ou son hybridation light ne lui sert pas à grand-chose : dans ce cas, en étant à la marge de la légalité avec mon ami Waze (mais je porte toujours mon médaillon de Sainte-Chantal, qui repose langoureusement sur ma poitrine poilue), je m’en sors à un peu plus de 12 l/100. Là, c’est sûr, le RX 450h n’est pas l’engin idéal du VRP (mais pour lui, il y a des VRPmobiles). Au final, j’ai noté une consommation globale après une semaine d’essai variée, de 10,5 l/100. Et rappelons que sur des durées d’essai et des parcours comparables, j’ai consommé plus avec un Renault Espace TCe 200 (essai : ici) et son petit 1.6, de même qu’avec le bon élève du downsizing, le Volvo XC90 T6 et son 4 cylindres 2.0 de 320 ch (essai : là). Là, ça nous positionne le gros SUV V6 3.5 globalement au niveau des 3.0 Diesel de la concurrence, ce qui n’est pas une petite prouesse !
Et côté châssis ? Ce qui est intéressant, c’est que j’ai essayé il n’y a vraiment pas longtemps, le BMW X5 40e, qui est éventuellement un concurrent du RX, d’autant qu’il fait lui aussi 313 ch. Le BMW a carrément des points à marquer : son autonomie en mode EV est incomparablement supérieure (à condition de pouvoir recharger souvent, ce qui est un peu difficile dans ma configuration perso appart & garage), son agencement intérieur est très BMW, donc impeccable, et son châssis est un peu plus réactif avec tous les curseurs placés sur Sport. Mais j’ai tendance à penser que la première vertu des autos hybrides, au-delà des considérations écologiques, est de placer leur conducteur dans un mindset plus zen et là, le Lexus RX 450h revient dans la course, avec le confort de son habitacle, le velouté de son V6, la douceur de sa transmission. Et comme leurs tarifs sont comparables, tout comme leurs consommations qui, en dépit de la différence de technologie, le sont aussi, il y a franchement débat. Entre un BMW un peu plus excitant mais un Lexus un peu plus bourgeois, ma préférence irait finalement pour le Japonais pour la sérénité tranquille qu’il dégage. Et le V6 apporte une touche de chic bien appréciable au quotidien.
Et le F Sport, dans tout ça ?
On pourra trouver l’écart de prix conséquent entre le RX 450h de base et la finition F Sport. Le RX 450h commence en effet à 64 900 € en finition Pack, mais le F Sport s’affiche nettement au-dessus, à 78 600 €. Il y a moyen de faire encore mieux, avec le F Sport Executive, à 81 900 €. Et en intermédiaire, il y a la finition Luxe, à 72 600 €.
La F Sport, c’est évidemment du cosmétique, ces détails qui font de la RX une auto apparemment très méchante alors qu’en fait elle est très gentille. Mais nous vivons dans un monde d’apparence, alors vive les jantes de 20 pouces, la calandre en nid d’abeille, le pédalier aluminium, les logos, le bouclier avant plus agressif ! La F Sport, c’est aussi de l’agrément, avec l’éclairage d’intersection, les rétros électrochromatiques, le grand toit électrique, la suspension variable adaptative en mode Sport + (mode d’ailleurs indisponible sur la version Pack), l’affichage tête haute, l’horloge analogique à réglage par GPS, le chargeur à induction pour smartphone, l’audio haut de gamme et le tuner DAB, l’éclairage intérieur à LEDs, le hayon électrique main libres (qui se commande en passant doucement devant le logo Lexus), la sellerie cuir ventilée… Quand on voit la différence de technologie, on comprend mieux les 14 000 € d’écart entre ces deux niveaux de finition.
Et même si chez nous, le RX 450h F Sport n’a pas droit aux barres anti-roulis actives qui sont disponibles sur d’autres marchés. Il n’empêche qu’il ne déteste pas un rythme soutenu, mais en souplesse. Tout en étant extrêmement reposant au quotidien. Pas mal, comme grand écart.
Photos : Gabriel Lecouvreur.