Essai Alfa Romeo 4C : brutale séduction

Un monospace grisonnant, le coffre plein et la famille au complet sur la route des vacances. Un petit garcon de 12 ans regarde frénétiquement depuis sa place arrière le compteur de vitesse osciller entre 111 et 112 km/h. Ses seuls divertissements : les champs à perte de vue et quelques bonbons proposés de temps à autre par Maman. Soudain, un bourdonnement approche, le temps de jeter un oeil par la vitre passager et un splendide bolide rouge ardent double en trombe, suivi de près par une copine d’un blanc immaculé. Ce que les conducteurs avaient l’air heureux à leurs volants… Pour la petite histoire, l’un des deux conducteurs c’était moi, et le bolide n’était autre qu’une Alfa Romeo 4C. Et parler de bonheur à ce moment précis serait beaucoup trop faible.

Vous souvenez-vous de l’essai du Stelvio QV (à relire ici) ? Rien à voir je sais. Sauf que c’est ce jour là, après une belle session au volant du SUV sur le circuit du Castellet que j’ai enfin pu faire connaissance avec ma dulcinée le temps d’une petite heure : la merveilleuse Alfa Romeo 4C. Sans le savoir, J.F. réalisait un de mes vieux rêves. Et le rêve allait se prolonger l’été suivant lorsqu’il m’annonça avec un plaisir non dissimulé qu’un exemplaire allait rejoindre prochainement la flotte du parc presse. Certains rêvent de supercars, d’autres de limousines, je me contenterai d’une sportive pure et dure dans son plus simple appareil. Ca tombe bien, l’été suivant, c’est bel et bien celui qui s’achève en ce moment, et je ne trahirai sûrement pas beaucoup le suspense si je vous dis que cette 4C hante encore mes nuits.

Racée, la 4C mèle à la perfection élégance et agressivité. Elle ne laisse d’ailleurs planer aucun doute quant à ses origines latines à travers sa traditionnelle calandre pointue, sa robe Rouge Competizione qui étincelle au moindre rayon de soleil et ses deux feux arrières ronds. Le profil annonce également la couleur avec un capot court plongeant, au porte-à-faux important compte tenu de la longueur de la bête (3,99 m), des flancs musclés par des prises d’air latérales alimentant le 4 cylindres 1750 cc (emprunté à la Giulietta Veloce mais dont le bloc a perdu au total une vingtaine de kg pour l’occasion) et enfin une poupe très courte, au large diffuseur arrière et aux deux sorties centrales de la ligne titane Akrapovic, le tout surmonté d’un becquet carbone. Notre configuration inclue les jantes “téléphone” en alliage léger de 18 pouces à l’avant et 19 à l’arrière, bien plus élégantes que celles de série au design très fade. Pour 325 €, ne faites surtout pas l’impasse sur les étriers rouge.

Du carbone, la 4C en est bardée. Non contente d’une coque réalisée intégralement dans ce matériau lui permettant de ne peser que 65 kg, elle en arbore sur les rétroviseurs, à l’intérieur des optiques frontales, autour de la double sortie d’échappement mais également à l’intérieur : console centrale et contour du tableau de bord en tête de liste. Le pédalier, realisé intégralement en aluminium mérite également que l’on s’attarde dessus tant il se rapproche de celui d’une voiture de course. La 4C en a d’ailleurs tous les attributs de par sa conception. Une direction assistée ? Futile. Des rangements ? Pour quoi faire ? Une climatisation automatique ? A quoi bon ? Un écran tactile pour les commandes multimédia ? Inutile lorsque l’on a à disposition un bon vieux système Hi-Fi Alpine (tiens, Alpine ?…). Je m’aperçois en rédigeant ces lignes et en vérifiant la fiche produit que la 4C dispose toutefois d’un régulateur de vitesse qui m’aurait pourtant été utile si je m’étais aperçu de sa présence. Qu’importe. Malgré un habitacle très spartiate, le cuir tabac et les surpiqûres assorties sur la planche de bord et les contre-portes apportent un soupçon de raffinement au milieu de cet ensemble si brut. Les sièges Sabelt sont fermes, très étroits mais malgré tout moins enveloppants que ceux d’une Alpine A110, notamment au niveau des cuisses et des épaules. Seule véritable touche de modernité, l’écran TFT en guise de tableau de bord qui me fait curieusement penser à celui de ………… Lamborghini ! Alfa Romeo a d’ailleurs réussi la prouesse malgré sa taille contenue d’y caser l’ensemble des informations nécessaires à la conduite dynamique (à savoir : pression du turbo, température d’huile, température d’eau, rapport engagé, régime moteur et vitesse instantanée) sans avoir recours à un autre écran déporté. Beaucoup d’informations à assimiler mais chaque chose est à sa place et la lecture est aisée.

Le premier contact est réussi. Je sens que l’on va bien s’amuser toi et moi ma belle. J’enjambe avec satisfaction le seuil de porte mélant rouge étincelant et le carbone apparent de la coque pour littéralement tomber dans mon baquet à l’assise très ferme. On comprend rapidement l’importance du volant à méplat pour caser ses jambes plus ou moins sans encombre. La rétrovision semble tout à fait ridicule, entre un rétroviseur central dans lequel je distingue à merveille le cache-moteur mais pas la moindre information provenant d’au delà et les deux rétroviseur extérieurs qui reflètent parfaitement les prises d’air latérales. Le démarrage s’effectue comme le reste : à l’ancienne. Une clef à tourner, ça doit bien faire des années que je n’avais pas vu une sportive moderne se démarrer de la sorte. Contact, un sifflement digne d’un engin aérospatial prêt au décollage s’échappe de la voiture, moteur. Le son du petit 1750 cc est assez quelconque à ma grande surprise. La sonorité ne se libère que via le sélecteur DNA, en optant pour le mode “Dynamic” ou “Race”. Réponse du moteur et passages des 6 rapports de la boite TCT sont optimisés, à la différence que le mode Dynamic autorise de légères dérives avec une intervention de l’ESC la plus tardive possible tandis que le mode Race est réservé à la piste avec l’ensemble des aides à la conduite désactivées. Alfa a eu la bonne idée de garder en mémoire le dernier mode sélectionné entre chaque redémarrage, si bien que ce fameux samedi matin où je suis censé rejoindre une copine de route en direction de la région Champenoise à la première aire de repos de l’autoroute A4, la 4C fait trembler les murs de mon parking dès 8h du matin. Un large sourire s’installe sur mon visage pour ne plus le quitter durant les prochaines 48 heures. Les dizaines de kilomètres qui me séparent de Reims ne sont qu’une formalité. Les rues de la ville s’illuminent et bourdonnent au son grave de la ligne Akrapovic qui pouffe d’impatience à l’idée de s’exprimer pleinement sur les petites routes environnantes parsemées de vignes de part et d’autre de la chaussée. Les premiers regards matinaux et encore fatigués de certains passants sont attirés tels des mouches sur ce qui pour beaucoup, ressemble à une mini-Ferrari.

Notre périple nous mène tout droit et comme tout bon essai de voiture de caractère dans cette région, vers le mythique et fantomatique circuit de Reims-Gueux. Si le défunt tracé n’était et n’est toujours pas des plus intéressants, l’ambiance qui se dégage de ce ruban d’asphalte où subsistent de part et d’autre les tribunes et les stands aux couleurs d’époque reste saisissante. Y amener le porte-drapeau d’une marque, elle aussi chargée d’histoire (plus d’un siècle!), comporte une saveur toute particulière. Je n’amène pas un quelconque SUV grisonnant venant se faire tirer le portrait sur le parking aérien du supermarché du coin, et une fois de plus, les regards appuyés des passants traduisent l’attachement que le grand public porte encore à l’automobile. Sachez vous en rappeler ô grands dirigeants de constructeurs.

L’excellent état des larges routes environnantes invite tout de même à parcourir ce fameux tracé dont les portions quasi-droites sont aujourd’hui principalement reliées par des rond-points, dont notre pays est friand. La 4C démarre en trombe dans un hurlement rauque et rageur. Le souffle du turbo envahit l’habitacle et sa brutalité mes reins. La voiture sursaute à chaque coup de palette et semble tressauter tel un étalon qui arracherait l’herbe de l’hippodrome dans une dernière foulée avant la ligne d’arrivée. C’est physique et mieux vaut avoir les deux mains rivées à 10h15 sur le volant. Le 0 à 100 km/h est avalé en 4,5 secondes, soit 0,1 seconde de moins qu’une Ferrari F40 ! Une anecdote qui aura de quoi faire jaser autour de vous lors des déjeuners avec votre club de trackday préféré. Le freinage mérite aussi que l’on lui consacre quelques lignes. Le pédalier n’a pas d’une voiture de course que l’inspiration esthétique. Son maniement et l’attaque de la pédale du milieu s’en rapproche étrangement, au point que la conduite quotidienne mérite quelques minutes de pratique auparavant. Ça freine fort et le gabarit ainsi que la conception de l’auto requièrent une nouvelle fois toute votre attention. Les larges disques en acier ventilés et perforés de 305 mm à l’avant de et de 292 mm à l’arrière une fois entrés en action mettent fin à toute sensation de poussée en une fraction de seconde. Vos mains n’ont j’espère pas bougé d’un millimètre pour maintenir l’arrière de l’italienne qui à travers son architecture et sa répartition de poids avant/arrière ne demande qu’à passer devant, et ce même sur le sec. Un bon point toutefois sur tracé étroit comme nous pourrons le voir quelques lignes plus tard.

Notre périple nous mène vers les hauts lieux du Champagne avec un grand C. Hautvillers et Epernay résonnent au son des 4 cylindres chantants (même si ces deux mots ensemble peuvent paraître impensables aux yeux des plus puristes parmi les puristes), parce que comme vous l’aurez compris, il y a un bien une autre voiture de caractère mue d’un 4 cylindres qui m’accompagne tout au long de cette journée, il y a d’ailleurs un indice sur une des photos postées plus haut.

Après une pause déjeuner durant laquelle un régiment de guêpes a jugé bon de s’inviter, je reprends le volant plus ravi que jamais. Le soleil brille tandis que le thermomètre approche délicatement les 30°C. Les routes sont étonnement vides de toute trace de touriste en quête du précieux breuvage. On quitte définitivement les axes habituels pour emprunter les routes secondaires à travers quelques sous-bois et des étendues de vignes interminables. Les virages se font bien plus nombreux et serrés. La 4C pouffe de plaisir et son conducteur du jour encore plus. Coup de bol, c’est ma pomme. Le turbo souffle à tous les étages, dès 2500 trs/min pour ne plus s’arrêter jusqu’à la zone rouge qui démarre à 6500 trs/min où le rupteur vous empêche tout excès d’optimisme avec la mécanique. Ainsi, sur les routes champenoises, nul besoin de tomber en 2ème. Techniquement, la 3ème fait le travail de bout en bout en ruptant à 143 km/h. La 4C reste assez simple à appréhender sur le sec mais requiert toutefois toute votre attention sur des parcours plus dynamiques. Le train arrière reste vissé à la route aussi bien en large courbe qu’en virage serré. L’avant qui plante au freinage avec l’arrière légèrement instable permet en gardant du frein jusqu’à l’entrée en courbe de transformer radicalement l’amorce de sous-virage en un mouvement épousant parfaitement la forme de n’importe quel virage. La direction, non assistée, est lourde mais consistante bien que peu précise et difficile à jauger sur les premiers degrés d’inclinaison. C’est toutefois un vrai régal. Pas un degré de roulis, le 4 cylindres chante à tue-tête, l’échappement crépite de temps à autre tandis que le turbo à chaque lever de pied lâche un roucoulement digne d’une Toyota Supra préparée Stage 327. Mais la conduite est fatigante. Le siège Sabelt reste plutôt approximatif dans son maintien aux épaules et une telle brutalité dans le freinage et dans les accélérations mériterait un véritable harnais trois points afin d’éviter de se cramponner au volant qui retranscrira la moindre imperfection du revêtement sur lequel vous évoluez. Pas question ici de conduire à une main, le smartphone dans l’autre. De toutes manières, c’est interdit.

Je souffle enfin, le jour d’après, assis en terrasse, sirotant un jus de fruit et observant de loin les regards une nouvelle fois fascinés par le bolide italien. Exubérante dans les lignes, la 4C l’est aussi dans sa philosophie générale et son comportement. À des années lumières d’une GT, difficile à apprivoiser et demandant votre attention complète derrière le volant (croire le contraire m’a vivement rappelé à qui j’avais affaire), la 4C ne sera définitivement pas votre compagne du quotidien. D’autant que sur un trajet d’1h30, vous passerez bien un tiers de votre temps à escalader les dos d’âne, qui pour 90% d’entre eux je vous l’assure, ne sont pas aux normes dans notre chère région francilienne… Mais alors pourquoi l’acheter ? Il vous faudra tout d’abord apprécier les voitures dotées d’une véritable personnalité, accepter ses défauts pour n’y voir que des qualités et finalement ne la comparer à aucune autre, car elle ne prétend nullement battre à plate couture la concurrence, rare et parfois inadaptée. Non, la 4C est au dessus de ça. Elle propose simplement son propre univers, un univers qui se rapproche décidément beaucoup d’une voiture de course, et rien que pour ça, j’en suis tombé amoureux. Virus Alfa ? Pas sûr. Virus 4C ? Absolument.

Du coup, j’aimerais bien voir ce qu’une marque française récemment sortie du sommeil pourrait proposer d’équivalent. J’espère d’ailleurs que cette dernière me lit. À bon lecteur…

Merci infiniment à FCA France et notamment à JF Serre pour le prêt inhabituel.
Crédits Photos : Mathieu Bonnevie 

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